Howling at the moon [Sheppy & Erin]

- Erin ?

La consultante se retourna quelque peu pour identifier une voix vaguement familière. Derrière elle se trouvait une jeune afro américaine qui la toisait, son plateau de victuailles entre les mains. Aussitôt, l’alpaguée Erin reconnut là Hailey Spalding, soldate de première classe dans l’air force, arrivée elle aussi par le dédale en 2016. Les deux jeunes femmes avaient fait plus amples connaissances à bord du vaisseau terrien pendant les longs jours qui s’étaient étirés entre le départ et l’arrivée du croiseur. Cette petite de vingt-cinq ans était d’un naturel très sociable, et elle ne jugeait pas les gens par leur fonction mais plutôt par leur personnalité. Une certaine forme de sagesse que peu de personnes plus âgées qu’elle possédait.

Erin se fendit d’un sourire alors qu’elle reposait sa fourchette pour se tourner un peu plus vers la demoiselle.

- Hailey ! Ca me fait plaisir de te voir.
- Moi aussi. Je ne vous avez pas vu depuis que nous avions débarqué. J’ai pensé que vous étiez repartie !
- Et non comme tu le vois.

D’un geste, et voyant que la militaire n’était pas accompagnée, Erin l’invita à la rejoindre à sa table du réfectoire. La consultante ne se formalisa pas de l’aspect « coincé du cul » du première classe Spalding qui n’avait cessé de la vouvoyer depuis qu’elles se connaissaient. Elle avait beau lui avoir fait la remarque plusieurs fois, rien n’y faisait, elle ne démordait pas et continuait à lui donner du « vous » et du « madame ». D’ailleurs, c’était sans doute la surprise qui l’avait poussé à l’appeler par son prénom et Erin espérait que ce petit écart à son code personnel de communication lui permettrait de franchir un cap verbal entre elles.

Les deux jeunes femmes discutèrent un moment, de tout et de rien, comme elles l’avaient fait sur le Dédale. Les discussions s’orientèrent ensuite sur l’acclimatation de la militaire à la vie lantienne, les différentes missions auxquelles elle avait participé, essentiellement d’exploration et de ravitaillement sur le continent. Erin lui confia avoir du mal à s’intégrer de son côté. Elle soupçonnait son qualificatif professionnel de faire obstacle à cela, mais qu’importe, elle était plutôt optimiste sur l’avenir et elle commençait sérieusement à se plaire ici, n’en déplaise à certain.

Hailey embraya sur ses projets d’après diner, lui rapportant qu’une petite soirée DVD s’était organisée. Elle proposa donc à son amie de se joindre aux autres personnes présentes, cela lui permettrait sans doute de faire plus ample connaissance avec d’autres acteurs de la mission Atlantis. Erin trouva l’idée séduisante, dans le sens où, pour un premier contact avec plus de monde, la soirée film était idéale. Déjà, les discussions se faisaient avant et après la diffusion, ce qui permettait de ne pas avoir à trop parler d’entrée de jeu. Et puis, le sujet des films permettait d’orienter les discussions, sans entrer dans des considérations personnelles trop rapidement. Et puis, il fallait qu’elle participe, ne serait-ce que pour commencer le long et douloureux processus d’intégration auprès de ses congénères humains, fiers représentant de l’inestimable race humaine terrienne, ici, au beau milieu d’une galaxie qui n’était pas la leur.

De toute façon, malgré ses airs guindés et coincés, Hailey ne lui laissa pas vraiment le choix.

Après le repas, les deux jeunes femmes s’orientèrent donc vers la petite sauterie. Hailey entra en terrain conquis, très à l’aise (et remettant en cause le profil « coincé du cul » que Erin avait bâti autour de l’américaine) en lançant un « bonsoir » général et saluant les officiers et sous officiers comme il se doit, puis elle ajouta :

- Je vous ramène une amie, Erin Steele.

La susnommée qui était quelques pas en retrait s’avança, affichant un petit sourire, et elle adressa un « bonsoir » collectif aux personnes déjà présentes. Hailey quant à elle fila s’installer, sans vraiment se soucier de savoir si ça embêtait quelqu’un. Apparemment, il y avait de l’ambiance puisqu'elles arrivaient pile au moment où tout le monde se marrait et qu'un des soldat descendait du dos d'un autre. Ca promettait. Erin connaissait de visu le Lieutenant Colonel Sheppard, quant aux autres, ils lui étaient totalement étrangers.

- Volontiers, répondit-elle du tact au tact au jeune homme qui lui proposait un cadeau de bienvenue, en l’occurrence, une bière française qu’il venait de piocher dans le pack que le Lieutenant-Colonel avait apporté avec lui. D’ailleurs, ce dernier s’approcha, pour la saluer à son tour. Au moins, lui, elle le connaissait du visu.

- Colonel, salua-t-elle. Hailey m’a vanté les mérites de pareille soirée, argua-t-elle afin de confirmer les dires de ce dernier. Le ton était tout aussi amical.

Elle ne savait pas si elle faisait tâche ou pas dans la soirée, et à dire vrai, elle s’en moquait complètement. Ce soir, elle était Erin, fille de la famille Steele, ni plus ni moins. Son rôle et son boulot étaient mis de côté. Elle n’était pas là pour enquêter, fouiner, faire chier le monde. C’était détente. En cela, elle se sentait plus ou moins rassurée, voyant qu’elle arrivait plus ou moins à faire la part des choses. C’était sa grosse appréhension, dissocier vie privée de vie professionnelle, dans une mission qui mêlait les deux au quotidien. Enfin, c’était un rythme à prendre, et petit à petit, elle allait y arriver.

Tout comme elle allait s’habituer à être catalogué par les autres à cause de son appartenance aux sbires de la commission internationale de surveillance. Si au moins ces personnes savaient le rôle de cet organisme, peut-être qu’ils seraient plus tolérants. Au moins, en partageant un bout de quotidien régulièrement avec du personnel d’Atlantis, elle allait pouvoir dé diaboliser tout ça. Du moins l’espérait-elle. Elle n’avait jamais eu de soucis à tisser des liens par le passé, alors pourquoi en aurait-elle aujourd’hui. C’était normal qu’elle s’inquiète, elle venait d’arriver dans un nouvel environnement avec des nouveaux collègues de travail dont certains deviendraient peut-être des amis.

Pas le temps de papoter plus longtemps, que le militaire qui l’a accueilli se lance dans une bagarre bon enfant avec un de ses collègues qu’il vient d’éjecter du fauteuil. La jeune femme se serait bien avancée pour leur dire qu’elle prendrait une autre place, mais Sheppard la devança, arguant qu’il était le doyen et qu’il revendiquait le siège. Il récolta une bière au passage et s’empara du pot de popcorn. Excellente initiative. La brune plongea ses doigts dedans pour en récolter quelques-uns.

- J’espère que le film ne fout pas les pétoches en tout cas. Elle avait raté le pan de conversation sur le thème de la projection du soir. Et à qui ai-je affaire ? demanda-t-elle à Sheppard en montrant Matt avec sa bière. La soirée promettait d’être agitée.

Le Colonel lui rapporta que le film était juste un peu angoissant. A elle d’ajouter, sur un ton léger :

- Si ce n’est que ça, je devrai survivre.

A dire vrai, elle a déjà vu les Aliens, mais regarder ces films à nouveau à des parsecs de la Terre, dans une galaxie inconnue et gouvernée en quelque sorte par les Wraiths, donnait une toute autre saveur à cette diffusion. Enfin, Erin était persuadée qu’elle garderait ses craintes pour elle sans les faire partager à la salle entière en poussant un cri de peur ou de terreur. Elle pariait sur sa connaissance des films pour éviter les scènes qui surprenaient et qui incitaient donc à donner de la voix.

- Le sergent Eversman, d’accord.

Elle fit un sourire à John pour le remercier de ses précisions. Bien entendu, elle en avait déjà entendu parler, pas qu’en bien. Mais qu’importe. Elle n’était pas au boulot ! Autant profiter de la soirée dans la bonne humeur, sans préjugé d’aucune sorte. Et puis à première vue, il était plutôt amical, le joyeux drille de l’armée des Etats-Unis d’Amérique. D’ailleurs, ce dernier fit une remarque plutôt osée à Sheppard. Erin haussa les sourcils, tandis que le concerné prenait la remarque du Sergent avec philosophie et humour. Ces deux-là devaient bien se connaître pour utiliser ce mode de communication. D’un côté, ça devait être ça, la fraternité de la soldatesque. Qui était-elle pour se mettre en travers en disant « on ne fait pas ça, on ne dit pas ça ! ». Elle n’avait pas encore l’âge d’être une mamie ! Bref, Matt écopa d’une pluie de popcorn, ce qui eut le mérite de faire rire la brune qui en profitait alors pour s’asseoir, bientôt rejointe par Sheppard.

Le noir se fit et le film se lança. Bien entendu, Eversman bien décidé à animer la soirée prit à parti une Erin qui s’en serait bien passée, pour lui conseiller de surveiller l’état de veille du Lieutenant-Colonel. Ce dernier pouffa avant de le rembarrer. Erin ne savait pas si elle devait, ou pouvait, rentrer dans le jeu, aussi se contenta-t-elle répondre au Sergent :

- Je ne suis pas certaine qu’il réussisse à s’endormir vu comment vous êtes bavard !

Le ton était amical, dans la lignée des réparties de Sheppard. Elle leva sa bouteille de bière au-dessus de son siège pour que Matt la voit, vue qu'elle était devant et lui sur une rangée derrière, un peu de façon à dire de manière non verbale : ceux qui te taquinent te saluent ! ou bien était-ce un simple : prend toi ça et à la tienne copain. Allez savoir.

Le film démarrait, laissant les spectateurs renouer avec un classique de la science-fiction, bien confortablement installés dans le noir total de la pièce. L’obscurité était déchirée par les images à l’écran, tandis que les enceintes propulsaient un son des plus plaisant dans la salle. Décidément, les Atlantes avaient fait les choses comme il fallait. C’était une bonne initiative, car les moyens de distractions n’étaient pas légions. Certes, on retrouvait quand même la plupart des infrastructures terrestres, mais ce n’était pas vraiment comme à la maison. Allez regarder CNN en sirotant votre sirop de grenadine le soir en rentrant du boulot sur Atlantis vous. Bref, il était donc normal que les résidents de l’expédition aménagent leur cité pour la rendre vivable dans le sens où il ne fallait pas toujours penser au travail et encore au travail. Certes, tout le monde restait plus ou moins dans un état de veille sécuritaire au cas où les affreux suceur d’énergie décidaient de revenir faire un tour dans le coin pour vérifier qu’il ne restait pas un ou deux terriens à se mettre sous la main (littéralement), mais dans l’ensemble, les gens arrivaient à casser le rythme quotidien du boulot.

Et les militaires étaient doués pour ça, ne serait-ce de par leur expérience à l’étranger où ils étaient basés des mois durant.

Ca faisait dix petites minutes que le film avait démarré, et on entendait plus Eversman qui s’était fait rembarrer par le Lieutenant-Colonel et la consultante. Tout le monde suivait donc la projection bien sagement, sauf la rangée de derrière qui préparait un attentat aux mains fraîches sur la rangée de devant, ciblant notamment deux personnes bien particulières. Une frappe chirurgicale en somme. Prise dans le film, Erin ne sentit pas la menace fantôme approcher, et c’est dans un cri d’effroi qu’elle accueillit les doigts bien froids du Sergent, provoquant l’hilarité générale. Sheppard y avait eu le droit aussi, sauf qu’il avait eu la délicatesse de sursauter, uniquement. Heureusement qu’elle n’était pas en train de boire une gorgée de bière à ce moment-là…

La peur subite suivit des rires de la salle firent monter le rouge aux joues de la consultante qui s’en voulait d’avoir crié. Certes, elle s’était promise de ne pas donner de la voix, mais si en plus des scènes de peur, certains y mettaient des effets spéciaux réels, il n’en fallait pas plus à la demoiselle pour crier. Elle se retourna vivement, accompagnant Sheppard dans son mouvement. Bien entendu, le petit plaisantin n’était autre que le Sergent Eversman qui tenait là sa petite vengeance.

Erin rigola finalement avec les autres, plus amusée par la blague qu’en colère. Ce n’était vraiment pas le genre. Dans la foulée, elle reçue les popcorns que tenait John, lequel s’élança vers son vis-à-vis pour lui mettre une raclée amicale. Il n’y en avait pas un pour rattraper l’autre. La brune était tentée de jeter des popcorns sur les deux compères, mais le pot était déjà sérieusement entamé, elle n’allait pas le vider alors que son voisin de visionnage semblait piocher allègrement dedans.

L’officier termina sa petite séquence gratounage de crâne par une menace sucrée avant de retourner à sa place. Personne n’avait vraiment suivit la suite du film, mais tout le monde s’en foutait, Erin comprise, qui passait une soirée amusante et atypique.

- Ca fait un partout, dit-elle à l’adresse de Matt avec un sourire.

Et elle comptait bien faire en sorte que ça fasse deux un pour elle. Elle ne savait pas encore comment elle allait s’y prendre, mais elle tenterait de refiler une bière bien secouée à l’hurluberlu afin qu’il prenne une douche en la décapsulant. Erin était joueuse. Et patiente.

Trinquant à la réussite de sa petite blague et de l’effet engendré avec ses potes, Matt en repéra pas de suite la contre-offensive lancée par l’officier. Lorsqu’il en prit conscience, il était déjà trop tard. Un bras venait de se positionner autour de son cou, une main autour de son crâne pour y délaisser quelques rudes caresses. Joueur, Eversman ne se laissa pas faire cherchant à briser le carquant dans lequel il était enfermé. Pour plus de sécurité, on lui ôta la bière des mains mais lui y vit une occasion supplémentaire pour se libérer. Ses doigts se refermèrent sur la tignasse noire de l’officier mais il ne chercha pas à modifier son apparence corporelle en lui arrachant quelques mèches. Il y eut bien sûr quelques petits coups dans les côtes mais rien de bien méchant, juste du jeu.
La prise prit fin laissant un Eversman au visage rougi par le contact glacial. Quelques tapes de ses collègues pour le charrier sous un rire général.

« Même pas peur, mon Colonel. »

La réponse à la provocation fut du tac au tac. Il aimait provoquer, taquiner et sur ce point-là les deux hommes se ressemblaient fortement. Sheppard savait peut être s’arrêter quand il le fallait alors que lui plonger tête devant. Peut-être pour ça qu’il était désormais le CO (Commander Officer) de la base et lui Sergent Maître néanmoins ce soir, il n’y avait plus de grade qui comptait. La remarque de la rouge relança aussitôt le sujet.

« Hey ! Non ! 2 pour moi. Je vous ai eu tous les deux ! »

A l’instar d’un gamin, il fallait qu’il sorte vainqueur de la partie et tous les moyens étaient bons pour y parvenir. Le Ranger ne manqua pas de récupérer sa bière, plutôt moins fraiche que tout à l’heure pour en savourer la couleur ambrée. Le silence revint dans la pièce, chacun cherchant à raccrocher au film ayant plus ou moins suivi ces dernières minutes.

Cela avait beau être un oeuvre, le Sergent eut beaucoup plus de mal à suivre le contenu de l'histoire, visiblement ses compères aussi. Après vingt bonnes minutes de silence, ils trouvèrent d'ailleurs un petit jeu amusant, viser le pot de pop corn des deux amoureux. Il fallait faire ça discretement. La récolte des différents capsules s'organisa, les glissant dans les poches de leur uniforme et en récupérant certains par terre. En tant que génie du mal, Eversman organisa le groupe en leur proposant de lancer un par un tandis que les autres auraient un air passionné par le film. La tâche était hardue, les échecs s'accumulaient.

La réussite de l'un d'eux provoqua quelques cris de joie et quelques gestes de victoire. Machinalement Eversman leva les mains vers les deux compères, un grand sourire aux lèvres.

"Pas moi. je suis innocent !"

La consultante ne pensait pas que lieutenant-colonel pourrait mettre sa menace à exécution, et la suite allait lui démontrer le contraire. Cela dit, Matt prit le parti de répondre à Erin en affirmant qu’il avait deux points. Certes. Avec un sourire amusé, elle répondit simplement :

- Et bien plus pour longtemps, j’en suis certaine !

C’est confiante qu’elle reprit place convenablement sur son siège pour visionner la suite du film qui commençait à être sérieusement entamée. Heureusement que pour la majeure partie des personnes présentes dans la pièce, ce film était du déjà-vu. L’américaine avait plutôt le sentiment que ce genre de soirée n’était qu’un prétexte pour se retrouver entre amis et déconner. La joyeuse bande semblait pour le moins complice, et ce n’était pas les jets de capsules venant de derrière qui allait contredire cette assertion. Décidément, ils ne s’arrêtaient jamais. Au moins, le film avait eu le temps d’avancer de vingt bonnes minutes depuis la dernière blague du sergent maître.

Sheppard piochait avec un certain enthousiasme dans le pot de pop-corn qui commençait sérieusement à se vider. D’ailleurs, le jeune homme y mettait du zèle pour empêcher de tierce personne – à l’acception d’Erin qui avait apparemment un passe-droit – d’accéder aux précieux maïs caramélisés. C’était du Sheppard tout craché. La pluie de capsules avait un but : faire chavirer le bol. Et finalement, un tir plus précis (surement un artilleur ou un tireur d’élite) fit mouche sous les vivats des autres révolutionnaires anti-on-peut-regarder-un-film-tranquillement-sans-que-ce-soit-le-bordel.

Sheppard fit semblant de s’offusquer mais son air amusé ne trompait personne. Il y allait avoir du sergent à manger ce soir ! L’officier supérieur se tourna vers la consultante, lui proposant de tenir Matt pendant que cette dernière lui fourrerait le museau de bonbons en tout genre. Bien sûr qu’elle en était !

- Le temps de la vengeance a sonné, répliqua-t-elle à Sheppard pour lui donner son approbation.

Si on lui avait dit qu’elle serait dans une salle de cinéma à des milliards de milliards de kilomètres de la Terre dans une lointaine galaxie en train de bourrer de bonbon un militaire avec l’aide d’un autre, elle ne l’aurait pas crue. La situation était vraiment ubuesque. Sheppard réussit à immobiliser le soldat, mais ce dernier ne se laissait pas vraiment faire. Erin attrapa le saladier plein de sucreries tout en appelant son amie à l'aide.

- Hailey, un coup de main ?

Le première classe Spalding ne se fit pas prier pour venir prêter main forte à son colonel et à son amie. Erin s’agenouilla en face de Sheppard et pendant que sa comparse bouchait le nez du soldat, elle fourra une ou deux bonnes poignées de bonbons dans le gosier d’Eversman, en répandant partout de part et d’autre de sa tête qu’il gesticulait pour se défaire de la prise de John. Aussitôt l’opération faite, Hailey relâcha les naseaux du militaire pour lui permettre de respirer, car ce n’était pas avec les sucreries dans la bouche qu’il aurait pu le faire. La mission était accomplie. La salle était en ébullition et tout le monde se marrait. Erin se redressa et en tapa cinq avec son amie. Elle se tourna vers Sheppard pour faire pareil.

Ne jamais prendre à la légère une menace d’un type aussi barré que vous. Quoiqu’il en soit, Erin attrapa une bière qu’elle secoua de façon discrète, le temps de se retourner vers les deux soldats. John finissait de s’occuper de lui amicalement. Erin tendit la bière à Matt avec un innocent :

- Désolé Sergent, tenez, pour vous aider à avaler. Elle lui colla la bière dans les mains, avant d’ajouter : Sans rancune j’espère.

La riposte ne tarda pas à venir. Le temps que les felons ne s’accordent avant de les voir se ruer sur lui. Matt tenta bien de riposter, de ne pas se laisser faire par le Lieutenant Colonel mais ses reflexes semblaient quelque peu inhibés. Certainement la quantité importante d’alcool en peu de temps et sans manger quelque chsoe de conséquent. Il se retrouva face contre terre bien plus vite qu’il espérait, le Colonel sur le dos.

« Ouch… faudra penser à stopper les pop-corn là. » prononça-t-il d’une voix quelque peu étouffé par le poids sur son dos. Pas question de rester là à se lamenter, il tenta de faire basculer la situation à son avantage en ruant en tous sens. Peine perdue. Le bras droit fut soudainement bloqué et tout autre mouvement entrainait une douleur croissante au niveau de l’omoplate. Pas le choix, il devait coopérer mais cela n’empêcher pas quelques ruades pour tenter de renverser l’adversaire et lui faire perdre le contrôle. Le nez cotoyant les odeurs de pieds, de vieux pop-corn et les minoux, ce n’était pas le top. Sheppard annonça la suite du programme.

« J'te laisse ma place volontiers, Sheppard… »

Des doigts se refermèrent sur son nez l’obligeant à abandonner cette voie respiratoire pour passer à l’autre quelques centimètres en dessous. Quelque chose fut brutalement inséré dans la bouche. Il le recracha immédiatement avant que d’autres furent placés en bouche. Ce fut le début d’une petite révolte du Sergent qui tenta par tous les moyens de cette situation grotesque : tentative de morsures, de coups de bassin ou même regards noirs avant ses agresseurs. Rien n’y fit. Une accentuation de la torsion de son bras le ramena à un calme tout relatif. On continuait de le fourrer de trucs mous avant que finalement il soit relâché. Recrachant le contenu de sa bouche au sol, il fut ensuite pris d’une quinte de toux avant que tout ne revienne à la normale. Son visage avait une teinte rouge, témoin de l’effort des dernières secondes. Poussant sur ses mains, il se remit sur pieds assistant aux célébrations des vainqueurs sous les tapes amicales des potes, morts de rire. Non mais ils pouvaient pas l’aider au lieu de se marrer.

L’une de ses tortionnaires lui tendit une bière pour se faire pardonner. Erin eut le droit à un regard noir même si ses lèvres affichaient peu à peu un sourire. Ok, il avait perdu sur ce coup là.

« Trois personnes sur moi, c’est petit… »

Mais bon c’était une très petite victoire. Il aurait sa vengeance mais avant une petite bière. D’un geste tout en dextérité, il fit sauter la capsule de la boisson et là la mousse blanche s’empressa de sortir. Le temps de réagir et d’écarter la cannette, le bas de son t-shirt et un peu de son pantalon étaient déjà détrempés. Le sourire malicieux qui habitait les lèvres d’Erin la rendait suspect. Cela n’allait pas se passer comme ça. Attrapant la première bouteille gazeuse à proximité, le Sergent la secoua fortement, l’ouvrit avant d’apposer de suite son doigt au goulot lui permettant de diriger le jet de mousse alcoolisée. Ce fut le début d’une grande bataille générale où chacun fut aspergé. Lui poursuivit même la Rouge dans la pièce, bouteille à la main finissant de la bloquer contre le canapé où il renversa la fin de son contenu sur ses beaux cheveux. Vengeance… Lui restait encore à s’occuper de l’autre zigoto ainsi que la dénommée Hayley.

"Et hop deux miss t-shirts mouillées... Manque la troisième !"

Une bouteille plus petite fit l’affaire pour cette dernière et il se lança ensuite à la poursuite du Colonel. Agile, celui-ci passa de l’autre côté des canapés mais fut bloqué par un allié du Sergent qui s’empressa de gueuler qu’il l’avait. Malgré quelques menaces à son encontre, il tint bon et Eversman se chargea de réduire à néant le brushing de son supérieur en l’aspergeant avant de caresser la tignasse. Vengeance obtenue, il but les quelques centilitres restants.

Le jeune soldat ne se laissa pas faire et ce fut avec quelques difficultés qu’Erin réussit à remplir sa bouche et son gosier avec les sucreries. Certes, il n’avait rien d’une oie, mais il expérimentait le gavage forcé d’une bien belle manière. Ce n’était pas évident de le fourrer étant donné qu’il ne se laissait pas faire, se démenant comme une furie pour se soustraire à son supplice. Néanmoins, le colonel tenait fermement son bras, exerçant une pression contraire à l’articulation qui allait tirer sur l’omoplate douloureusement. Une fois la clé mise en place, il était difficile de s’en dégager, surtout à plat ventre. Une fois le forfait effectué, les trois compères relâchèrent le ranger qui recracha l’essentiel des bonbecs par terre. Sheppard rajouta une couche, feignant l’indignation et les consignes parentales. Cette soirée, c’était vraiment du grand n’importe quoi. Et ce n'était pas fini ! Hailey n’avait pas menti en disant qu’on s’y amusait bien.

Le sergent l’avait clairement mauvaise mais il accepta quand même la bière qu’Erin lui tendit, avec un regard noir. Néanmoins, il commençait à sourire à nouveau, même s’il tentait de justifier sa déculottée par le fait qu’il était seul contre trois. Après, c’était Sheppard qui avait fait l’essentiel du boulot. Qu’importe les moyens tant que le résultat était là, non ? Du moins, pour ce coup-ci, car cette assertion n’était pas toujours vraie.

Le petit coup de Trafalgar de la consultante sur la bière du sergent fit mouche et il se retrouva avec le t-shirt imbibé d’alcool, l’odeur de houblon en bonus. Malheureusement pour elle, son air satisfait peint sur les lèvres eut tôt fait de la démasquer. Ce fut l’apogée du grand n’importe quoi. La salle de repos fut le théâtre de la folie de l’alcool et des hommes. Erin le vit arriver gros comme un vaisseau ruche. Le jeune homme attrapa une bière qu’il secoua violemment et la dégoupilla telle une grenade avant de faire lance à incendie en pressant le goulot avec son pouce. Il arrosa sans vergogne la consultante qui tenta bien de se mettre à l’abri derrière le canapé, mais c’était sans compter sur la détermination du militaire qui se lança à sa poursuite. Au final, après l’avoir détrempée, il parvint à la coincer contre ledit canapé, et termina son chef d’œuvre en apothéose : il vida le contenu restant de sa boisson sur la tête de la pauvre Erin.

Cette dernière s’était figée, partagée entre le dégout, la colère, la surprise, bref, elle était choquée qu’il soit allé jusque-là. Ce gamin n’avait aucune limite ! Elle sentait le liquide couler sur ses cheveux, suivre les mèches pour se déverser dans son cou. Il fila ensuite s’en prendre à Hailey et Sheppard. Pendant ce temps, Erin se redressa, les vêtements poissant, l’odeur de bière dans les narines, et les cheveux ratatinés sur la tête, dégoulinant de bière. Elle ne savait plus quoi dire ou quoi faire.

Dignement, elle regarda Sheppard s’en prendre une dernière fois à Matt, avant de s’en aller avec un bref :

- Vous m’excuserez.

Le ton était sec et on sentait clairement qu’elle se contenait. Son air était fermé et à l’intérieur de sa petite tête, plusieurs émotions contradictoires se heurtaient. A dire vrai, elle était partagée entre la colère et l’amusement. Elle avait envie de rire tout en faisant la gueule. Bref, elle était vexée ! C’était pourquoi elle préféra s’en aller… De toute façon, la soirée était finie, ils n’allaient pas regarder les quelques minutes restantes du film en baignant dans la bière. Là, elle ne souhaitait qu’une chose, prendre une douche et glisser la viande dans le torchon. Néanmoins, elle avait passé une excellente soirée, et elle ne bouderait pas son plaisir de recommencer, même en sachant que ça finirait comme ça.

Le Sergent l'avait mérité sa fessée !

END 02/09/2016