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Normandie MJ : les soins du désespoir (solo Skyler)

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Skyler McAlister
Médecin Neurochirurgien
Bannière perso (image 901x180px) : Normandie MJ : les soins du désespoir (solo Skyler) Bannie16
√ Arrivée le : 08/07/2017
√ Nationalité : Anglaise / Irlandaise

√ Gène : Aucun
√ Messages : 443

Ven 31 Aoû - 22:07

Skyler McAlister
Les soins du désespoir
Normandie MJ : les soins du désespoir (solo Skyler) Lljj
RP écrit avec Steven Caldwell


Skyler McAlister


La guerre était terminée dans la salle du Syphon. Les derniers wraiths s'enfuyaient, ou du moins essayaient car Alek ne l'entendait pas de cette oreille. Tandis que la Gardienne, une créature étrange, reprenait possession d'une étrange orbe verte, je me redressai et quittai ma cachette. Reinho était toujours inconscient, mais son état était stabilisé. Il allait probablement perdre la vue, mais il était vivant, contrairement à de nombreuses personnes présentes dans cette bataille. La quasi totalité de l'escouade de Kim avait été anéantie, et en voyant l'un des soldats gravement blessé et agonisant, je me précipitai vers lui, essayant d'arrêter l'hémorragie provoquée par un couteau. Malgré mes gestes, je ne pus rien faire pour lui. Je le regardai s'éteindre lentement, avant de prendre quelque chose dans sa poche. Une enveloppe tâchée de son sang sur mes mains, qui contenait une lettre pour sa famille, ainsi qu'une photo. Je glissai l'enveloppe dans une poche de mon gilet, avant de fermer les yeux du malheureux. Puis, je m'essuyai les mains plein de sang. Je me redressai et vis le corps de Kim un peu plus loin, assise, la tête penchée sur le côté comme si elle s'était simplement assoupie, je ne pus m'empêcher de ressentir un pincement au coeur. Je vins m'agenouiller à ses côtés, vérifiant son pouls qui m'annonça clairement son décès. Je n'avais pas réussi à la sauver malgré la volonté de la militaire de retourner au combat. Sans parvenir à m'en empêcher, quelques larmes coulèrent sur mes joues. J'aurais du la sauver, j'aurais du réussir à l'empêcher de partir et à lui faire entendre raison. C'était ma faute, tout simplement, même si en réalité, c'était la faute de cette foutue guerre. Mais, c'était toujours difficile pour un médecin de perdre un patient, comme plusieurs qui étaient arrivés sous la tente médicale, et qui ne s'en étaient pas sortis malgré les soins prodigués.

Alors que quelqu'un annonça à la radio qu'une personne était gravement blessée et avait besoin d'un médecin en urgence, j'essuyai les larmes sur mon visage, avant de me redresser. Ce n'était pas le moment de craquer, d'autres avaient besoin de moi. Un dernier regard triste vers le corps de Kim au loin, puis je suivis le reste du groupe qui devait m'escorter jusqu'à destination. Je me renfermai dans ma bulle, voulant oublier pour le moment les échecs passés pour ne penser qu'aux vivants qui avaient besoin d'aide. Après de longues minutes, nous arrivâmes sur le toit de la deuxième zone de guerre, qui ressemblait davantage à un charnier qu'autre chose. De nombreux corps jonchaient le sol, que ça soit des ennemis ou des alliés. La guerre avait fait rage ici. Un militaire voulut m'aider à descendre en rappel, et ce fut une étape très difficile pour moi. Il fallut même beaucoup de temps pour que je sois entraînée dans le vide, vu mon gros soucis de vertige. Je me souvins des paroles de Naalem, lorsque j'avais eu une crise lors de notre rencontre, et grâce à la ténacité des autres membres de l'équipe, je parvins enfin, contre mon gré bien sûr, à descendre le long de la corde, les yeux fermés. Une fois sur la terre ferme, je pus reprendre des couleurs, et calmer cette terreur qui m'avait envahi depuis plusieurs minutes. Toutefois, je n'eus pas le temps de me reprendre davantage qu'un homme, plus précisément un Natus, courut vers moi en criant. La personne blessée était donc sa femme.

Sur mes jambes encore un peu faiblardes à cause de la descente en rappel, je suivis Paresok jusqu'au corps de sa compagne, qui n'était pas beau du tout à regarder. Je la reconnus aussitôt, c'était Idène, elle m'avait confié l'une des siennes après notre atterrissage. La pauvre avait une lance plantée dans le ventre, elle avait du souffrir le martyre. Heureusement, elle paraissait inconsciente. Me remettre au travail m'aida beaucoup à oublier ma mésaventure précédente, et je m'accroupis à côté du corps d'Idène. Paresok restait à proximité, me suppliant de la sauver, tandis qu'un jeune militaire vint me rejoindre, m'expliquant avoir suivi un stage médical pour avoir quelques connaissances dans ce domaine. Comme Matt il y a quelques temps. J'acquiesçai d'un hochement de tête, toute aide était la bienvenue dans ce genre de situation.

"Très bien, vous allez m'assister. Préparez le matériel nécessaire et placez les capteurs pour surveiller les constantes sur le moniteur" lui dis-je tout retirant mon sac à dos pour qu'il y ait accès, ainsi que mon ordinateur.

Je sortis deux paires de gants stériles, en donnant une à Hadisson, avant de déployer et de poser une serviette sur le sol, afin d'y placer les différents ustensiles pour éviter de les mettre directement en contact avec le sol. Pendant que Joey s'exécutait, je commençai à examiner visuellement le corps d'Idène. Celle ci était vraiment très mal en point. Elle présentait de nombreuses entailles à divers endroits, provoquées par quelque chose de coupant. Plusieurs hématomes et abrasions de la peau qui trahissaient un combat très violent. Cependant, ces blessures n'étaient pas graves en soit, car ce qui me préoccupait le plus était la nuque de la jeune Natus, dont la tête était penchée sur le côté droit alors que le corps était allongé sur le dos. La nuque avait un angle inhabituel, et après une palpation effectuée avec précaution, je me rendis compte qu'elle était brisée. Toutefois, après avoir vérifié quelques stimulis au niveau des membres, je fus rassurée de constater que la moelle épinière n'était pas touchée. C'était un véritable miracle, mais qui pouvait rapidement mal tourner si la tête bougeait. Idène risquait de se retrouver paralysée, et ça, je devais l'éviter.

Regardant la lance et la blessure qu'elle causait avec précaution, je ne pus que faire des déductions. Etant donné la zone, la profondeur et l'angle de la perforation, le foie d'Idène était peut être touché, sans oublier les organes situés autour. Et là, j'allais avoir un problème, car étant neurochirurgienne, les organes internes du corps humain n'étaient pas ma spécialité. J'avais bien des connaissances de médecine générale acquises à la faculté, mais ce n'était pas suffisant pour opérer ce genre de blessure pour moi. Il me fallait de l'aide, mais qui ? L'image de Swassons me vint alors en mémoire, mais ce dernier était sur le Dédale, et non pas sur la planète. Comment faire ? Le contacter par radio, oui c'était la solution. Et pour cela, j'avais besoin de la centrale. Centrale qui se trouvait sous la tente médicale. Bien trop loin pour aller la chercher, et transporter Idène jusque là bas était impossible, elle n'était pas du tout transportable. Je devais stabiliser son état pour qu'elle soit envoyée à bord du Dédale, afin que le chirurgien puisse s'occuper d'elle. C'était peine perdue. Mais ... mais oui, Pedge Allen avait la sienne avec elle. Et la militaire n'était pas très loin. Je ne savais pas ce qu'elle faisait en ce moment, étant très loin de me douter du bordel qu'il se passait entre elle et deux de ses hommes. Mais elle était la seule chance d'Idène. Je ne pouvais pas y aller moi même, je devais rester auprès d'Idène pour commencer des soins. Et j'avais également besoin de Joey. Mon seul recourt était Paresok, et je me tournai vers lui, toujours agenouillée près du corps de sa femme.

"Ecoutez, j'ai besoin de la centrale radio du Lieutenant Allen pour contacter un spécialiste en chirurgie. Il me faut son aide pour stabiliser l'état de votre femme, sinon elle sera perdue. Pouvez vous aller chercher cette centrale ? Je dois rester auprès d'elle pour commencer les soins".

Le Meneur ne voulait pas s’en aller, il gardait l’une des mains d’Idène fermement emprisonnée entre ses doigts. Il avait l’impression de tenir la vie vacillante de sa femme par ce simple contact et que la moindre seconde d’absence causerait sa mort. Son regard peiné monta jusqu’à la chirurgienne, il était si perdu que les mots “stabiliser” et “perdue” furent clairement occultés. L’homme s’était attendu à cette éventualité, il en avait parlé avec son Idène un soir d’échange charnel et ils avaient convenu de leurs dernières volontés réciproques. La Candide, amoureuse jusqu’au bout, avait refusé qu’il finisse seul et s’en retourne auprès de Vida.
Mais entre la supposition et vivre le drame, il y avait un énorme gouffre dans lequel Paresok refusait d’y laisser chuter sa femme. Le Meneur dû se faire violence pour conserver un semblant de raison.

« La centrale...la centrale... » Marmonna-t-il d’une voix cassée. « Ne te laisse pas arracher mon aimée. Ton lien m’accroche. Ton lien m’accroche tant ! »

Il embrassa la main inerte d’Idène en y transmettant toute sa passion et son espoir puis il disparu au pas de course. L’homme avait couru jusqu’au lieutenant Allen qui se trouvait en pleine crise. Alors que le Natus partait chercher la centrale radio, je reportai mon attention sur Idène.

"Comment sont ses constantes ?" demandai je à Joey.

« Mauvaises ! » Me confia-t-il. « Je sens à peine son pouls et il n’est pas régulier... »

J’acquiesçai aux paroles du Caporal, avant de sortir un petit trépied portatif que je dépliai pour accrocher les poches de perfusion.

"Préparez une poche de plasma".

« Tout de suite... »

Pendant ce temps, je m’occupai de la mise en place du cathéter, avant de relier celui ci à la poche. Je décidai d’administrer à la jeune femme un calmant pour diminuer la douleur, même si Idène est inconsciente. La souffrance pouvait peut être la réveiller, et ça, je devais l’éviter à tout pris. Et je ne pouvais pas prendre le risque de la sédater tout de suite, alors que le rythme cardiaque était bas. Je devais donc calmer la douleur du mieux que je pouvais, mais la morphine était trop puissant pour l’état de la jeune femme. Heureusement, il existait un calmant alternative, destiné aux personnes allergiques à la morphine, mais qui était moins efficace. Je n’avais pas le choix, et j’attrapai la seringue, avant d’injecter le produit dans la poche plasma pour qu’il aille dans le corps de la Natus par intraveineuse, afin que celle ci reçoive le calmant en continue. Puis, je regardai à nouveau les blessures. Si celle causée par la lance était très grave, celle qui me préoccupait dans l’immédiat était la nuque. Il me fallait l’entraver dans la même position qu’actuellement pour éviter la section de la moelle épinière. Je sortis une minerve, sachant que cette opération allait être très difficile, et qu’il faudrait des gestes minutieux.

"Je vais placer une minerve autour de son cou, mais en gardant sa tête penchée dans la même direction. Vous êtes prêt à soulever délicatement le crâne ?"

« Pas du tout ! » Répondit le Caporal en plaçant délicatement ses mains de chaques cotés du visage de la patiente. Il était tendu, bien conscient que le moindre geste maladroit pourrait rendre la victime paralysée jusqu’à la fin de ses jours. Joey aimait apprendre les premiers soins mais il savait qu’il ferait un piètre chirurgien vu la tremblote qu’il avait.

Il prit une longue inspiration et, comme si cela l’aidait à évacuer la pression, ou que le stress le poussait dans ses retranchements, il avoua avec une simplicité déconcertante :

« Si on la sauve, je veux mon rencard... »

Il acquiesça, restant concentré malgré tout, et attendit mon décompte pour soulever délicatement sa tête. Juste assez pour faire passer la minerve. Je souris aux paroles de Joey qui permirent de détendre un peu l’atmosphère dans cette ambiance très tendue.

"Etes vous entrain de me faire du charme, Caporal ? Je ne serais pas contre un rencard si on réussit".

Le caporal avait échangé un regard très tendu, surement de la timidité qui ne valait plus grand chose dans un tel endroit. Au lieu de lui faire peur, de le rendre fébrile, ça l’avait regonflé et mon accord valait pour lui comme une sacrée motivation.

Une fois prête, je respirai profondément en fermant les yeux quelques instants. Il fallait agir très vite, mais sans gestes brusques. Puis, je regardai le jeune homme. Ses mains étaient en place et il me fixait longuement, sacrément tendu par ce coup de poker.

"Très bien, à trois. Un … deux … trois ..."

Alors que Joey soulevait délicatement la tête, je fis de même avec les épaules, aidant le plus possible à ce que le crâne reste dans le même alignement que le buste. Pendant cette opération, j’osai à peine respirer, vérifiant à la fois mes gestes et ceux du militaire. On aurait cru être deveni des démineurs qui devaient déplacer un explosif extrêmement volatil. Joey tenait une tête légère, et pourtant, une telle précision et intensité de concentration l’avait couvert de sueur. L’homme mobilisait toutes son attention et ses moyens pour garder la tête levée en tentant de réduire le moindre geste, le moindre tremblement, pour s’approcher du zéro absolu.

"Doucement … doucement … voilà … ne bougez plus ..." lançai je presque dans un murmure.

Sans attendre, je glissai péniblement la minerve sous le cou, très délicatement. Puis, une fois que la minerve fut en place, posée sur le sol, je pris une nouvelle aspiration, avant de poursuivre.

"Maintenant, reposez la tête lentement … très lentement … voilà .. doucement ..." dis je à voix basse, comme toute à l’heure, baissant également les épaules en même temps que le crâne.

Joey avait la bouche entrouverte, la langue sur le côté, comme le cliché d’un monteur de maison en bois d’allumettes ou un collectionneur de miniatures. Il s’épongea le front en soufflant bruyamment puis il s’appliqua à reprendre mes consignes. Le moniteur de signes vitaux était déjà sorti, maintenant il écartait les pans de la vareuse de la duelliste pour s’attaquer à sa chemise. Il la découpa avec douceur, n’allant pas à la déchirer comme ces fameux films, ce qui l’aurait fait bouger malgré la présence de la minerve.

Etrangement, l’aide soignant de fortune était soulagé de voir que les Natus portaient des sous-vêtements. Il se sentait très bête de penser à ce genre de choses à un moment pareil mais mettre la poitrine de la patiente à la vue de tous l’aurait gêné.

Sans attendre, il plaça les petites électrodes sans fils, n’hésitant pas à me questionner du regard pour être certain de ne pas se tromper. Il alluma ensuite le moniteur et pâlit immédiatement en examinant les données. Pas besoin d’être médecin pour voir l’oscillateur s’affaiblir de plus en plus, le chiffre se réduire, et le fameux “ALERTE” clignoter en rouge sous les constantes.

« Docteur !!! » fit-il, très tendu. « Docteur, les constantes ! »

Et comme s’il avait dit le phrase de trop, la courbe s’effondra brutalement au moment où le terrible biiiiiiiiiiiiiiiiip s’élevait.

« ARRÊT CARDIAQUE !!!! »

En voyant la courbe s’effondrer, je vérifiai manuellement le pouls, ainsi que la respiration d’Idène. Le coeur ne battait plus, et la Natus ne respirait plus.

"Préparez le défibrillateur !"

Contrairement au Caporal, j’avais l’habitude de ce genre de situation. Aussi, je me montrais plutôt calme, même si à l’intérieur, j’étais tendu. Mais ce ne fut pas la même chose pour mon assistant. Joey se jeta sur mon sac avec trop d’empressement, me boulant quasiment sur le côté, alors qu’il tentait de trouver les palettes de réanimations.

« Désolé, désolé, désolé... » répéta-t-il de manière effrénée en retirant ses mains. Il savait qu’il venait de me faire perdre un temps vraiment précieux et il avait fait machine arrière en gardant les mains levées, attendant les instructions avec un regard écarquillé.

La situation s'aggravait, Idène était entrain de s’enfoncer. Il lui fallait vite le défibrillateur. Mais le Caporal perdit du temps à cause du stress, et me bouscula légèrement dans sa précipitation. Il s’excusa, s’en voulant d’avoir fait ça, mais je ne lui en tins pas rigueur. Il y avait plus urgent. Alors que je préparais Idène pour un massage cardiaque en attendant le défibrillateur, je regardai Joey qui continuait de s’en vouloir.

"Reprenez vous Caporal ! Respirez calmement et apportez moi ce défibrillateur".

Le ton de ma voix était plutôt calme, et non agressif à l’égard de Joey. Mais je n’avais pas le temps de lui parler davantage. Laissant le militaire se reprendre, en espérant que mes paroles le feraient réagir, je posai mes mains à plat sur le sternum d’Idène, entrecroisant les doigts. Puis, penchée au dessus du corps, je commençai à pratiquer le massage cardiaque en attendant que les palettes du défibrillateur soit mises en place.

Joey termina de placer les palettes, et activa l’appareil. Sans attendre, j’arrêtai le massage cardiaque, et je suivis le reste de la procédure pour que le défibrillateur automatique envoie des décharges dans le corps d’Idène pour faire repartir son coeur. Sans la toucher, je vérifiai les constantes sur le moniteur, ainsi qu’une potentielle respiration. J’étais tendue, je fixai la courbe sur le moniteur pour voir si le rythme cardiaque se relançait. Pendant que le défibrillateur faisait son travail, je jetai un oeil à Joey. Il était très tendu, je me devais de le calmer.

"Calmez vous, Caporal. C’est normal de stresser dans ce genre de situation. Mais dites vous qu’Idène a besoin de nous. Elle a besoin de vous. Vous pouvez y arriver, j’en suis sûre. J’ai confiance en vous. Respirez profondément, ça va aller. D’accord ?"

Ce n’était peut être pas le moment de discuter, mais j’avais besoin d’un assistant qui ne craque pas. Et mes paroles calmes avaient pour but d’aider Joey à avoir confiance en lui et à se reprendre pour m’aider à sauver la Natus. Et puis, le défibrillateur était toujours en action. Je continuai de surveiller les constantes de la jeune femme, attendant que le coeur reparte.

Pris dans cette tourmente, Joey avait cessé de parler. Il ne répondait que par la plainte de son souffle, un signe de tête, ou de simples gestes non verbaux. Le soldat avait eu à coeur de rattraper sa bourde, si bien qu’il se concentrait à outrance sur chacune de ses actions pour être sûr de ne pas les foirer.

Etrangement, il ne reprit des couleurs et ne s’anima qu’au moment où le coeur de la patiente reparti. C’est comme s’il venait de reprendre vie en même temps qu’elle. Cette fois, mes mots parvenaient jusqu’à lui et il inspira longuement, trahissant au passage ses tremblements nerveux, avant de souffler tout aussi lentement.

« Navré docteur... » admit-il en secouant la tête. « Ca m’a surpris, c’est la première fois que je vois quelqu’un...qui glisse...comme ça. »

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Skyler McAlister
Médecin Neurochirurgien
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Ven 31 Aoû - 22:09

Skyler McAlister
J’hochai la tête avec un air compatissant.

"Je comprends, ce n’est jamais simple de voir une personne sombrer dans le néant, surtout pour quelqu’un qui n’a pas l’habitude de ce genre de chose. Mais dites vous qu’elle compte sur nous, et que nous ferons tout pour la sauver" lui dis-je avec un petit sourire.

« Nous ferons tout pour la sauver... » Répéta Joey quasiment en même temps que moi. Nous étions sur la même longueur d’onde et il me remercia du regard.

Le Meneur Paresok arriva peu de temps après en courant. Il déposa la centrale radio, le souffle court, et reprit sa place aux cotés de sa femme pour lui tenir de nouveau la main. Son regard se posa sur le trépied et la perfusion, puis sur le moniteur de données et les palettes de réanimations.

« Je ferais tout. Tout ce qu’il faut pour garder sa vie. »

Sa voix était rude et chargée d’assurance. On devinait derrière la panique et la terreur à la simple idée de la voir partir. Il ne s’était pas rendu compte qu’elle avait fait un premier arrêt cardiaque.

Le caporal tenta de rassurer le Meneur en lui posant une main sur l’épaule puis il tourna un regard inquiet vers moi.

« Sa tension a encore descendu docteur... »

Après que Paresok ait posé la centrale radio, je la positionnai non loin de moi. Le Natus était retourné près de sa femme, lui tenant la main, et pour le moment, il n’y avait pas de raison de le faire reculer. Je le laissai aux côtés d’Idène, mais quand il le faudrait, je n’hésiterai pas à le faire reculer pour prodiguer des soins à la jeune Natus sans que quelqu’un interfère dans nos gestes. Utilisant la centrale, je tentai de contacter le Dédale. L’état de santé de ma patiente était entrain de décliner, sa tension chutait, il fallait vite s’occuper de la lance et de la blessure qu’elle causait.

////Dédale, ici le Docteur McAlister, vous me recevez ? Je dois parler en urgence au Docteur Swassons. Dédale ? Quelqu’un m’entend ?////

////McAlister ici Robin, agent de liaison Dédale. Vous n’êtes pas sur la bonne centrale, authentifiez votre appel, à vous ?////

Alors que l’agent de liaison me demandait mon code d’authentification, je fronçai les sourcils. Bon sang, c’était quoi ? Je cherchai dans ma mémoire pendant quelques secondes. Il fallait dire que je l’utilisais très rarement, je n’étais pas du tout habituée.

////Mon code d’identification ? C’est CP3785A////

////Authentifié. Je transmets votre appel, patientez...////

De longues secondes s’écoulèrent, cela semblait interminable.

////McAlister ici Robin, Swasson est au bloc opératoire, j’ai demandé à une infirmière de lui apporter une radio. Je vous mets en liaison, encore un peu d’attente. Termine.////

Une fois encore, de longues secondes s’écoulèrent, voir même presque une minute. On entrait pas comme ça dans un bloc opératoire et il fallait aseptiser les équipements, même la radio. Nerveusement, je pianotai avec mes doigts, tout en surveillant les constantes d’Idène. Même si c’était la procédure, c’était trop long à mon goût, bien que seulement une minute s’était écoulée.

"Allez allez … plus vite" murmurai je pour moi même.

Mais au bout d’un moment qui parut une éternité, j’entendis la vieille voix du chirurgien. Je le reconnaîtrais entre mille à l’intonation, le timbre trahissait une grande expérience et le fait qu’il ne prenait pas de gants quand on l’ennuyait. Ce n’était pas le cas sur cet appel heureusement.

////Je suis content de vous savoir toujours en vie docteur. Ne m’en voulez pas si je vous réponds lentement, je suis en train de replacer un poumon. Que puis-je faire pour vous ?////

////Moi aussi Docteur, ravie de vous savoir encore vivant malgré tous les ennuis que doit rencontrer le Dédale. Je suis désolée de vous déranger en pleine opération, mais j’ai une Natus gravement blessée. Les constantes sont très mauvaises, elle a perdu beaucoup de sang////

Je m’interrompis quelques secondes, avant de reprendre.

////Elle a la nuque brisée, mais je me suis occupée de lui mettre une minerve. Par contre, elle a une lance qui lui transperce l’abdomen. Je pense que son foie est touché, ainsi que les organes autour, mais ce n’est pas du tout mon domaine. J’ai besoin de votre aide pour stabiliser son état afin de pouvoir la transférer sur le Dédale. Sa tension diminue////

////La patiente bénéficie-t-elle d’une perfusion plasma ? Décrivez-moi les contour de la plaie perforée, saigne-t-elle abondament ?////

Après les paroles de Swassons, je commençai à examiner la blessure dévoilée un peu avant par Joey qui avait découpé le vêtement de la jeune femme. Celle ci n’était pas belle à voir, mais heureusement, la jeune femme ne faisait pas d’hémorragie. Du moins, pour le moment.

////Je l’ai déjà mis sous perfusion plasma, mais la poche est presque vide, je vais bientôt la remplacer. Je lui ai également administré un calmant pour diminuer un peu la douleur si jamais la patiente venait à se réveiller, et j’évite de lui donner de la morphine. Concernant la blessure, la lame n’est plus visible, la chair se referme autour de la hampe de bois. Un filet de sang continue de s’écouler, mais ce n’est pas abondant. La présence de la lame doit empêcher l’hémorragie externe////

////Alors, cela signifie qu’il y a une fuite autre part dans son système circulatoire. Recherchez la présence de coloration sous-épidermique qui laisserait présager à une hémorragie interne.////

////Un instant, je regarde ça////

Je regardai lentement chaque centimètre carré de la peau d’Idène, analysant tout le haut du corps sur la partie visible, mais rien. Pas de pigmentation qui laisserait supposer une hémorragie interne.

////Rien à signaler sur la face avant du corps. Je vais regarder en dessous////

////Procédez avec lenteur. Tout mouvement trop brusque pourrait dégrader davantage le pronostic.////

////Bien reçu////

"Caporal, aidez moi à la soulever doucement. Surveillez également l’axe de la tête, au cas où".

« Oui, bien sûr... »

Avec son aide, je soulevai très lentement le corps d’Idène, mais quelque chose m’empêcha d’aller très loin. Comme si la jeune femme était “collée” au sol. Cela ne voulait dire qu’une seule chose : la lance avait transpercé son corps de part en part, et la pointe était fichée dans le sol. Sans essayer de forcer, je me munis d’une petite lampe, et je baissai ma tête jusqu’à la poser par terre pour voir la situation en dessous de la Natus, éclairant la zone. Le sol était couvert de sang, et de ce que je pus voir au niveau de la peau, celle ci avait pris une couleur violacée/bleu foncé. Ce n’était pas bon signe. Avec la même délicatesse, je reposai le corps sur le sol.

////Docteur, la lance a transpercé le corps, la pointe est fichée dans le sol. Il m’est impossible de la retourner, ou même de la soulever suffisamment pour intervenir au niveau du point de sortie. Il y a beaucoup de sang sur le sol, et le dos est visiblement coloré sur une assez grande surface. L’hémorragie interne se situe dans le dos de la patiente////

////Ce n’est pas suffisant, vous ne pourrez pas la stabiliser si vous ne pouvez pas manipuler la patiente. Placez un bandage sur chaque l’orifice de pénétration et doublez la perfusion de plasma. Injectez un hémostatique à action lente.////

////Je m’en occupe////

Sans attendre, je plaçai doucement un bandage au niveau de l’abdomen, faisant attention à ne pas toucher la lance enfoncée dans la chair pour ne pas aggraver la blessure. En même temps, je vis que la perfusion était quasiment vide. Je la désignai d’un signe de tête à Joey.

"Remplacez la poche de plasma, et placez en une deuxième".

« Je procède ! »

Joey fouilla dans mon sac et en retira le nécessaire. Ses gestes et sa façon de faire correspondait bien aux formations d’assistance médicale.
Prenant une seringue contenant un hémostatique, je l’administrai à Idène. Puis, j’en informai swassons.

////Le bandage sur l’abdomen est en place. L’hémostatique est administré. Par contre, je n’ai pas d’accès au point de sortie////

////A présent écoutez-moi. Cette lance doit être raccourcie à son minimum afin que vous puissiez disposer d’une surface d’intervention suffisante. Coupez le manche et la pointe mais ne retirez pas le corps étranger.////


Cpl. Joey Hadison


Joey avait entendu la conversation à travers le combiné et il soutient le regard de Skyler d’un air effaré.

« Comment il veut qu’on découpe ce truc, c’est... »

Skyler secouait légèrement la tête, n’ayant pas de solutions. Elle n’avait hélas pas de quoi découper une telle arme. Certes, elle avait une petite disqueuse médicale, mais pas appropriée dans ce cas là. L’homme secoua négativement la tête et se figea soudainement en ayant une idée. Il avait remarqué les gars du génie sur la zone d'atterrissage et le matériel qu’ils étaient train d’accumuler, des caisses à outils très bien fournies.
Parce que penser à couper le manche d’une lance de guerre et le faire en pratique, c’était vraiment différent. Il ne s’agissait pas de débarquer comme un boeuf avec la bonne vieille scie à bois émoussée. Il fallait du matériel qui allait permettre d’aller chercher aussi loin que sous le dos de la patiente et sans faire d’horrible vibrations qui l’achéveraient à coup sûr.

« J’ai vu des outils sur la ZA. Je peux ramener de quoi faire...si je me dépêche...je serais revenu dans dix minutes... »

Pendant quelques secondes, Joey Hadisson laissa traîner son regard sur le visage de Skyler. Sa tenue et son professionnalisme le rassurait, comme une falaise solide et immuable qui se fichait de la violence des vagues, de la tempête et des orages. Cela le renvoya à son sentimentalisme à son égard quand il avait fait ses stages. A l’origine, il avait espéré tomber sur elle dans la cité. Déjà pour apprendre, dans un premier temps, puisque sa recherche de perfectionnement était sincère. Mais notamment parce qu’il s’intéressait à elle et qu’il voulait la connaître.

La timidité, ça n’aide pas.
Ca bride surtout. Il pouvait voir les pointes d’intérêts des concurrents qui lui parlaient, jouaient de charmes, ou tout simplement s’approchaient avec confiance. Quand lui se trouvait intimement malmené par cette émotion. D’où ce défaitisme de se dire qu’il n’aurait jamais sa chance et qu’il valait mieux abandonner.
Joey avait donc appris en rongeant son frein, en se résignant stupidement, jusqu’à ce que vienne la guerre et cette mêlée horrible qui avait produit tant de morts et de blessés.

Il ne s’était vraiment pas attendu à la voir descendre de cette corde, trouvant dans cette scène une image de femme fatale qui allait jusqu’au plus horrible secteur de guerre pour sauver des vies. Dans tout ce drame humain et la mort omniprésente, le défaitisme et la timidité valait bien peu de choses.
Ca lui avait déjà regonflé le coeur de voir la jeune femme réagir à sa demande, comme une preuve qu’il n’était pas si nul que ça après tout, et il avait à coeur de sauver cette patiente. Pas pour le rencard. Il le voulait, ça le tenait, lui donnait un but d’aspiration rassurante dans cette guerre. Mais au-delà de ça, ce serait une trace, un lien indéfectible qui les uniraient : sauver une vie ensemble, côte à côte.
On ne faisait pas plus motivé que lui.

« Je peux foncer, courir le plus vite possible, et revenir avec de quoi découper cette arme... »

Oui, il était sûr de lui.
Il insistait de son regard pour obtenir son accord. Et aussi surprenant et déplacé que ça pouvait être, arrivé à cette situation, il trouvait la doc encore plus belle penchée sur ce corps.


Skyler McAlister


Je réfléchis aux paroles de Joey. Un outil pour découper la lance ? Cela était tentant. Mais le jeune militaire en avait quand même pour dix minutes. Est ce qu’Idène pourrait tenir tout ce temps ? Mais avais je le choix pour découper l’arme ? Je plongeai mon regard dans le sien. Je ne doutais pas du tout de ses capacités à me ramener cet objet, mais je craignais que l’état de la Natus ne s’aggrave pendant son absence. Un rapide coup d’oeil vers les constantes me permirent de prendre ma décision. Une décision difficile. Je posai à nouveau mon regard sur le militaire, un regard confiant.

"D’accord, allez y Caporal. Mais faites vite ..."

J’eus deux petites secondes de silence, avant de terminer ma phrase.

"S’il vous plaît" dis je sur un ton suppliant, ce qui pourrait encourager Joey à accomplir sa mission au plus vite.

« Je serais pas long ! » S’écria le militaire en réponse.

J’avais bien remarqué le regard de Joey sur moi, mais sur le moment, dans l’action, je n’avais pas eu le temps de penser à ça. Après le départ du jeune homme, je contactai Swassons.

////Docteur, mon assistant est parti cherché une scie de découpage, mais il en a pour une dizaine de minutes. Je n’ai pas d’autres solutions pour découper la lance sans trop aggraver la blessure////

////Vous devez maintenir la patiente pendant ce temps.////

Tout dépendait de moi jusqu’au retour de Joey. Le caporal avait filé à la vitesse de l’éclair. Il n’avait jamais couru aussi vite de sa vie et il avait pris le chemin en sautant par-dessus les blessés, marchant même sur des cadavres, risquant de bousculer quelques collègues au passage. Pendant ce temps, je me retrouvais seule avec la patiente dont les constantes semblaient plutôt stables.

Mais voilà, rien ne se passait jamais comme prévu dans ce métier. Il y avait toujours un problème qui arrivait, puis un autre, et encore un autre pour aggraver le tout. C’était comme ça sur une médecine aussi complexe qui ne correspondait pas à ma spécialité.

Mon regard s’était perdu sur les phalanges d’Idène et je remarquais soudainement une coloration qui ne s’y trouvait pas au début, juste sur le bout de ses doigts. Ce n’était pas normal et je découvrais exactement la même chose sur la main que tenait son compagnon. Puis, soudain, c’est son visage qui se mit brutalement à bleuir. D’abords ses lèvres puis ses joues et son visage entier.
Quelque chose clochait et c’était très urgent.

"Reculez !" lançai je à Paresok, qui finit par reculer un peu, à contre coeur.

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Skyler McAlister
Médecin Neurochirurgien
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Ven 31 Aoû - 22:12

Skyler McAlister
Le meneur avait embrassé une dernière fois la main de sa femme et avait laissé une bonne distance pour que je puisse faire mon travail. Lui et Sheppard étaient amis, ça se savait partout. Il devait savoir comment on procédait et respectait le fait qu’il me fallait de la place pour la sauver.

Je vérifiai aussitôt la respiration d’Idène, mais il y avait bien un souffle. Certes, assez faible, mais la jeune femme respirait quand même. La coloration de l’épiderme avait une autre origine.

////Docteur ? La patiente fait une cyanose. Elle a les doigts et le visage bleus. Pourtant, elle respire, même si c’est faiblement////

////Vous devez trouver rapidement la cause de cette asphyxie. Si elle respire, le problème ne vient pas des poumons. Recherchez les causes associées.////

Je commençai à examiner le corps d’Idène pour chercher l’origine de ce problème, mais rien ne me sauta aux yeux. Du moins, pas d’un point de vue extérieur. Cela se passerait-il à l’intérieur ? La cyanose était dûe à une diminution drastique de l’oxygène dans le sang, mais pourtant, la jeune femme respirait. Qu’est ce qui pouvait empêcher les organes d’avoir un apport suffisant en oxygène à part la respiration ? Après un court instant de réflexion, je compris qu’il s’agissait de l’hémostatique. Le sang étant beaucoup moins fluide, il ne s’écoulait pas suffisamment dans les veines pour oxygéner les organes. Ce qui devait empêcher les hémorragies était en train de la tuer, car des caillots pouvaient rapidement se former et monter jusqu’au cerveau ou au coeur.

////C’est l’hémostatique qui provoque la cyanose. Des caillots sont entrain de se former. Je dois lui administrer de l’anticoagulant pour éviter ça, je n’ai pas le choix////

////Procédez. Vous n’avez effectivement pas d’autres solutions.////

Sans attendre, je pris une seringue dans mon sac, et administrai à la Natus un anticoagulant pour fluidifier le sang. Cela n’allait plus tout empêcher Idène de faire une hémorragie, et le sang s’écoulerait plus vite de sa blessure dans le dos. Mais au moins, j’évitais qu’un caillot de la tue sur le champ. En attendant que l’anticoagulant fasse effet, je mis la jeune Natus sous respirateur artificiel, afin de l’aider à respirer correctement, ce qui améliorerait grandement son état. La couleur bleutée de son visage et de ses doigts commença à disparaître.

////Anticoagulant administré, la cyanose commence à passer. J’ai placé la patiente sous respirateur artificiel////

Pourtant, je n’étais pas au bout de mes peines. Je vis alors l’abdomen de la jeune femme gonfler autour de la blessure. Quelque chose semblait vouloir sortir, et en y regardant de plus près, j’aperçus des entrailles qui poussaient contre la blessure et qui commençaient à sortir lentement. Quelque chose d’autre se passait à l’intérieur du corps d’Idène, et si je ne faisais rien, ses boyaux allaient bientôt se déverser devant moi, hors de son ventre.

////Il y a un problème, j’aperçois les entrailles qui commencent à sortir par la blessure provoquée par la lance////

////Les muscles de la patiente sont-ils soumis à une contraction ?////

////L’abdomen est gonflé, surtout sur les bords de la blessure////

////Palpez sans forcer. Avez-vous l’impression de toucher un ballon d’air ?////

Je m’exécutai, appuyant légèrement à différents endroits autour de la blessure.

////Affirmatif////

////Les gazs intestinaux se sont infiltrés dans son abdomen pour produire une pression sous-dermique. Si on ne traite pas ça rapidement, une éviscération va se produire et achever la patiente. Connaissez-vous les principes d’évacuation par seringue ?////

Je réfléchissais quelques instants en regardant autour de moi, cherchant des yeux une seringue. Je vis alors celle de l’anticoagulant, et j’acquiesçai d’un hochement de tête.

////Il me semble qu’il faut piquer la partie gonflée avec la seringue, puis retirer le piston pour que le gaz s’échappe en continue hors du corps, c’est bien ça ?////

////Je confirme. Veillez à lier cette évacuation de sparadrap pour qu’elle ne tombe pas. Faites une dernière palpation pour vérification...L’aspect “ballon” devrait avoir disparu.////

////Bien reçu////

Je cherchai une seringue stérile, puis après avoir nettoyé la zone gonflée de l’abdomen, j’insérai l’aiguille de la seringue à travers la peau. Je retirai ensuite le piston, avant de fixer le tube avec du sparadrap pour qu’il reste en place. Le gaz devait normalement s’évacuer. Je palpai à nouveau l’abdomen, avant de soupirer de soulagement en sentant la pression diminuer sous mes doigts.

////Ca fonctionne, la pression dans l’abdomen diminue////

////Bravo docteur. Une éviscération condamnerait votre patiente. Maintenant, veillez à repousser les intestins dans leur logement et replacer le bord de la plaie contre le corps étranger pour réduire la perte de sang. Contrôlez les variables et vérifiez la diffusion de plasma.////

J’exécutai aussitôt les instructions de Swassons, et très lentement, avec mon doigt, j’appuyai sur les intestins pour le replacer à l'intérieur de l’abdomen. Peu ragoutant me direz vous. Mais, j’en avais vu d’autres avec les cerveaux. Puis, j’exerçai un pression sur les bords de la blessure pour la fermer au maximum, et ainsi éviter au sang de trop couler. Un coup d’oeil sur les constantes d’Idène, ainsi que les deux poches de plasma me confirmèrent que l’état de santé de la Natus s’était stabilisé pour le moment.

////J’ai fini, son état de santé est stable pour l’instant. Mon assistant ne devrait pas tarder à revenir////

////Vous ne pouvez plus rien faire si ce n’est surveiller ses constantes. Recontactez-moi dès que vous avez terminé la découpe.////

////Bien reçu, je vous recontacte////

Je finis par soupirer en me laissant aller. La tension qui m’avait envahi s’envola un peu, la fatigue se faisait ressentir malgré l’absorption de la potion de renfort. Peut être s’atténuait-elle. Mes muscles et mes membres crispés étaient raidis. Un repos bien mérité serait le bienvenu, mais je savais que ce n’était pas pour tout de suite. En attendant le retour de Joey, je retirai mes gants souillés pour en enfiler de nouveaux, tout en continuant de surveiller les constantes d’Idène.


Cpl. Joey Hadison


Joey courait à en perdre haleine. Il avait promis qu’il ne serait pas long mais, à la vérité, la course et lui n’avait jamais fait la paire. Si on pouvait s’attendre d’un militaire de faire son marathon sans sourciller et y ajouter ses abdos et ses tractions, ce n’était pas le cas du caporal qui n’avait jamais brillé à ce sujet. Qu’il s’agisse de ses classes ou des entraînements, on le trouvait régulièrement sur l’arrière du peloton. Non pas par fainéantise ou manque d’exercice. Mais tout simplement parce qu’il n’excellait pas physiquement.

Sur son dossier d’admission et ses états de service, il s’était toujours trouvé être dans la moyenne, en bon soldat, répondant à ce qu’on attendait de lui. Mais pas plus. Son admission tenait de son expérience sur des théâtres de guerre et d’une bonne stabilité psychologique. Chez ses voisins, il y en avait toujours un pour savoir monter à la corde dix fois d’affilés. Ou un autre qui tirait, le flingue à la ceinture, et touchait en plein milieu. Ou encore d’autres qui se faisaient les moines Shaolin du self défense militaire.
En règle générale, ces types là associait à leurs savoir une assurance sans faille, un aplomb et une confiance en soi qui faisait tomber toute les minettes du coin.
Il les entendait parler de leur conquête au mess, les moins sérieux vantant le nombre de femmes qu’ils alignaient, ou qu’ils cumulaient le même soir, et les autres qui se lançaient dans des histoires plus sincères mais toujours dangereuses. Les tromperies, ou des liaisons entre militaires, ou encore de la concurrence à la chasse aux toubibs comme Taylor Laurence.

Joey n’avait jamais rien eu de tout ça et c’est ce qui entretenait en partie sa timidité. Pas d’aventures depuis son arrivée sur la cité, aucune histoire à raconter aux copains. Si ce n’est une succession de maladresses et de déconvenues. Même s’il savait qu’il ne se vanterait pas comme eux. Et pour les spécialités, il n’avait pu que tenter cette formation médicale.

Il ne savait pas pourquoi il pensait à ça maintenant.
Peut-être parce que, au fil de ses pas rapides qui martelaient le sol, il se faisait un examen rapide de sa vie et qu’il sentait que quelque chose avait changé. Il avait fallu une guerre pour qu’il balance aussi sec à sa toubib “J’veux mon rencard”. Sans prendre de gants, sans amener le sujet, sans même chercher plus loin s’il l’obtiendrait ou non. Une guerre pour passer outre la timidité et la réalité que son existence n’était pas aussi épanouie que ses amis et collègues.
Mais d’un autre côté, Joey ne se faisait pas d’illusions. Il connaissait personnellement quatre militaires qui se tiraient la bourre pour être le premier à la mettre dans leur lit. Et voilà le défaitisme qui revenait en premier plan. Ils étaient plus tentant que lui…

Heureusement, l’urgence de la situation l’empêchait de ressasser. C’était le seul avantage qu’il trouvait à la situation misérable de cette pauvre duelliste. Joey s’entendait avoir la respiration sifflante, bruyante. Il claquait le sol d’un pas toujours plus lourd alors qu’il balançait ses jambes, sautant reliefs et cadavres, en dévorant ce qu’il restait de chemin. Il était près, si près du but.

Dans un monde magnifique et poétique, on l’aurait vu émerger de l’accès sur cette course d’un mouvement purement charismatique, bien droit, l’allure impeccable, et s’arrêter devant la doc pour lui donner les affaires. Mais dans le monde réel, Joey était plié en deux par un point de côté quand il atteignit l’usine de triage. Il soufflait comme un buffle, le visage inondé de sa propre sueur, les yeux presque fermé tant ça lui piquait. Et à une dizaine de mètres de son objectif, il s’étala lamentablement sur un tas de cadavre.

« Voilà...voilà... » Parvint-il à peine à articuler. « J’ai...obtenu...du... »

Il en avait mal à la poitrine tant son coeur martelait à tout rompre.
Le caporal se passa toute la longueur de son avant bras sur le visage, s’inondant la peau de cette invasion de sueur, puis souffla un bon coup avant de désigner le sac qu’il déposait à côté de la patiente.

« Le génie m’a donné...des outils appropriés...je peux commencer. »

Hadison sortit un câble métallique très particulier, vrillé sur lui-même, dont les contours étaient des plus tranchant. Il passa la main sous le dos de la patiente avec l’aide du docteur et fit le tour pour que le câble accroche la partie basse de la lance. Il s’empara ensuite de l’outil mécanique branché sur une batterie intégrée. Comme pour le branchement d’une disqueuse, il entoura le câble dans le logement prévu à cet effet et utilisa une clé qui scella les deux extrémités.
C’était une tronçonneuse électrique à bande, conçu pour découper sur des endroits très restreint.
L’homme attendit le signal de Skyler avant de commencer. Son visage continuait de goûter à grandes eaux et ses mains glissaient sur la partie en plastique.

« À votre...signal...docteur ? »


Skyler McAlister


Tandis que je surveillai l’état de santé d’Idène, le temps passa. Puis, Joey revint enfin, à bout de forces, s’étalant même de tout son long sur le sol. J’avais profité de ces quelques minutes de répit pour me reposer un peu, mais ce n’était pas le cas du militaire qui n’en pouvait plus. Il avait trouvé un appareil ressemblant à une sorte de tronçonneuse, et il commença à monter la machine, avant de se mettre en position pour découper la partie de la lance qui était fichée dans le sol. Cependant, j’hésitai à le laisser faire cette manoeuvre périlleuse. Joey était fatigué, et je craignis que ses mains moites ne glissent sur l’appareil, ce qui pourrait avoir de graves conséquences pour la Natus.

"Attendez Caporal. Vous êtes épuisé, vous n’êtes pas en état de mener cette tâche difficile. Je vais m’en occuper"

Je pris la place de Joey, prenant l’appareil en main, tout en m’allongeant pour pouvoir correctement faire ce travail. Cependant, je ne comptais pas laisser le militaire en plan, j’avais besoin de lui.

"Soulevez un peu le corps de la patiente pour me laisser accès à la base de la lance, et maintenez la fermement pour l’empêcher de retomber et de bouger pendant la découpe".

J’attendis que mon assistant s’exécute, me permettant ainsi d’avoir quelques centimètres à peine pour voir où je devais découper. Cependant, cela n’était pas suffisant pour effectuer cette tâche le plus efficacement possible. Je regardai alors Paresok, tout en désignant la petite lampe torche qui se trouvait sur le sol, non loin de moi.

"Pouvez-vous m’aider ? Prenez cette lampe, venez à côté de moi, et éclairez toute cette zone" lui dis-je en lui montrant l’espace entre le dos d’Idène et le sol.

Une fois que la zone fut éclairée, je pris une profonde inspiration, avant de placer la lame tout près de la lance. Je n’avais pas le droit à l’erreur, car si je faisais un écart, l’appareil toucherait soit le sol, soit Idène. Je respirai le plus calmement possible, tenant comme je le pouvais la machine qui était quand même assez lourde pour sa taille. Puis, je l’allumai, et commençai à découper la partie métalique de la lance. J’avançai le plus doucement possible, ne voulant pas brusquer mes gestes. J’espérai ne pas provoquer beaucoup de vibration, d’où la raison de ma lente avancée, reculant de temps en temps pour respirer un peu, avant de poursuivre mon travail.


Cpl. Joey Hadison


Joey laissa sa place avec plaisir. Il était même plus rassuré de savoir que l’opération de découpe se ferait sous les mains expertes de la chirurgienne. Lorsqu’elle donna ses consignes, l’homme n’hésita pas à enjamber la patiente pour avoir un bon appui et une très bonne accroche sur la partie à lever.

Paresok, le pauvre homme qui demeurait en retrait, misérable spectateur impuissant, fût encore plus réactif en récupérant la lampe. Il la malmena entre ses mains tremblantes pour trouver le moyen de l’activer puis pointa le faisceau en direction de sa femme. Il en pleurait silencieusement, pratiquement persuadé qu’elle s’en sortirait pas tant il y avait de sang.

C’était un massacre et le Natus se pensait littéralement abandonné de ses Dieux. Il ne cessait de se demander pourquoi, pourquoi maintenant, pourquoi comme ça. Pourquoi pas plus tard, encore plus tard, pour lui laisser une chance de lui dire combien il l’aimait.

L’homme ne pouvait que suivre bêtement les consignes, bien conscient que toutes ses envies d’intervention sur la belle Natus ne ferait que gêner les soignants et aggraver l’état de la patiente. Il en avait déjà parlé une fois avec John, il lui avait toujours dit de se laisser faire (ou de laisser faire) dans le cas où un médecin chercherait à soigner.

Les premières secondes de découpe furent véritablement catastrophique. La vibration du fil de découpe agita l’autre extrémité de l’arme, donc son manche, en produisant un déplacement qui fit céder la pression. Un énorme filet de sang fût emporté par le mouvement de rotation et éclaboussa la figure de Skyler tout en envahissant ses mains.

« MERDE !!! » S’écria le caporal en se séparant d’une main de ses mains pour retenir le manche.

Cette fois, le sang cessa de jaillir avec l'immobilité de l’arme. Mais le soldat serra les dents, à présent contorsionné entre la prise du manche sur lequel il ne pouvait certainement pas s’appuyer et son autre main, qui enserrait le col de la tenue de la Natus, pour la faire pivoter dans le bon angle.

La machine fit un bon travail. La limite entre la lame et le bois fût sectionné en libérant la patiente et permettant de la décaler en posture latérale de sécurité, ce qui allait largement faciliter le travail. Quand Paresok vit le trou béant, comblé par le bois, sur le dos de sa femme, il ne put s’empêcher d’y plaquer la main dans une expression de chagrin, espérant réduire l’écoulement de sang qui se distinguait à vue d’oeil.

Joey maintenant le reste du manche pour que la chirurgienne puisse réinstaller l’appareil et effectuer une nouvelle découpe. Prévenu du risque de vibration ce coup-là, il enjamba une nouvelle fois la victime pour pouvoir tenir les deux bords du manche, ses pieds se calant bien serré contre le dos et le torse d’Idène pour éviter sa chute. Enfin, l’arme fût découpée des deux côtés et le caporal poussa un profond soupir. Il chassa d’un coup de pied les deux morceaux comme s’ils risquaient encore de la blesser à distance puis il fouilla dans le sac de Skyler afin de récupérer de la gaze et des bandages en plus.

Le Meneur ne cessait de répéter des « Non...non... » effaré en constatant l’afflux de sang fuitant d’entre ses doigts. Contrairement à lui, Skyler remarqua la présence de plasma parmi l’hémorragie, signe que sa patiente atteignait un niveau affreusement bas. Le plasma était très utile mais il ne pouvait pas remplacer à lui seul les fluides du système vasculaire.

« Perte de sang minime sur l’avant du corps, docteur. » Confirma Joey en terminant d’ajouter les bandes.

Puis, soudainement, un bip continu leur perça les tympans. Idène venait de faire un nouvel arrêt cardiaque.

« Elle perd sa vie...elle perd sa vie trop vite. » S’écria Paresok en étreignant soudainement sa femme.

« Non...je t’en prie, par tous les Dieux, ne me laisse pas seul ! Bats-toi ma femme ! Bats-toi ! »

« Natus ! Écartez-vous si vous voulez la voir vivre. L CHEZ-LA BORDEL !!! »

Joey fit reculer le Meneur plus loin afin de laisser le champ libre à Skyler. Les deux hommes s’écartèrent puis, conscient qu’il serait vraiment un frein à la longue, il prit la décision de demander à ses Natus de ne plus le laisser approcher, d’essayer de l’occuper du mieux possible. L’homme, pourtant si fort et d’une telle prestance, s’était littéralement effondré. Ramassé sur lui, il priait et priait encore, se refusant à la mort d’Idène.
Dès que Joey fut certain que Paresok ne les gênerait pas de nouveau, il redescendit auprès de Skyler. Elle était parvenue à refaire partir le coeur en y plantant une seringue d’épinéphrine. Les palettes n’étant plus assez efficace, la toubib venait griller son dernier joker. La vie de la patiente ne tenait plus qu’à un fil.

« Docteur... » Lâcha Joey d’une voix blanche.

Elle était encore en train d’assurer la survie de la patiente mais il fallait qu’elle voit ça. C’était urgent, vraiment urgent. Ce qui fit passer Joey sur un plan plus personnel.

« Skyler, regarde ! »

D’une main encore un peu tremblante, il lui montra l’entrejambe de la Natus. Son pantalon d’uniforme bleu ciel était devenu entièrement sombre à hauteur de son intimité. Comme un tissu tellement imbibé que le liquide fuitait au travers au goutte à goutte. Le sang se mettait à ressortir de ce côté de son corps...et c’était pareil derrière...

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Skyler McAlister
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Ven 31 Aoû - 22:15

Skyler McAlister
Skyler McAlister


Tout s’enchaina très rapidement, et le résultat ne fut pas du tout celui escompté. Les choses empirèrent malgré mon envie de bien faire. Après avoir découpé la lance pour libérer le corps d’Idène, et pouvoir la soigner plus facilement de ses graves blessures, son coeur s’arrêta. Je m’empressai d’activer le défibrillateur, mais en vain. Le coeur ne repartit pas, la machine n’était plus suffisante. Il fallait agir et vite. Pas le temps de m’occuper de la plaie béante dans le dos de la jeune femme, j’attrapai une seringue d’épinéphrine, et la plantai directement dans son coeur. J’espérai sincérement que le rythme cardiaque revienne, c’était ma dernière carte. Pendant cette attente, je remarquai que le sang qui s’écoulait du dos de ma patiente était le plasma. Il n’y avait plus assez de sang dans son corps, ce n’était pas bon du tout. Heureusement, le coeur repartit, et je m’empressai de vérifier les constantes de la Natus, tout en replaçant une nouvelle perfusion de plasma, remplaçant une poche presque vide, bien que je savais que cela commençait à devenir inutile. L’état de santé d’Idène se dégradait de plus en plus, j’étais entrain de la perdre. Et je m’y refusais.

"Allez Idène, accrochez vous".

Certes, cela ne servait à rien. Mais je ne pouvais pas m’en empêcher. Idène tenait bon comme elle pouvait, et alors que je me préparais à prendre mon matériel pour suturer la plaie dans son dos, la voix de Joey attira mon attention sur lui. Certes, ce dernier venait de m’appeler par mon prénom et me tutoyer, mais dans l’action, je ne lui en tins pas rigueur. J’étais plutôt préoccupée par ce qu’il voulait me montrer. Quelque chose qui me glaça le sang en voyant ce dont il s’agissait. Le pantalon de la Natus au niveau de l’entre jambe était tâché de rouge. Derrière aussi. La jeune femme faisait une hémorragie interne, probablement causée par le découpage de la lance, et les vibrations que cela avait causé. Une hémorragie située au niveau de ses organes internes me rendait complètement impuissante, et je contactai aussitôt la seule personne qui pouvait m’aider. Du moins, je l’espérais, même si mes espoirs de sauver Idène diminuaient rapidement après cette nouvelle épreuve.

////Docteur Swassons !!! Elle fait une hémorragie interne ! J’ai découpé la lance de chaque côté, mais son coeur a lâché pour la seconde fois. Je lui ai administré de l’épinéphrine, et maintenant, une hémorragie interne s’est déclarée, le sang s’écoule par ses orifices inférieurs !////

Je regardai Joey, ignorant quoi faire, inquiète pour ma patiente. Pour la première fois depuis la prise en charge d’Idène, le jeune militaire pouvait voir que j’étais perdue, moi qui était si sûre de moi et concentrée depuis le début. Mais une mauvaise décision pouvait facilement ébranler quelqu’un, même moi. Et sans aide dans un domaine que je ne connaissais que trop mal, j’étais tout simplement perdue en voyant que les choses m’échappaient. Je me sentais complètement impuissante et désarmée.


Cpl. Joey Hadison


« Docteur... »

Joey fit une grimace intimidée.
Ca l’affectait de voir la jeune femme dans cet état. Sa crainte était tout à fait légitime, lui aurait paniqué depuis bien longtemps si elle n’avait pas été là. Mais la voir dans cette position d’impuissance et lire cette émotion en elle, dans son regard, lui rappelait combien elle était humaine et faillible. Le corps d’Idène tombait en miettes entre ses mains et le docteur Swassons ne lui avait pas encore répondu, surement parce qu’il avait ses propres complications de son côté.

En tant que médecin, peut-être qu’elle n’avait pas le droit de montrer ses doutes, d’être aussi immuable qu’elle l’était lorsqu’elle lui avait demandé de se reprendre. La jeune femme se montrait comme un symbole d’ordre et de stabilité dans une situation qui se noyait dans le chaos. Mais là, elle avait subi des revers qui mettaient ses compétences en échecs. Il n’y avait rien de pire que de devoir composer sur un domaine qu’on ne maîtrisait pas du tout.

Seulement, McAlister était la seule chance de survie d’Idène. Les médecins compétents sur ce type de blessures se trouvaient plusieurs kilomètres au-dessus de leurs têtes, les mains dans les tripes, à sauver une autre victime. Joey avait le coeur qui battait à tout rompre, il avait envie de faire quelque chose, de trouver les mots qui débloqueraient la situation. N’était-ce pas comme ça que ça se réglait dans les films ? Une parole bien épique et, hop, c’est reparti. La victime survit et tout est bien, qui finit bien ?

Seulement, le caporal avec sa timidité effacée par l’urgence de la situation se refusait à rester stoïque, les bras ballants, en attendant simplement que le médecin se reprenne. Elle était la seule à pouvoir sauver cette vie, il ne fallait pas chercher plus loin.

« Docteur...vous allez y arriver. » insista doucement Joey. « Je suis pas le meilleur pour ça miss. Mais vous avez cravaché des années. Ce sacrifice de temps pour vos études, ces foutues nuits blanches pour les examens. Les longs mois d’internats... »

Il s’approcha de la jeune femme pour lui presser le bras.

« C’est pas votre spécialité, je sais... »

Joey fixa la patiente.

« Parler comme ça, c’est pas la mienne non plus. Mais je suis sûr que vous avez les connaissances pour aider cette Natus. On peut pas la laisser mourir, elle...elle est jeune...et c’est injuste... »

C’était tout. Hadison sentait qu’il en avait déjà trop dit.
Les longs discours, ce n’était certainement pas à faire aux pieds d’une mourante qui se vidait littéralement de son sang. Enfin, la centrale radio finit par grésiller puis la voix de Swasson apparut. Joey relâcha le bras de la jeune femme, piquant soudainement un phare, puis il se recula un peu, gardant malgré tout une oreille à ce qui se disait.

////Navré pour cet interruption, docteur. Vos détails indiquent une complication lors du traitement du corps étranger. Vous allez devoir procéder à une opération chirurgicale d’urgence à des fins de stabilisation.////

Le caporal écarquilla les yeux mais fut réactif. Il se pencha sur le sac médical pour en sortir les outils de chirurgie et les placer sur une desserte. L’homme ne savait même pas à quoi servaient certaines pinces aux formes inhabituelles.

////Pour commencer, appliquez les procédures de décontamination en terrain hostile. Perfusez ensuite la patiente de numérations sanguine adaptées tout en maintenant la diffusion de plasma.////

Là encore, le militaire se raidit.
Il leva le regard pour rencontrer celui de la jeune femme, conscient qu’il n’y avait pas la moindre poche de sang dans le sac médical. Skyler savait que ces rares ressources se conservaient au frais pour éviter toute dégradation. Il faudrait refaire un aller et retour à l’antenne de secours, ce qui était tout à fait impossible. Idène n’y survivrait pas cette fois.
Le caporal farfouilla dans sa mémoire, de ce qu’il avait entendu lors de ses cours, et il se rappelait avoir regretté d’avoir donné son groupe sanguin pendant la présentation des stagiaires. La formatrice l’avait félicité d’être un donneur universel et qu’il serait des plus utiles en cas de coup durs sur le terrain.

Si Joey l’avait regretté, c’est parce qu’il était devenu l’espace d’un instant la coqueluche du groupe et qu’il aurait préféré attirer l’attention d’une neurochirurgienne avec ce trait, plutôt qu’une formatrice boiteuse de cinquante ans.
L’anecdote lui vint comme une évidence. Elle lui claqua à la figure comme l’unique solution pour poursuivre le bras de fer entre la mort et la vie. Le jeune homme déglutit puis annonça, sans vraiment savoir si McAlister allait l’entendre avec la centrale :

« Je suis O rhésus négatif...je...je suis une poche de transfusion géante... »


Skyler McAlister


Je commençai à perdre mes moyens suite à cette situation catastrophique et inquiétante. Ma bulle protectrice cédait lentement, je devenais désespérée par ce qui se passait. Mais, heureusement pour moi, je n’étais pas seule. Joey était là. Et alors que toute à l’heure, c’était moi qui le rassurait sur les actes qu’il pouvait réaliser, cette fois ci, ce fut à son tour de me réconforter et de m’aider à retrouver du courage. Je plongeai mon regard dans le sien, le voyant mal à l’aise. J’eus même l’impression qu’il rougissait un peu. Mais ses yeux étaient déterminés. Le militaire eut des paroles réconfortantes pour moi, qui me permirent peu à peu de me reprendre, et je hochai la tête à ces mots, en respirant le plus profondément possible pour calmer cette incertitude et cette impuissance à sauver Idène. Joey avait raison, je devais me ressaisir pour la Natus. Sans moi, elle n’avait hélas aucune chance. Elle serait même morte depuis longtemps. Je secouai la tête, reprenant enfin le contrôle de moi même, redevenant à la fois sérieuse et professionnelle.

"Merci Joey" dis je le plus naturellement du monde, sans être choquée de l’avoir appelé par son prénom.

A ce moment là, la voix du Docteur Swassons se fit entendre, s’excusant pour ce long silence. Je ne pouvais pas lui en vouloir, l’homme était également occupé à sauver des vies, tout comme moi. J’écoutai attentivement les directives de mon confrère, pendant que de son côté, le Caporal préparait tout le matériel nécessaire pour pratiquer une opération chirurgicale d’urgence. Mais, lorsqu’il mentionna les poches de sang, mon regard se figea, fixant Joey qui eut alors la même pensée que moi. Une horrible réalité.

"Du sang ? On n’a pas de poche de sang à disposition".

Le sort s’acharnait contre nous, qu’allions nous faire ? Il nous fallait du sang, mais celui ci était à l’antenne médicale, dans des conteneurs réfrigérants pour le préserver. Et l’antenne était loin. Même si Joey y allait en courant, comme pour quelques instants auparavant, Idène ne tiendrait pas cette fois ci. Alors, que faire ? Décidément, la mort voulait vraiment prendre la Natus, et j’ignorais si je pouvais l’en empêcher, avec cette nouvelle donnée. Cependant, la mort devrait attendre encore un peu, car le militaire m’annonça alors qu’il était donneur universel. Une chance incroyable. Je n’osai y croire, mais après avoir vérifié sa plaque, je ne pus que constater ce fait. J’eus un soupir de soulagement que je ne parvins pas à retenir, cette nouvelle était bénie en ce moment.

"D’accord … d’accord .. on va faire comme ça. Mettez en place une nouvelle poche de plasma pendant que je prépare le matériel de perfusion sanguine".

Je laissai Joey faire, tandis que j’attrapai le nécessaire dans mon sac à dos. En temps normal, il fallait traiter le sang avant de le réinjecter, mais en cet instant, il n’y avait pas de temps à perdre. Il faudrait alors prélever le sang du militaire et l’injecter directement dans le corps d’Idène. Alors que le jeune homme terminait sa tâche, et relevait la manche de son haut, j’attrapai rapidement un morceau de papier ainsi qu’un stylo, écrivant les renseignements correspondant aux poches de sang adéquat, avant de tendre le papier à Paresok.

"S’il vous plaît, allez le plus vite possible à l’antenne médicale pour me ramener quatre poches de sang. Donnez ce papier à une infirmière, elle saura quoi vous donner".

Alors que Paresok s’en allait, je m’occupai de Joey, cherchant d’abord une veine, avant de désinfecter la zone. Puis, je plaçai un garrot, pris une aiguille, que j’enfonçai doucement dans la peau sans me soucier si le jeune homme craignait les piqûres. En temps normal, j’aurais discuté avec lui pour le rassurer, mais là il y avait urgence. Je mis en place un cathéter.

"Je vous ai fait mal ?" demandais je, soucieuse du bien être de mes patients, même en temps de guerre.

« C’était une caresse. » Fît Joey pour essayer de me détendre.

J’eus un petit sourire à ses paroles, puis je reliai le cathéter à un tube transparent directement vers le cathéter d’Idène, tandis que le sang commençait déjà à circuler d’un corps à l’autre. Je retirai aussitôt le garrot, avant d’avoir un petit sourire crispé.

"J’espère que vous n’avez pas de maladie qui pourrait la contaminer, Caporal".

C’était plus une plaisanterie qu’autre chose, car même si Joey m’annonçait qu’il avait un virus ou une infection capable d’affaiblir les défenses immunitaires d’Idène, je n’avais hélas pas d’autre choix. Privée de ce sang, elle allait mourir. Mais, il fallait quand même que je sache s’il y avait le moindre risque pour plus tard. Il écarquilla soudainement les yeux, se demandant si c’était une blague ou non, puis il balbutia, rouge comme une tomate :

« Vous êtes en train de me demander si j’ai une...une... »

Il regarda autour de lui.

« Une MST ? »

Je voyais bien que ma question le mettait mal à l’aise, et j’agrandis mon sourire pour essayer de le détendre, ne voulant pas qu’il se sente jugé.

"Je ne vous juge pas, Joey, ne vous inquiétez pas. C’est une question obligatoire pour les dons du sang. Certaines maladies, virus, infection ou bactérie peuvent être dangereuses pour les patients, voir fatales".

« Hum...je...enfin, je...les... »

L’homme était encore plus tendu, à croire qu’il se sentait contraint de me déballer son carnet de santé devant la patiente. Il respira un bon coup, se voulant adulte, conscient que j’était médecin et il reprit d’un ton presque brutal :

« Les mycoses au...hum...ça compte ? »

Je regardai Joey avec de grands yeux ronds, à la fois surprise par son aveu, mais également par son comportement de grand timide qui avait peur d’annoncer ce genre de chose à un médecin, comme un enfant. Aussitôt, malgré le côté dramatique de la situation avec cette opération qui se préparait pour sauver une personne mourante, je souris sincèrement au militaire.

"Ne vous en faites pas, Caporal, je ne dirais rien à personne, secret professionnel. Ca se soigne très bien, et Idène ne risque rien. Etes vous rassuré ?"

« Pas du tout, je voulais pas que vous le sachiez. » Confia Joey avec un sourire complètement cassé. Il cessa un peu de rougir, maintenant que c’était fait et trop tard, puis il mit un coup de menton en direction d’Idène. « Allons-y... »

Je gardai mon sourire encore quelques instants, observant la timidité de Joey. Puis, je redevins sérieuse. J’espérai que Paresok ne mette pas trop de temps, je ne voulais pas que le militaire s’affaiblisse en donnant son sang. Une fois la perfusion de fortune mise en place, je me plaçai de l’autre côté de ma patiente, retirant l’ensemble de son haut pour dévoiler son abdomen. Puis, j’appliquai une solution nettoyante et stérilisante sur l’ensemble du ventre, car j’ignorais où je devais opérer. Je vérifiai également que tous les instruments étaient propres et stérilisés. Voyant mes gants couverts de sang, je m’empressai de les retirer, avant de sortir de mon sac de l’équipement stériles, comme des masques, des charlottes et de nouveaux gants. Je nettoyai consciencieusement mes mains avec une lotion désinfectante, le militaire fit de même. J’aidai Joey à enfiler ces nouvelles affaires, avant de faire de même pour moi, afin d’éviter au maximum de transmettre quoi que ce soit à la patiente. Puis, accroupie aux côtés d’Idène, tandis que Joey s’était rapproché suffisamment de la desserte pour me donner les différents instruments nécessaires, je pris une profonde inspiration.

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Skyler McAlister
Médecin Neurochirurgien
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Ven 31 Aoû - 22:18

Skyler McAlister
////Voilà, je suis prête pour l’opération. Quelqu’un est parti chercher des poches de sang à l’antenne médicale, mais en attendant, je n’ai pas eu d’autre choix que de prendre le sang de mon assistant. Il est donneur universel. J’ai nettoyé et désinfecté l’ensemble de l’abdomen et des instruments chirurgicaux. Où dois je procéder l’incision ?////

////Si vous appliquez une perfusion directe, veillez à injecter une solution de pénicilline à votre assistant. Les complications liées à une transfusion non traitée seront réduites. Procédez et rendez compte, docteur.////

Sans attendre, je pris une dose de pénicilline et me préparai à l’injecter à Joey. Mais avant, je le regardai dans les yeux, ne voulant pas commettre d’erreur.

"Est ce que vous êtes allergique à la pénicilline ?"

« Non docteur. Je n’ai pas d’allergie connue. »

"Parfait".

J’administrai à Joey une dose de pénicilline, avant de reporter mon attention sur Idène.

////Pénicilline administrée, Docteur////

////Bien. Maintenant, écoutez-moi attentivement. Une exsanguination par les voies naturelles est un signe d'hémorragie particulièrement proche du système intestinal et gastrique. Ces symptômes sont heureusement assez typiques pour localiser la source. D’après vos informations, le foie est spécifiquement touché. Vous allez prendre le corps étranger pour repère, comme le centre d’une horloge, et pratiquer trois incisions d’une dizaine de centimètres. Une à onze heures, l’autre à trois heures et la dernière à six heures. Procédez et déclarez l’incision qui dégage le plus de sang... ////

Joey tenait bon. Il me tendit la desserte contenant les outils chirurgicaux et attendit mes ordres, prêt à faire son travail d’assistant. J’acquiesçai aux instructions de Swassons, et pris un scalpel que me tendait le militaire. Suivant les instructions du chirurgien, je pratiquai les trois incisions aux endroits déterminés, y allant doucement. Le sang commença à couler, et sans regarder Joey, je m’adressai à lui.

"Epongez le sang, et dites moi comment sont les constantes".

« Oui, bien reçu. » Me répondit-il en s'exécutant. « Les constantes sont stables sauf la tension qui continue de baisser... »

Très clairement, l’incision du haut laissa échapper bien plus de sang. Plus que ce qu’une simple incision chirurgicale est sensée dégagée. Je m’empressai aussitôt d’en informer Swassons.

////Incisions effectuées, celle située à onze heures du point repère saigne plus abondamment que les deux autres////

////Très bien. Découpez plus largement le tissu musculaire en veillant à ne pas atteindre les organes. Utilisez un écarteur pour agrandir votre zone d’ouverture, ceci pour votre intervention, ne paniquez pas en constatant un phénomène de “puit” se remplissant de sang...////

Joey, de son coté, continuait d’éponger avec de la gaze. J’agrandis alors l’incision désignée, découpant lentement pour ne pas provoquer de catastrophe, malgré le stress qui m’envahissait. Sur mon ordre, Joey me donna un écarteur, que j’insérai entre les bords de l’entaille, écartant ainsi la peau de part et d’autre pour ouvrir davantage l’incision. Celle ci se remplit alors de sang, comme Swassons l’avait signalé, ce qui m’empêchait de poursuivre ma progression correctement.

"Prenez la pipette à ballonnet, et aspirer le sang contenu dans l’ouverture".

Le caporal voulu se redresser pour atteindre mon sac mais il retomba tout de suite sur ses genoux en écarquillant les yeux. Il regarda autour de lui, un peu hagard, et secoua la tête comme s’il était désorienté. La transfusion en direction d’Idène devait réduire sa tension artérielle et le rendre plus faible sur ce type de déplacement. Il ne fallait pas se lever trop vite. Je remarquai la réaction de Joey, et je compris aussitôt qu’elle était due à la perfusion.

"C’est normal, cet état de faiblesse, j’aurais dû vous prévenir. Restez assis".

Je pris mon sac et le posai à côté du militaire, afin qu’il n’ait pas de déplacement à faire à l’avenir. Je ne voulais pas qu’il s’évanouisse.

« Ca fait...bizarre. » Me répondit-il en écarquillant une nouvelle fois les yeux. « C’est pas un p’tit déj manqué. »

Après avoir cligné des yeux, il fixa mon sac et se remémora ma demande. Il farfouilla jusqu’à récupérer la pipette à ballonnet puis il entreprit de vider le sang par l’ouverture pratiquée. Le soldat se demandait où ça allait le mener tout ça. Il donnait de son sang à la patiente d’un côté et il la vidait de l’autre pour jeter le tout par terre. L’homme avait la sale impression d’écoper un navire qui coulait inexorablement. Manque de pot, il était enchaîné à lui et il savait que sa toubib supporterait mal de perdre sa patiente.
Pourquoi ? Qui supporterait ça, après tout ces efforts ? Qui ?

Joey avait l’impression de délirer, à moins que ce soit sa tension en baisse mêlée à son angoisse qui lui joue un tour. Après avoir pris une inspiration, il se parla à lui-même, fébrilement mais avec assurance.

« Tu le fais. Tu le fais comme elle te l’a dis...Aspire, inspire, vide, expire. Aspire, inspire, vide, expire... »

Cela lui permit de se concentrer sur sa tâche. Le niveau de ce puit se réduisit mais le sang continuait d’affluer sans arrêt. A ce rythme là, c’est tout le sang de Joey qui allait finir par terre. Je restai silencieuse pendant que le militaire s’exécutait, mais je ne pus m’empêcher de m’inquiéter de son état. Ce dernier avait déjà perdu pas mal de sang à cause de la perfusion, il s’affaiblissait de plus en plus, et ce n’était pas bon du tout. Je prenais le risque de perdre Joey pour sauver Idène, et ce choix là, je n’aimais pas du tout l’avoir fait. je pourrais laisser la jeune Natus mourir, mais là encore, ce choix était inconcevable. Je ne pouvais rien faire d’autre à part espérer que Joey tienne le coup, le temps que Paresok revienne. Mais en attendant, je me battais contre moi même pour me dire que c’était la seule solution, le seul choix à faire, même si je n’appréciais pas du tout ça. Je poursuivis ma tâche, essayant de ne pas perdre trop de temps pour ne pas risquer la vie du Caporal. Je finis par dévoiler le foie.

////Docteur, j’ai atteint le foie. J’y suis////

////A présent, vous allez prendre un risque docteur. Vous n’avez pas le matériel nécessaire pour localiser le point de rupture, vous allez devoir procéder à vue. Appliquez une pression en amont de votre ouverture et pressez par intermittence. La procédure va accélérer l'hémorragie et mettre à jour un filet de sang. Un filet qui jaillit rapidement. Vous le suivrez pour en trouver l’origine. Attention cependant, l’effet de puit va s’intensifier...procéder et rendez compte.////

J’acquiesçai d’un hochement de tête, en silence, avant d’approcher une tige de l’organe. J’hésitai quelques secondes, mais je me repris. Après tout, c’était un peu comme trifouiller dans un cerveau, non ? Réfléchissant, j’exerçai une première pression sur une zone du foie, avant de la relâcher.
Il n’y eut aucune réaction. Le sang ne semblait pas jaillir. Joey continuait de ponctionner pendant ce temps, il murmurait frénétiquement son enchaînement pour être sûr de ne pas se tromper. Sans attendre, j’appuyai doucement la tige sur une autre surface de l’organe, essayant d’avoir une réaction sanguine.

La réaction, cette fois, fût très vive. Beaucoup trop vive même. L’organe se dégonfla soudainement sous mon geste en propulsant un filet de sang qui m’atteignit en pleine figure, droit dans les yeux. Le jet avait été si soudain et violent que j’en avais plein les yeux et ça me brûlait, me rendant complètement aveugle. Je gémis en me reculant par réflexe, et je tendis une main, tâtonnant comme cherchant quelque chose pour m’essuyer le visage. Mais, ne voyant rien, je ne pus rien faire pour remédier à ce problème.

« Sky...ler...bouge...pas. »

C’était Joey, la voix blanche, qui balbutiait dans sa désorientation. Ma main trouva la sienne et un tissu se posa sur mon visage. Il essaya de me débarbouiller mais je pouvais sentir ses gestes incertains et peu précis. Ce n’était pas bon du tout, il commençait à présenter les premiers signes d’une anémie sévère.

Il trouva une pipette de liquide physiologique pour que je me lave les yeux, j’en avais vraiment partout. C’était un véritable coup dur, un désastre. En cherchant à m’aider, il avait cessé de vider le phénomène de puit. Il s’était peu à peu rempli de nouveau.

« Est-ce que...ça...va ? » Me demanda-t-il avec une tête à faire peur.

Et Paresok qui n’était toujours pas là…

Je pris le temps de nettoyer mes yeux avec le sérum physiologique, avant poser le chiffon et la pipette.

"Merci Joey, ça va mieux. Je vois, c’est le principal".

En voyant la tête du Caporal, mes yeux s’arrondirent de surprise. Le jeune homme n’allait pas bien du tout. Et il avait arrêté d’évacuer le sang pour me venir en aide. Sans réfléchir, je lui pris la pipette des mains.

"Je vais poursuivre. Allongez vous sur le sol".

J’évacuai le sang de la blessure, tout en informant Swassons.

////J’ai trouvé d’où venait la fuite, c’est au niveau de la veine cave inférieure.////

Joey avait une respiration plus forte maintenant, signe que son coeur battait plus vite pour pomper le sang plus rapidement dans son organisme. Ca commençait à devenir dangereux mais je n’avais pas vraiment le choix. Il ne s’allongea pas pour autant, essayant d’ouvrir son gilet tactique pour fouiller dans sa poche intérieure tout en me répondant.

« Et qui...arrêtera...l'hémorragie... » Souffla-t-il avant de sortir un objet qu’il ne tendit.

C’était des lunettes de soleil.

"Joey ..."

Décidément, le Caporal ne voulait pas m’écouter. Je regardai la paire de lunettes qu’il me tendait. Des lunettes de soleil, cela n’allait pas m’aider du tout à voir quelque chose. Et je ne voulais pas demander à Joey de tenir une lampe torche, cela consommerait encore ses forces. Alors, comment faire ? Cependant, voir ces lunettes me donna une idée. J’avais moi même des lunettes de soleil, mais également de protection pour la tempête de sable. Cela serait mieux.

"Merci pour vos lunettes, Caporal, mais j’ai des lunettes de protection sur moi".

Je sortis la paire de lunettes d’une poche de mon gilet tactique, et la mis sur mon nez. A ce moment là, Swassons répondit dans le même temps.

////Nous y sommes presque. Le point de rupture est-il clairement localisé ?////

Je donnai à contre coeur la pipette à ballonnet à Joey, j’avais besoin de son aide, même si je ne voulais plus le solliciter. Hélas, je n’avais pas le choix. Appuyant une nouvelle fois sur le foie pour m’assurer avoir trouver l’origine du point de rupture, je répondis au chirurgien.

////Affirmatif, Docteur, je l’ai localisé////

Je me fis une nouvelle fois arroser. Heureusement que j’avais les lunettes, cette fois ci. Un simple geste sur les carreaux suffit à retirer le sang pour me permettre de continuer à voir correctement. C’était dingue, l’hémorragie était vraiment impressionnante et je voyais à l’oeil nu l’écoulement se mêler au plasma. Joey avait repris son travail mais il avait le dos voûté et les yeux qui clignaient.

« Elle a pas pris le tuba...y’en pas pour un désert... » se murmura-t-il à lui-même. « J’lui en achèterai un. »

////A présent, équipez-vous du matériel de cautérisation. Accentuez l’aspiration sur la localité du point de rupture. Retenez l’artère d’une pince à clamper, en vous en servant pour réduire l’afflux, et procédez à la cautérisation dans le même temps.////

Mon attention était à la fois portée sur Joey qui était entrain de délirer, ce qui n’était pas bon du tout, et Swassons qui me donnait ses instructions pour arrêter l’hémorragie. Je désignai à Joey une zone située autour du point de rupture.

"Aspirez le sang qui se trouve dans cette zone".

Pendant que Joey s’exécutait, je me munis d’une pince à clamper, et j’attrapai la veine cave inférieur, afin de diminuer temporairement l’afflux de sang dans le foie. Il fallait maintenant cautériser le point de rupture. Mais avec quoi ? Je venais de constater que mon fer à cautériser était cassé. Oh non, c’est pas vrai. Pourquoi le destin s’acharnait-il contre moi à m’empêcher à tout prix de sauver cette patiente ?

"Et merde, comment je vais faire, maintenant ?" demandai-je pour moi meme.

Il me fallait une autre idée.

////Docteur, j’ai un problème. La veine cave est clampée, mais je n’ai plus de fer à cautériser. Le mien est cassé////

////Reprenez-vous, docteur.//// Fit Swasson qui semblait deviner mon état intérieur. ////Il existe des solutions alternatives. La meilleure s’applique avec de la glue de qualité industrielle, avez-vous cela à disposition ?////

Joey semblait avoir entendu. Il monta sur moi un regard morne et vitreux. Ses gestes étaient affreusement lents, risquant de laisser le phénomène de puit se réitérer.

« Il m’a dit que c’était de la colle à bois. Ca chauffe puis c’est froid. Et c’est comme ça qu’il faisait la glue dans les usines. Il faut pas en bouffer... »

De la glue de qualité industrielle ? J’ignorai ce dont il s’agissait. Alors pour savoir si j’en avais à disposition, très bonne question. A ce moment là, Joey se mit à délirer davantage, parlant de colle à bois, de chaud et de froid. Mais, de quoi parlait-il ? Je ne comprenais pas. Lui poser une question nous ferait perdre du temps, mais avais-je un autre choix ?

"De quoi parlez vous, Caporal ?"

« Il me l’a dit. J’avais peur, c’est lourd. Mais j’ai couru encore plus vite... »

Les paroles de Joey étaient vraiment incompréhensibles à cause de son délire. Je tentai de déchiffrer ses mots, mais c’était très dur. Lourd ? Courir vite ? Mais de quoi voulait-il parler ? La seule fois où je l’avais vu courir vite avec quelque chose de lourd, c’était toute à l’heure avec la scie dans un sac. Se pourrait-il qu’il ait emmené autre chose ? Je regardai aussitôt dans celui ci, et y trouvai quelque chose. Un pistolet de colle à bois. Mais pourquoi cet objet ?

////J’ai trouvé un pistolet de colle à bois, est ce que ça peut faire l’affaire ?////

////Affirmatif, docteur. N’hésitez pas à appliquer une couche suffisante, je procéderai à l’opération importante moi-même. Si vous endiguez l’ensemble du point de rupture, la tension sur le moniteur se stabilisera graduellement. Ce sera votre confirmation...////

Je vérifiai que Joey aspirait tout le sang au niveau du point de rupture, mais hélas, le jeune homme était trop faible, et le travail laissait à désirer. Tant pis, je n’avais pas le choix. Tenant la pince à clamper dans une main, le pistolet dans l’autre, j’appliquai une généreuse couche de colle à bois au niveau du point de rupture, n’hésitant pas à en mettre même si c’était sur le sang.

Un bruit sourd me fit sursauter. Le caporal venait de s’effondrer sur le côté en râlant. Il était blanc comme un linge, les mains tremblantes. Il se coucha sur le dos, peinant à respirer et parlant de choses complètement incompréhensibles. Paresok n’était toujours pas là, il aurait dû arriver depuis un certain temps mais il n’émergeait toujours pas de ce fichu couloir pour les rejoindre. J’étais seule avec une patiente stabilisée et un militaire sur le point d’y laisser la vie.

Cependant, un bip attira mon attention. L’alarme qui clignotait en rouge depuis le début de l’intervention passa à l’orange. Le chiffre se mit à grimper, signe que sa tension commençait à augmenter tout doucement. Il n’y avait plus de fuite, plus d’hémorragie. Après tout ça, la complication venait d’être réglée.

C’est maintenant que je me trouvais dans la pire position de ma vie. Idène n’était plus exsangue mais elle n’avait toujours pas assez de sang dans son organisme pour survivre. Joey n’était vraiment pas bien, il avait même cessé de trembler et de parler. Il demeurait couché, prostré au sol. Et Paresok qui n’était toujours pas là…

Qu’est-ce que je devais faire... qui... qui je devais choisir ?!?

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Skyler McAlister
Médecin Neurochirurgien
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Ven 31 Aoû - 22:20

Skyler McAlister
Mon regard alla de Joey à Idène à plusieurs reprises. Idène avait besoin du sang de Joey pour continuer à survivre en attendant le retour de Paresok. Et Joey risquait de mourir dans les prochaines minutes si je n’arrêtais pas la perfusion. Non, je ne pouvais pas choisir entre les deux. Ce n’était pas possible. Je ne m’étais pas battue autant pour perdre la Natus. Mais je ne voulais pas non plus sacrifier un jeune militaire qui avait encore toute la vie devant lui. C’était horrible, c’était injuste. Pourquoi devais-je faire un tel choix ? Pourquoi ne pouvais-je pas sauver ces deux personnes ? La vie de l’un n’avait pas plus d’importance que la vie de l’autre. Aucune vie n’avait plus d’importance qu’une autre. Non, je refusais de faire ce choix là. Mais, si je ne choisissais pas, j’allais sans doute perdre les deux. Pourquoi est ce que c’était tombé sur moi ? Les médecins étaient souvent confronté à ce genre de dilemme, mais c’était toujours un moment horrible et atroce.

Quelque chose coula sur mes joues, et mes yeux commençèrent à brûler. Je retirai les lunettes de protection, devenue inutile, pour constater qu’il s’agissait tout simplement de larmes. J’étais entrain de pleurer, les nerfs avaient fini par lâcher à cause de ce choix douloureux et difficile. J’essuyai mon regard empli de larmes, sans toutefois les tarir. Je n’y parvins pas. Et je n’avais toujours pas pris ma décision. Mon coeur battait à tout rompre, ma respiration était rapide alors que je faisais ce que je pouvais pour me contrôler. Sans réussir. Je n’éclatais pas en sanglot, mais ces larmes qui coulaient étaient la preuve de ma grande tristesse et de mon profond désespoir d’être dans cette situation. J’avais deux vies entre les mains. Et je devais décider qui j’allais laisser mourir.

Si je laissai Idène mourir, mes efforts auront été vains. Mais si je laissais Joey s’éteindre, un jeune homme en bonne santé, dans la force de l’âge, cela me détruirait. Dans les deux cas, je me considèrerais comme une criminelle. Pourtant, il fallait agir. Je ne devais pas écouter mon coeur qui se refusait à choisir, je devais suivre ce que me dictait mon esprit. Et mon esprit me soufflait de laisser les choses telles quelles, de continuer de soigner Idène au détriment de Joey. Non, impossible, je ne pouvais pas. Pitié, ne m’obligez pas à faire ce choix. A accepter ce choix. Mon coeur le refusait. Pourtant, je n’avais pas le choix. Si Idène sombrait, je ne pourrais pas la ramener à la surface. Alors que si Joey s’enfonçait, pouvais-je le sauver ? Ou essayer ? Sans cesser de pleurer, je vins me placer à genoux à côté du corps inconscient du militaire. Mes lèvres tremblaient, ma vue se brouillait, ma respiration était saccadée. Je finis par prendre sa main dans la mienne, gardant le silence quelques secondes. Avant de finalement prendre ma décision. Une décision terrible qui serra mon coeur endolori.

"Je … je suis … désolée … pardonnez moi".

A ce moment, je ne tins plus et j’éclatais en sanglot, mettant ma main devant ma bouche pour étouffer le son de ma tristesse. Mais, je ne devais pas flancher. Idène avait besoin de moi. Sans attendre, je pris du matériel de suture, et après avoir retiré la pince à clamper, je refermai les incisions, avant de placer une compresse sur chacune d’elle pour les préserver de toute infection pour l’instant. L’état de santé de Joey continuait de se dégrader, son coeur risquait de lâcher à tout moment. J’avais placé un capteur à son doigt pour surveiller ses constantes, au cas où. Par réflexe, même si j’ignorais si cela me serait utile pour essayer d’empêcher le militaire de mourir, je rapprochai le défibrillateur au cas où. Et comme si mon acte avait une importance, le coeur du jeune Caporal s’arrêta, confirmer par le son effrayant qui annonçait un rythme cardiaque plat. Mon coeur à moi fit un bon dans ma poitrine, et sans attendre, je plaçai les palettes avant d’activer l’appareil.

"Oh non … pas ça … je t’en prie … reviens … reviens s’il te plait" dis-je sans me rendre compte que cette fois ci, c’était moi qui le tutoyais.

Par chance, le coeur de Joey recommença à battre assez rapidement. Mais sa situation ne s’arrangea pas du tout, je le savais parfaitement. Je ne faisais que retarder l’échéance. Peut être n’arriverais-je pas à le faire repartir la prochaine fois, maintenant fragiliser, et cela serait la fin du chemin pour le militaire. Ce qui agrandit encore plus la tristesse que je ressentais.

Voir Joey s’enfoncer ainsi était trop douloureux à voir, et je ne pus m’empêcher de serrer à nouveau sa main dans la mienne, pendant que de son côté, l’état de santé d’Idène se stabilisait. L’attente était insupportable, et la seule chose dont j’avais besoin ne venait toujours pas. J’allais perdre Joey, c’était inévitable. Alors que les larmes continuaient de couler sur mon visage assombri par le désespoir, je poussai un cri. Un hurlement qui déchira le silence autour de moi. Un seul mot. Un nom, lancé avec une voix emplie de souffrance.

"PARESOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOK !!!"


Environnement


Mais Paresok ne vint pas.
Il fallait croire que tout avait été orchestré minutieusement pour détruire la jeune femme. En jouant sur ses convictions, son altruisme, ses valeurs désintéressées, pour lui imposer des choix abjects jusqu’à la placer au pied du mur. Le coeur de Joey était reparti, son corps continuait d’alimenter celui d’Idène dont les constantes continuaient de s’améliorer jusqu’à un certain niveau...pas assez acceptable. Il lui fallait ces foutues poches de sang tout de suite. Mais que s’était-il passé ? Le Meneur était-il tombé dans une embuscade ? La ZA avait-elle été attaquée ? Qu’est-ce qui justifiait un tel retard au point de miser la vie de Joey.

L’accès par le couloir, là où le militaire avait débouché au pas de course, à bout de souffle, demeurait désespérément vide. Il restait quelques soldats au loin en train de fouiller le champ de bataille, n’ayant pas conscience du drame qui s’appliquait ici.
Skyler était résolument seule et isolée. La main du caporal, dans la sienne, avait perdu sa chaleur. Il n’y avait plus de signes de vie, comme un cadavre en devenir, Joey était moribond. Le moniteur s’alluma de tous les côtés, plusieurs alarmes s’activant en déclarant la détresse vitale. Mais Skyler avait fait un choix. Et c’était le plus difficile à supporter. Elle continuait de pleurer encore et encore, sans s’arrêter, pensant qu’on l’avait abandonné, et qu’aucune aide ne viendrait sauver Joey. Quand soudain ...

« MÉDICASTRE !!!! ICI MÉDICASTRE !!!! »

Paresok venait d’émerger au pas de course et il n’était pas seul. Un bac en plastique servant à entreposer des prélèvements médicaux se trouvait dans ses mains, il devait forcément y avoir les poches de sang à l’intérieur. Il courait vers la jeune femme comme un fou, le visage rouge pivoine et déposa le contenu dans ses bras dès qu’il l’eût atteint. Mais en remarquant le soldat à terre et son regard embué de larmes, il la questionna du regard, soudainement bien plus inquiet.

« Non...de grâce...ne me dites-pas... »

Skyler s’empressa alors de poser une poche de sang en perfusion à Joey qui était à bout, dans un état critique. Elle retira d’ailleurs la perfusion qui alimentait Idène. Puis, elle regarda Paresok, les yeux toujours embrumés de larmes. Le Natus devait s’inquiéter pour Idène, ce qui était normal. La jeune femme secoua la tête.

"Non … son état est stable … elle survit … mais … c’est le Caporal … il a failli ..."

Skyler ne parvint pas à terminer sa phrase. Certes, Joey recevait maintenant du sang, mais il était peut être trop tard, non ? Puis, elle perfusa Idène d’une poche de sang, veillant àc e que ses deux patients ne manquent de rien. A côté de Paresok, un soldat du génie était en train de disposer une balise de téléportation. Le Dédale allait pouvoir évacuer Idène et Joey d’urgence directement à l’infirmerie, sous les mains expertes de Swassons et de son équipe médicale.

« Rupture de stock docteur, nous avons dû retrouver des soldats avec le bon groupe sanguin sur le secteur et que vos collègues procèdent aux prélèvements. On a fait au plus vite. » fit le soldat inconnu qui accompagnait Paresok. Il activa le matériel. « Balise parée. Téléportation d’urgence pour intervention médicale, le Dédale est prévenu... »

L’homme la regarda.

« Vous pouvez suivre vos patients, docteur. L’antenne médicale s’en sort bien jusque là. Le Dédale n’attends plus que votre signal pour procéder... »

Skyler prit le temps de réfléchir, mais elle avait un peu de mal à analyser la situation, encore perdue et en détresse par le choix qu’elle avait dû faire. Retourner temporairement sur le Dédale avec ses patients ? Ou retourner de suite à l’antenne médicale ? Elle regarda Joey, puis Idène, les deux étant toujours dans un état critique, bien que stable pour le moment. Elle s’en voulait beaucoup du choix qu’elle avait fait, des risques qu’elle avait fait courir au Caporal. Alors, le laisser maintenant, comme ça, serait difficile pour elle. La doctoresse voulait être sûre qu’il s’en sorte. Qu’ils s’en sortent tous les deux, après avoir vécu ce cauchemar. S’essuyant les yeux alors que les larmes commençaient à se tarir enfin, la jeune femme acquiesça d’un hochement de tête, retirant ses affaires médicales, et rangeant tout dans son sac.

"J’accompagne mes patients sur le Dédale".

Malgré le respirateur, Paresok embrassa sa femme tout en pressant son épaule. Il pleurait mais c’était des larmes de soulagement, peut-être même de joie. Juste avant la téléportation, son regard se posa sur le docteur McAlister, un regard empreint d’une reconnaissance profonde et authentique. Un remerciement sincère qui n’avait strictement rien de simulé. Le flash lumineux témoigna du transfert et la jeune femme se retrouva au beau milieu de l’infirmerie du Dédale. Les lits étaient tous surchargés de nombreux blessés, d’une suractivité catastrophique à l’image du champ de bataille d’en bas.

Le Docteur Swassons apparut, avec une tenue encore largement tachée de sang, le masque de chirurgie abaissé. De son ton abrupt habituel, il ordonna à son équipe de placer les deux patients sur des lits médicalisés et de les transférer tous les deux au bloc en urgence. Skyler ne se rendit pas compte tout de suite qu’elle avait amorcé le mouvement pour les suivre, se faisant arrêter par le chirurgien qui tentait de la raisonner.

« Docteur ! Voyons, docteur ! Reprenez vous ! Reprenez vous tout de suite !!! » Il lui agrippait l’avant bras et la regardait fixement, essayant de lui faire quitter l’état de choc qu’elle avait frôlé de peu. « Vous avez fait un travail extraordinaire, ma jeune amie. Grâce à vous, la patiente à une chance de vivre et je vais la saisir. »

Il insista du regard pour qu’elle comprenne qu’elle devait passer la main. Cela ne dépendait plus d’elle maintenant et Swassons se chargeait de lui rappeler avec une froideur qui tendait à le faire paraître pour inhumain.

« Je vais demander au garde de vous raccompagner à vos quartiers. Reposez-vous, prenez une douche, mangez. Je vous assure que vous serez la première avertie dès que nous sortirons du bloc. C’est compris ? Allez, laissez-moi repartir maintenant... »

C’est la dernière chose que vit le docteur McAlister. Ses deux patients qui la quittaient vers le bloc opératoire, le cas de Joey nécessitant plusieurs procédures complexes de contrôles et de réoxygénation. Le garde avait fait un signe discret, il se présenta et proposa à la jeune femme de la guider. Elle savait que l’intervention durerait longtemps, des heures...des heures interminables d’attente.

Heureusement, peu de temps après sa douche, elle eut la visite du psychologue du bord : Sidney. Il ne se montra pas intrusif et n’imposa pas de contrôle psychologique. Il lui proposa simplement de se rendre au mess pour dîner ensemble et de parler sans véritablement évoquer la terrible épreuve qu’elle avait subi. Sidney se montrait aimable, ouvert, attentif. Et il aida Skyler à remettre de l’ordre dans son esprit et se rendre compte de l’exceptionnelle mobilisation dont elle avait fait preuve.

Le temps passa longuement, elle rejoignit ses quartiers et patienta, à tel point qu’elle s’endormit malgré le stress qui la tenaillait. Mais une main vint frapper à sa porte, la faisant sursauter. Quand elle ouvrit, elle fit face au Docteur Swassons, épuisé mais l’air serein sur son visage.

« Les jours de votre patiente ne sont plus en danger docteur. Félicitations. Les nanites reconstructrices de Madame Taylor Laurence seront nécessaire et la patiente souffrira de séquelles. Mais elle reprendra le cours de sa vie normale, je compte rapporter votre travail d’exception. Vous avez sauvé votre patiente... »

Alors que Swassons indiquait à Skyler qu’Idène allait vivre, la tension accumulée ces dernières heures sembla se volatiliser. Elle avait réussi l’impossible, et grâce à sa témérité et sa persévérance, la Natus avait tenu le coup et pourrait continuer sa vie. La doctoresse soupira longuement, un sourire aux lèvres.

"Merci Docteur, votre aide m’a été très précieuse".

Cependant, quelque chose la chiffonna. Swassons lui avait parlé d’Idène, et c’était une bonne chose. Mais, qu’en était-il de Joey ? Allait-il bien ? Skyler fronça les sourcils, son sourire s’envola, alors qu’elle regardait le chirurgien.

"Et le Caporal Hadison ? Comment va-t-il ?"

Swasson lui posa une main compatissante sur l’épaule.

« Le patient a fait une attaque peu de temps après son admission. Il est entré dans un profond coma. Il va en avoir pour un moment mais nous sommes confiants, c’est un homme solide. »

L’annonce tomba sur les épaules de Skyler comme un couperet. Si elle ne s’était pas alimentée un peu plus tôt, elle aurait défailli à cause de la faiblesse et de cette mauvaise nouvelle. Dans le coma ? Non, ce n’était pas possible. La jeune femme s’en voulait, c’était de sa faute s’il était dans cette situation, même si son choix avait contribué à sauver Idène. Elle secoua la tête, ne sachant pas quoi dire. Swassons venait de dire qu’il était confiant, que le Caporal était quelqu’un de solide. Il s’en sortirait donc, n’est ce pas ? Skyler se mordit la lèvre, avant de sortir de son mutisme.

"Est ce que … est ce que je pourrais le voir ?"

« Bien sûr. L’infirmerie est débordée, il a été déplacé dans une chambre surveillée. »

L’homme acquiesça, il devait repartir au bloc opératoire. Il fit quelques pas avant de se raviser et de se retourner.

« Docteur McAlister. » Il revint se planter devant elle. « Vous avez été confronté à l’un des choix les plus difficiles qu’un médecin ne puisse jamais connaître. Et ceci sur le champ de bataille. Ne soyez pas trop rude envers vous même, vous avez pris les bonnes décisions. »

Swassons hocha la tête.

« Vos deux patients sont vivants. »

Puis, il partit. Les mots de Swassons touchèrent beaucoup Skyler qui retint son émotion, se contentant d’un simple hochement de tête. Elle avait assez pleuré pour aujourd’hui, même si dans ce cas, ces larmes auraient été de joie et de gratitude. Après le départ du chirurgien, la jeune doctoresse retourna s’allonger sur son lit, pensant à ses deux patients et à ce qu’elle avait accompli. Et bien que Joey n’était pas encore tiré d’affaire, la jeune femme se sentait plus légère d’avoir fait son travail jusqu’au bout, quitte à prendre des décisions horrible et contre nature pour elle, ébranlant son être. Sans s’en rendre compte, le poids du sommeil l’écrasa, et elle finit par s’endormir à nouveau.


END

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