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Requiem of a Past [ft. Darren Clive]

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Sam 13 Mar - 17:02

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Ce que tu crois être la mort, C'est une saison et rien de plus, Un jour lassé de cette errance, Tu t'en iras quelle importance, Car la Terre tournera encore, Même quand nous serons mort.
Requiem for a past
TEMOINS PRESENT
Esfir Lunienko
&
Darren Clive



Musique de circonstance


Le vent soufflait encore très fort ce matin et l'aube teintait le ciel d'un gris blafard. Les vagues frappaient les digues comme si elles voulaient monter à l'assaut de la Cité.
Une silhouette s’avançaient sur la passerelle menant à la pointe de la digue. Elle était petite, frêle et tout aussi blafarde que les nuages qui s'amoncelaient.
Sa démarche était mal assurée. Elle s'immobilisa une seconde, posa une bouteille de vodka à moitié vide sur le sol et retira ses chaussures à talons haut. Elle les abandonna au sol pour se saisir à nouveau du goulot et reprendre son chemin, lentement, inexorablement, une bouteille dans une main, un ours en peluche dans l’autre..

Les vagues cognaient, projetant leurs embruns sur le chemin de la rousse, humidifiant ses cheveux encore ébouriffés de sa folle nuit de la veille… Encore une nuit à essayer d’oublier, à essayer de se sentir un peu en vie… une nuit à essayer d’Être, malgré tout. Malgré tout ce qui c’était passé depuis, tout ce qui s’était dit, tout ce qu’elle avait dit, tout ce qu’elle avait fait…

Cet endroit avait toujours été l’un de ses préférés sur la Cité. Il était peu fréquenté et il lui rappelait la Terre, sa maison, son enfance… tout ce à quoi elle croyait, ce mensonge qu’un pays entier avait construit pour elle. C’était aujourd’hui le symbole de cette trahison, d’une nation qui s’était servie d’elle, d’une vie qui n’était pas la sienne, d’un monde qui lui avait caché son vrai visage. Symbole d’une nostalgie révolue, d’un présent incertain… d’un avenir inexistant.

Alors… quoi de plus normal que tout s’arrête ici même, seule au milieu du chaos.


---------- DARREN


« T’as l’air pressé de rentrer. »
Darren souriait. Il finissait son service avec son binôme, un certain Dwyte, un type plutôt marrant. Depuis quelques temps, pour pouvoir adapter ses journées de repos avec celles de sa compagne, il effectuait des gardes de nuit. C’était un travail fastidieux qui consistait généralement à aller récupérer des ivrognes aux sorties des festivités à tel ou tel endroit. Empêcher quelques bagarres. Puis, une fois la nuit bien avancée, il fallait défaire des couples en pleins ébats qui n’avaient pas conscience que les caméras fonctionnaient “ici aussi”. Si par chance, ils tombaient sur un mec qui se baladait à une heure tardive, ils le contrôlaient et l’escortaient jusqu’à ses quartiers. Certains binômes n’hésitaient pas à sortir les muscles. Mais Darren préférait largement son côté avenant et sociable. Il tenait compagnie aux gars qui trainaient un peu trop tard et il notait mentalement l’emplacement de leur quartier.
Il n’y avait pas spécialement de couvre-feu mais, dernièrement, les huiles insistaient sur la sécurité.
« C’est à ton tour d’écrire le rapport d’inter... »
« Oh, sérieux mec. Je déteste ça. »
« Tout le monde déteste. Elle a vomi sur tes rangeots...donc tu t’y colles »
« Et toi alors ? Mamour va te friter la gueule si tu es pas rentré à l’heure ? »
Darren se mit à sourire une nouvelle fois. Il n’était pas du genre à s’épancher sur sa vie privée mais une certaine forme de fierté l’habitait. Il ne pouvait pas prétendre le contraire.
« Elle dort au cantonnement. J’aimerai bien rejoindre ses draps avant qu’elle se réveille. Les copains du D4 se lèvent tôt, du genre éléphant dans un magasin de porcelaine. Je voudrai être là pour éviter les ennuis... »
« Toujours hostile avec tout le monde ? »
« Toujours hostile. » confirma Darren.

Son binôme arrêta brusquement de marcher. Quelque chose semblait le travailler et il fit demi-tour pour passer la porte d’un balcon. Darren le suivit immédiatement. Il ne connaissait pas spécialement Dwyte mais il savait reconnaître la stature d’un militaire aux aguets. Le temps était mauvais, le genre de matinée où on aimait se réfugier derrière un bon café chaud. Même depuis cette position surélevée, le vent et les grandes vagues frappant les digues amenaient du crachin jusqu’ici.
« T’as vu ça ? » lâcha Dwyte en fixant un point à l’autre bout de la cité.
Darren chercha un certain temps. Puis il le vit, sur la fin, une petite tache colorée sur l’extrémité d’une digue.
« Tireur d’élite, c’est ça ? » questionna Darren en ouvrant son gilet, à la recherche de ses jumelles.
« Presque. De précision... »

Clive chaussa les jumelles pour contrôler ce qu’il voyait. C’était effectivement une silhouette. A sa façon de se déplacer, il n’aurait su dire si la personne était malade ou non.
« Civil je dirai. Il se rapproche de la pointe de la digue. »
« La mer est mauvaise. C’est pas un temps à faire la balade. »
« Encore un Warrior qui veut tester son courage, j’imagine. »
//PC sécurité, ici patrouille nocturne quatorze. On a un élément inconnu qui traîne sur la digue. Il zone un peu trop près du bord.//
//Reçu. Un instant...//
« Tu disais que t’étais pressé ? »
« Arrête ! Y’a forcément une patrouille plus proche que nous ! »
//Quatorze, ici PC sécurité. A vous de jouer, aucune patrouille disponible dans les environs.//

Dwyte tourna un regard amusé vers son binôme, lequel regrettait amèrement l’oeil de faucon de son collègue.
//PC sécurité, bien reçu. On y va. //
Le binôme regarda Darren et lui tendit son poing. Celui-ci comprenait qu’avec le rapport à écrire, ils ne pouvaient s’y rendre à deux. Pierre-feuille-ciseau pour se départager. Ok…
Darren se prêta au jeu et perdit lamentablement.
« Foutu tireur de précision ! »
« Passe le bonjour à ta copine pour moi ! »
« Tocard ! »

Un quart d’heure plus tard, Darren atteignait l’extrémité de la digue. Pendant qu’il s’y rendait, il demandait des informations à quelques observateurs. Un des plus proches lui avait expliqué que l’inconnu s’était séparé de ses chaussures avant d’avancer plus dangereusement encore de l’extrémité de la digue. Le problème, c’est que cet endroit était conçu pour briser les vagues. De grandes volées d’eau se jetaient régulièrement sur les bords. Quiconque s’en prenait une pouvait être littéralement absorbé par la mer. On repêchait parfois des cadavres d’inconscients...ou de suicidaires.

Les fameuses chaussures lui servirent de repères. Il savait, qu’à partir de ce point, que l’inconnu n’était plus très loin. Darren les prit dans ses mains, remarquant qu’il s’agissait de talons aiguilles qu’on sortait plutôt pour les événements. Une fêtarde, probablement alcoolisée. Le soldat coinça les deux chaussures dans son gilet tactique puis il avança dans la zone dangereuse des brises-vagues.
//PC sécurité, ici PN-14, je m’engage sur le secteur chaud. Je peux compter sur un jumper de récup en cas de baignade ?//
//Navré Quatorze, nos gardes côtes sont déjà engagés sur des surfeurs suicidaires. Faites le max sans vous mettre en danger.//
//Reçu.//

Il la voyait autrement, sa fin de patrouille nocturne.
Darren s’engagea sur la pointe de la digue. C’était un endroit vraiment sympa quand il y faisait beau temps. Parfois, quand il était en bonne forme, il poussait son jogging jusqu’ici pour s’arrêter et profiter de l’océan. Mais là, les vagues de la mer colérique cognait violemment contre les parois de la digue. L’eau grimpait et le fouettait dans un grand rugissement monstrueux. Le vent sifflait fort, comme s’il lui disait que ça ne le dérangerait pas de le noyer. Il finirait trempé de la tête aux pieds à rester là. Mais surtout, le sol glissait. Ca allait si elle ne s’approchait pas trop du bord ultime. Mais l'auto préservation ne semblait pas intéresser cette fille.

Lorsque Darren l’atteignit enfin, il remarqua sa tenue de soirée quasi trempée. Cette jupe bien courte et la veste sur les épaules. Ses mains étaient prises. Une bouteille d’alcool dans l’une, un ours en peluche dans l’autre. Sur le coup, Clive eut peur de faire face à une victime de viol qui voulait en finir. Un militaire en arme était loin d’être la personne adéquat pour la raisonner. Son état, d’ailleurs, n’avait rien de sensé. Est-ce qu’elle était ivre ? Sous le coup d’une drogue ? Un peu de tout à la fois ?
Machinalement, il vérifia le stunner Wraith sur son holster de cuisse puis il réduisit l’écart. Pour le meilleur et pour le pire, c’était à lui d’y aller. Un quelconque renfort féminin mettrait trop de temps à les rejoindre.
« Madame ? »
Elle ne l’avait pas entendu. Il gueula pour couvrir le vent et le fracas des vagues.
« MADAME ! »
Il attendit d’avoir capté son intérêt et ajouta, sur le ton de la plaisanterie :
« SI VOUS VOULEZ LA JOUER TITANIC, C’EST UNE MAUVAISE PIOCHE ! J’AI RIEN D’UN DICAPRIO. »
Darren lui offrit un sourire avenant et il s’approcha de quelques pas, les mains ouvertes comme s’il voulait lui montrer qu’il n’était pas dangereux. Dans cette configuration, entre ce mauvais temps et l’état déplorable d’Esfir, le soldat n’avait pas reconnu son visage. Son amie lui était clairement inconnue à cette heure. Il lui parlait avec humour comme il l’aurait fait pour n’importe qui.
« VOUS ÊTES UN PEU PROCHE DU BORD ! VOUS NE VOULEZ PAS ME REJOINDRE PLUTÔT ? »


Encore quelques mètres et elle y serait… là, tout haut bout du chemin. On racontait que ceux qui se suicidaient, allaient tout droit en enfer. Mais puisque l’enfer est ici qu’importait cette croyance ? Elle reprit une gorgée de vodka, une des meilleures de russie, cette journée qui finirait à peine commencée valait bien ça après tout. Ultime cadeau du Général qui avait gagné son coeur d’enfant pour mieux le piétiner une fois adulte. Lui qui l’avait aidé à se reconstruire, n’avait il fait cela que pour la manipuler ? Tout ce qu’il avait mis de bon en elle..tout ça était parti, laissant un trou béant dans son ventre, son coeur et son âme.

Une vague vint la gifler. Pauvre conne nostalgique d’une vie qui n’est pas la tienne !

Quelqu’un s’approchait dans son dos, elle ne le voyait ni ne l’entendait: trop de bruits autour d’elle qui ne regardaient que le désastre qu’elle était devenu.
Même lorsqu’il parla plus fort, elle ne l’entendait pas et lorsqu’elle s’immobilisa, ce n’était pas pour répondre à son appel mais juste parce qu'il ne lui restait plus que 3 mètres entre elle et l’onde rugissante. La distance idéale pour quelques foulées avant de faire le saut de l’ange et de se remplir d’eau jusqu'à suffoquer.

Elle tourna sur elle même pour poser un dernier regard sur cette Cité, les yeux en l’air elle contemplait les grandes tours aux allures élégantes qui semblaient vouloir effleurer le ciel. Quel lieux majestueux, ici elle avait atteint un rêve en touchant les étoiles… mais quand on atteignait une telle hauteur, la chute ne pouvait être que vertigineuse.. elle finirait donc dans les profondeurs.
Son regard se baissa en suivant les arêtes de la Cité puis se posa sur cette silhouette qu’elle n’avait pas remarquée. Son visage resta inexpressif mais dans un réflexe de son ancienne vie, elle pencha légèrement la tête de côté comme un chien qui ne comprend pas.
Puis elle reconnut Darren. Le soldat de première classe Darren Clive.
Il y aurait donc un témoin pour son ultime scène...que ce soit Darren avait du sens, d’une certaine façon.
Ses pupilles étaient dilatées et le soldat voyait à peine le vert de ses iris lorsqu’elle laissa leurs regards se mélanger quelques secondes.
Puis elle amorça un pas en arrière, sans détacher ses yeux de ceux du militaire.
« Adieu Darren » dit elle calmement tout en faisant un nouveau pas en arrière, puis un autre… et encore un autre…
« ESFIR, ATTENDS !!!! » s’écria Darren en tendant une main vers elle.
Le regard écarquillé, la bouche encore entrouverte par le choc de la surprise, il peinait à réorganiser ses idées. Il ne l’avait pas reconnu tant elle avait changé. Ce n’était plus que l’ombre d’elle-même, comme une fracture, un écho fantomatique. Le changement était tel que la différence physique, physiologique, même dans la démarche, tout contribuait à la rendre différente. Ce n’est que sa voix, qui semblait avoir le moins souffert, qui lui avait tout de suite rappelé que c’était son amie.

Il ne savait pas ce qu’il se passait.
Clive ne l’avait plus revu depuis un petit moment et il était complètement paumé. Viol ? Dépression ? Incident traumatisant ?
Qu’est-ce qui avait bien pu la rendre comme ça ?

Darren savait très bien que si elle tombait, ce serait la mort assurée. Le choc initial dans l’eau, à un telle hauteur, serait comme frapper un mur de béton. Ca l’assomerait. Puis la prochaine vague viendrait l’écraser contre le brise-lame de la digue. On ne retrouverait d’elle qu’un corps démembré, parsemés de fractures ouvertes. Il voyait déjà son teint livide, c’était quelque chose. Alors morte...il ne se le pardonnerait jamais.
Il fallait trouver quelque chose et vite. Clive avait conscience que le temps était compté et, poussé dans ses retranchements, il tenta un coup de bluff osé.
« J’AI PRÉVENU LE DÉDALE !!! » s’écria-t-il, la main toujours tendue dans sa direction. « TU SERAS TÉLÉPORTÉE AVANT MÊME DE TOUCHER L’EAU ! »
Sa gorge était devenue sèche, son coeur cognait violemment dans sa poitrine.
Esfir était si proche du bord. Tellement proche !
« Y’AURA DES GENS PARTOUT. TU SERAS DANS L’INFIRMERIE, À DEVOIR TE JUSTIFIER. DEVANT UNE PUTAIN D'ARMÉE DE MÉDECINS ! FAIT PAS CA...ON PEUT... »
Il s’approcha d’un pas.
« On peut...régler ça entre nous. D’accord ? Toi et moi. Personne d’autre... »
Darren la suppliait du regard.
« Attrape ma main ! Allez, Esfir ! Déconne pas ! »

L'infirmerie… si ce simple mot aurait suffi à lui donner des sueurs froides quelques mois plus tôt, aujourd'hui il ne lui fit aucun effet.
Pire encore lorsqu'il lui proposa sa main pour lui proposer de tout arranger,
Darren put voir un léger sourire se dessiner sur les lèvres de la russe qui fit un nouveau pas en arrière.
« C'est trop tard pour ça. »
Encore un pas, elle était à moins d'un mètre. Une nouvelle vague frappa, la cachant quelques secondes à la vue du soldat.
« ESFIR !!! » cria-t-il subitement en s’avançant.
Non, elle n’était pas tombée. Darren n’était pas moins rassuré de la voir dans cet état et il désespérait de pouvoir la ramener à la raison. Il se sentait si démuni et impuissant qu’il laissa éclater sa colère. Elle n’était pas tournée vers Esfir mais il ne pouvait pas rester les bras ballants. Darren devait l’empêcher de faire ça !
« MAIS MERDE ! JE NE T’AI PAS PORTÉ SUR MON DOS, PRIS UNE BALLE POUR TOI, POUR TE VOIR FINIR LE BOULOT PLUS TARD !!! »
Il secoua la tête, le regard humide.
« Je t’interdis de faire ça, tu entends ? Il y a des gens pour qui tu comptes ! »
Darren tenta un pas de plus. Il n’était plus très loin d’elle à présent.
« C’est pas terminé, Lunienko ! T’as encore des choses à faire ici ! »

Esfir s’immobilisa soudain, son regard se durcit et ses traits peignirent bientôt sur son visage la colère qui était enfouie depuis si longtemps au fond d’elle. Elle serra les mains sur les symboles des deux faces d’elle même qui menaient une guerre dévastatrice dans son inconscient. L’ours en peluche, représentant l’enfant qu’elle était resté malgré les années et les coups durs, et la bouteille : l’adulte incapable de faire face à tant de bouleversements.

« Des gens pour qui je compte ? » elle se mit à rire, d’un rire presque dément.
« Tu te fous de ma gueule Clive ? Tu étais où ces derniers mois? eih? Tu étais où quand on m’a traînée dans la boue ? Quand on a fait éclater ma vie en mille morceaux ? »
La colère montait au point qu’au lieu de l'entraîner en arrière vers la chute fatale à laquelle elle aspirait, ses pas se remirent en marche avant.
« Oh attend un peu… Dans les bras de ta dulcinée sans doute ! »
« Hein ? » dit-il stupidement dans un premier temps, ne comprenant pas le rapport.
Darren ne voyait qu’une seule chose à ce moment là, c’est que son amie s’écartait du bord. Sa colère, sa haine, le tout se manifestait contre sa personne. Dans le fond, il ne pouvait pas rêver mieux. S’il devait se prendre une avalanche de coups pour qu’elle cesse de se mettre en danger, c’était l’idéal.
« Je ne savais pas que tu allais mal ! » se défendit-il tout en essayant d’organiser ses idées en parallèle. « Si j’avais su. Si tu m’avais dis, j’aurai été là ! »
Il avança d’un pas supplémentaire pour combler un peu plus la distance.
« Je suis là, maintenant ! »
« Oh mais l’entendez vous ? Regardez ce chevalier blanc..il est là maintenant, nous sommes sauvés ! » si c’était encore possible, le regard de Esfir se fit encore plus noir à l’encontre de son ami.
« Mais Darren, c’est trop tard… regarde ça... » dit elle en levant la main tenant son ours en peluche fétiche, cadeau du général. « Regarde moi… y’a plus rien à réparer, rien à recoller… décidément, entre nous tout est une question de mauvais timing ! Cette fois c’est toi qui arrive trop tard ! »
Elle jeta ses derniers mots tout en se tournant pour envoyer avec la même violence sa peluche dans les flots déchaînés.

(c) princessecapricieuse

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Dim 14 Mar - 16:43

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Ce que tu crois être la mort, C'est une saison et rien de plus, Un jour lassé de cette errance, Tu t'en iras quelle importance, Car la Terre tournera encore, Même quand nous serons mort.
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TEMOINS PRESENT
Esfir Lunienko
&
Darren Clive



Darren vit l’ours disparaître dans les vagues agressives. Le temps était à l’image de l’esprit de son amie. L’imagination du soldat remplaça sans peine la peluche par le corps vibrant de colère d’Esfir. Il ne voulait pas de tout ça et il regrettait de ne pas avoir été présent. La jeune femme savait toucher où ça faisait mal. Il ne se voyait pas comme un chevalier ni un héros. Mais il ne l’avait pas protégé.
Il nota toutefois la façon dont elle l’intégrait à son état. Il continuait de la fixer mais en en jaugeant la distance, se demandant s’il parviendrait à la plaquer au sol au moment où elle déciderait de faire cette folie.
« Oui, ça a été un mauvais timing ! » reconnu-t-il. Le timbre de sa voix ne laissait pas de doute sur le double dialogue. Timing cette fois dans le Dédale. Et timing sur cette baie.
« Alors tout est de ma faute, Esfir ? »
« Oh non, ne te donne pas cette importance Clive… »
« J’ai pas d’importance ! Mais puisque c’est l’heure de se dire les choses, je t’écoute ! Qu’est ce que tu as à me reprocher ?!? »
Esfir fulminait, ses idées depuis l’arrestation et tout ce qui avait suivi n’était déjà pas très claires, mais en cet instant tout se mélangeait encore davantage et la mauvaise foi pris le dessus sur tout raisonnement.
« Ce que je te reproches ? Tu avais dit que tu me protégerais, mais tu n’étais pas là quand ils me sont tombés dessus ! Tu n’étais pas là quand tout le monde m’a laissé tombé ! Tu n’étais pas là quand j’ai dû tout affronter toute seule ! Noooon Monsieur était dans les draps de sa nouvelle âme soeur ! » la colère dans sa voix laissait entendre sa légère ébriété
« Oh tu croyais peut être que je n’étais pas au courant ? Oh oui, ce n'était pas ma faute, mais tu étais un homme fidèle...si tu avais été libre, j’aurais mérité tes faveurs… FOUTAISES !!! Quand tu as rompu avec Emilia...es tu venu vers moi ? NON ! Toutes ces belles paroles, c’était que des conneries ! Tu m’as menti ! Comme tous les autres, tout le monde m’a menti ! » elle distillait ses mots comme du venin tout en approchant de lui et le menaçant de sa bouteille.

Darren resta pantois. Son regard allait parfois vers la bouteille mais il restait rivé le plus souvent sur la jeune femme. Elle avait suffisamment avancé pour que le bord de la digue ne la menace plus. Tout du moins, Darren se disait qu’il aurait maintenant assez de temps pour la rattraper. Mais elle venait de lui livrer le fond de sa pensée. Probablement avec l’aide de l’alcool, certes, mais ça demeurait une vérité. En l’entendant parler, pleine de mauvaise foi et rongée par la couleur, Darren comprenait au travers du dialogue qu’elle avait souffert de son silence, de son absence.
Ses traits s’étaient également durcis. Il termina le boulot d’Esfir qui consistait à entamer les frontières personnelle et se planta devant elle.
« Tu crois que je n’y ai pas pensé ? » déclara-t-il brusquement.
Il la toisa un instant avant de développer.
« J’ai saigné pour Emilia. Et du jour au lendemain, je n’ai plus jamais reçu de nouvelles ! J’étais une distraction pour elle, un jouet. Et dès l’instant où je ne l’ai plus intéressé, elle m’a jeté comme un détritus. »
Il témoignait également de colère, de stress et d’émotivité.
« J’ai fini tout seul, comme un con. La chaleur humaine, l’attention, la tendresse. Putain ! Tout ça me manquait tellement que j’ai tout de suite pensé à aller vers toi. Et ça aurait donné quoi, Esfir ? J’aurai fais de toi un pansement ?!? »
Darren secoua la tête. Il ne devrait pas faire ces aveux, il le savait. Mais puisque c’était l’heure des comptes, autant qu’elle sache...
« Je t’aurai donné l’espoir le temps de me refaire. Et quand j’aurai fais une rencontre qui me convenait, je te jetai, comme Emilia l’a fait pour moi ? »
Voilà pourquoi il n’était pas venu. Darren considérait qu’il ne s’était pas promis à la jeune Russe une fois qu’il aurait fait le deuil de sa relation. C’était de la mauvaise foi de sa part, il n’avait jamais été question de ça. Mais il avait pensé à elle. Esfir l’ignorait, le soldat se refusait de lui faire subir ce genre de chose. Parce qu’elle était belle, intelligente, séduisante. Mais Darren n’accrochait pas, elle n’était pas un jouet !

Esfir bondit sur lui en le poussant de toute sa rage.
« Je t’interdis ! Je t’interdis de dire ça ! » elle hurlait et les larmes lui montaient maintenant aux yeux.
« Tu ne m’as même pas laissé ma chance ! Tu es comme les autres ! Tu m’as laissé toute seule ! » son poing se ferma pour venir se planter dans le ventre du soldat.
« Arrête ! » gueula-t-il dans un premier temps, la colère et la vexation le conduisant à cet instant. Le poing d’Esfir s’écrasa dans les plaques anti-balistique de son gilet. Autant dire qu’il ne ressentait quasiment rien. Le soldat s’empara de ses épaules pour l’empêcher de recommencer, appliquant une force de rejet au début.
Mais il comprenait et il ressentait la détresse d’Esfir, ça ne le laissait pas indifférent.

Elle continuait à ruer, essayant de frapper de ses poings, de ses pieds, comme un pantin désarticulé.
« Arrête ! » fît Darren un peu plus doucement. Et cette fois, au lieu de la repousser, il tenta de l’attirer contre lui.
« Toute seule.. seule… » ses mots se perdaient peu à peu dans sa gorge, ses gestes perdirent peu à peu de leur vivacité et les larmes prirent le dessus sur la colère alors qu’elle se laissait tomber de tout son poids. Darren tenta de la retenir au mieux. Mais en craignant de l’écraser contre lui, il suivit le mouvement et s’agenouilla avec elle.
« Ils m’ont abandonné...tous… j’ai plus personne… je suis plus personne… tout ce vide...c’est tout vide dedans... » son discours était entrecoupé de sanglots, elle sombrait.
Le soldat la serrait dans ses bras. Il la laissa évacuer ses pleurs en silence, se demandant comment il avait pu louper un tel désastre chez son amie. Elle avait l’impression d’être abandonnée et de ne plus servir à rien, il ne connaissait que trop bien ce sentiment.
« Tu es Esfir Lunienko. Tu es une excellente mécanicienne. Et tu es mon amie. C’est la base. Elle est indéfectible, tu m’entends ? »
Darren savait que ce n’est pas ce qu’elle voulait entendre. Une déclaration d’amour aurait sûrement fait le travail. Mais il ne nourrissait pas de sentiments aussi poussés. En revanche, ça le fichait par terre de la voir aussi mal. Il frictionna ses épaules et insista :
« J’étais peut être pas là, Esfir. Mais ça ne veut pas dire que je t’ai abandonné. J’irai me prendre une autre balle si ça te permettait d’aller mieux. »

(c) princessecapricieuse

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Mer 17 Mar - 11:08

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Ce que tu crois être la mort, C'est une saison et rien de plus, Un jour lassé de cette errance, Tu t'en iras quelle importance, Car la Terre tournera encore, Même quand nous serons mort.
Requiem for a past
TEMOINS PRESENT
Esfir Lunienko
&
Darren Clive



Musique de circonstance


Esfir faisait non de la tête de plus en plus vigoureusement à mesure qu’il parlait. Non, il ne comprenait rien, ne savait rien… lui fallait il un preuve de plus qu’il ne faisait que mentir ? Même là, alors qu’elle était démunie dans ses bras, il lui prouvait une fois de plus qu’elle ne pouvait pas se fier à lui.
La colère refit surface alors qu’il se disait capable de prendre une nouvelle balle pour elle… et une petite voix dans sa tête lui répétait “Menteur ! Menteur!”... cette petite voix qui ne la lâchait plus depuis sa virée avec Teshara, cette petite voix qui l’avait conduite ici ce matin.
Elle donna un coup violent pour briser la bouteille sur le sol et se retourna avec vivacité pour en plaquer le bord tranchant sur la gorge de Darren.
Il pouvait voir dans ses yeux, cette lueur qui confine à la folie, cette lumière sombre qu’on croise dans le regard de ceux qui sont prêt à tout sacrifier parce qu'ils sont convaincu qu’ils ont tout perdu.
« Non, je ne suis pas Esfir Lunienko ! Ce nom, ce prénom...ils me l’ont donné quand ils m’ont amené en Russie… Je ne sais pas qui je suis… alors ne prétend pas savoir ! Tu veux prendre une balle pour moi ? Pour tout arranger ? »
Elle avait le regard mauvais et pressa la pointe de verre sur sa peau.
« Tu ne peux rien faire ! Rien, contre une vie volée ! »
Elle retira son arme aussi vite qu’elle l’avait mise sur sa proie, pour venir la coller sur sa propre carotide.
« Ils m’ont tout pris, ils ont fait de moi leur jouet...tous autant qu’ils sont… Je ne suis plus rien maintenant… a quoi sert une marionnette dont les fils sont tombés ? »
La petite voix lui disait d’appuyer, de couper la chair… mais une petite part d’elle voulait que quelqu’un la ramène et retenait son geste.

Esfir lui offrait des montagnes russes émotionnelles.
Le coup du tesson de bouteille, il ne l’avait vraiment pas vu venir. Darren savait qu’elle était alcoolisée, et peut-être droguée, mais il n’avait pas songé un instant faire face à un tel revirement. Qu’elle puisse pleurer dans ses bras et le menacer de mort l’instant d’après. La fille rigolote qui avait eu le courage des missions extérieures prenaient des airs démoniaques maintenant. Par réflexe, Clive avait eu le temps d’empoigner le pistolet neutralisant Wraith à son holster de cuisse. Mais il ne l’avait pas sorti, craignant que le simple geste ne marque la fin de sa vie.
Voir sa vie suspendue au fil tranchant d’un bout de verre à l’odeur de Vodka le terrifia. Le soldat n’entendit que quelques bribes des propos d’Esfir. Il prenait conscience qu’il avait peur, il pensait à sa compagne et se faisait la liste de toutes les choses qu’il aurait voulu faire avant d’y passer. Drôle de réaction, d’autant plus qu’il espérait de tout coeur qu’Esfir ne devine pas miraculeusement ses pensées pour la concurrence.

Lyanna était dans son lit, au casernement du D4.
Elle allait ouvrir les yeux, être mécontente qu’il ne soit pas là, et débuter sa journée habituelle sans savoir qu’il gisait à l’autre bout de la cité, la gorge tranchée. C’est un membre du D4 qui allait venir lui apprendre l’horrible nouvelle. Et puisqu’elle allait piquer une crise de nerfs, ce serait une femme qui ferait ce sale boulot...April donc.

La pointe du tesson le quitta. Darren reprit enfin sa respiration, après un moment qui lui semblait avoir été une éternité, mais ça ne s’arrêta pas là. Maintenant, son amie menaçait sa propre gorge et elle était si agitée qu’elle avait déjà dû s’entamer la peau. Il fallait agir vite. Elle continuait de parler comme une dingue, à croire qu’on lui avait fait un lavage de cerveau. Il ne comprenait strictement rien de ce qu’elle racontait.

Assez. C’en était assez.
Son caractère professionnel le guidait et, heureusement, il était également formé à ce genre de situation. Il ne fallait pas avoir peur de sortir les moyens quand un client perdait pied. Protéger, c’était son métier. Si Esfir était sa propre ennemie, il la neutraliserait. Donc, au beau milieu d’une phrase, il tira son blaster Wraith et lui envoya une décharge en pleine poitrine. La pauvre Russe s’effondra brutalement sur le sol dur et humide de la digue. Il se pencha tout de suite au-dessus d’elle après avoir chassé cette saloperie d’arme de fortune et guetta son souffle. Elle respirait. Malgré cette entaille sanguinolente, elle respirait...

La situation étant maîtrisée, la pression redescendit brusquement.
Clive sentit ses jambes trembler et il se laissa tomber aux côtés de son amie, indifférent au mauvais temps qui continuait de les harceler. Toutes ces émotions remontèrent en lui et il profita de l’absence de public, de l’humidité ambiante, pour extérioriser tout ça. Il chassa quelques larmes en se demandant comment tout avait pu déraper comme ça. Comment Esfir Lunienko, qu’il appréciait beaucoup, avait pu s’effondrer si vite et de façon si extrême. Qui était l’ordure qui avait osé faire ça ?

Le soldat ne s’accorda qu’une petite minute. Il prit Esfir dans ses bras et la porta en direction de la cité. La miss était un poids plume anémié qui s’était privé de repas depuis un certain temps, Darren n’eut pas trop de mal à la ramener à ses quartiers. Il galéra un peu pour lui faire passer la main devant le détecteur puis il découvrit soudainement l’immonde chantier qui régnait à l’intérieur.

C’était sombre.
Ca sentait...l’alcool.
Ca sentait...le sexe.
La débauche, la déchéance.
Mais surtout...la détresse.
Clive sonda un instant l’endroit, découvrant tous les indices de la destruction d’Esfir. Il comprenait un peu mieux pourquoi elle avait piqué une telle crise et pourquoi elle était si peu effrayée à l’idée d’en finir. La chambre d’un dépressif était mieux entretenue et moins gorgés de signaux d’alertes.
Darren écarta les draps dégueu d’un coup de rangers puis déposa la jeune Russe sur son lit. Il se redressa ensuite à la recherche d’une fenêtre. Objectif un : Rejeter l’air vicié.

Il ne faisait pas beau dehors mais ça ferait l’affaire.
Tandis qu’il programmait l’ouverture du panneau en essayant d’épargner Esfir du courant d’air, sa radio s’activa soudainement.

//PN-14, nous n’avons pas reçu votre rapport. Tout se passe bien ?//
//Ici 14, tout baigne. Juste une fille un peu éméchée. Je l’escorte jusqu’à ses quartiers et je vérifie que tout va bien.//
//PN-14, ne prenez pas de risques. Envoyez là à l’infirmerie sans délai.//
//Ici 14, bien reçu.//
Il attendit d’entendre le clic témoin de la fermeture du canal pour ajouter, avec une petite aigreur :
« Comptez là dessus ! »

L’infirmerie était un choix idéal et professionnel. Sauf qu’on parlait d’Esfir, c’était son amie et il savait qu’elle serait encore plus mal en se réveillant dans le mauvais lit.
En cherchant à retirer tout ce qui pourrait servir d’arme, le militaire s’arrêta devant sa coiffeuse, intrigué par la découverte.
On avait accroché un fringue pour en recouvrir le miroir. C’était trop bien positionné, trop recherché, pour que ce soit accidentel. Esfir avait recouvert son miroir parce qu’elle supportait plus de se voir en face ?!?
Le soldat regarda dans sa direction, angoissé. Mais qu’est-ce qu’il s’était passé pour qu’elle souffre à ce point ?

Il s’approcha d’elle et hésita longuement. Elle était à moitié trempée, dans un état déplorable. S’il ne l’emmenait pas à l’infirmerie, c’était à lui de faire le nécessaire. Il ne pouvait pas la laisser comme ça...
Doucement, il s’agenouilla à ses côtés puis agrippa la bretelle de sa robe pour lui défaire une épaule. Il n’alla pas plus loin, se redressant vivement pour s’éloigner dans la chambre.

« Darren, bordel ! Qu’est ce que tu fous !!! »

C’était la merde !
Il ne pouvait pas la laisser dans cette tenue. Mais d’un autre côté, comment allait-elle réagir au réveil ? Allez, courage…fais fonctionner ta tête, Darren.

Dès que ça fit tilt, le soldat s’élança sur les tiroirs et les portes d’armoire qu’il fouilla sans gêne. Il commença par dégoter une nouvelle couverture qu’il se mettait de côté et une tenue qui s’enfilait facilement. Il ne savait pas bien si c’était un pyjama ou un habit pour la détente mais, dans ces circonstances, ça ferait parfaitement l’affaire. Le soldat décida de se fermer et d’agir comme il l’aurait fait pendant une mission d’escorte. Problème, le client était une amie en pleine détresse et, si Lyanna l’apprenait, il se ferait castrer.
« Qu’est ce que c’est chiant, une gonzesse, quand même ! » râla-t-il faussement avant de s’activer.

Il recouvrit la Russe du drap dégueulasse et se servit du sens du toucher la dépouiller de ses fringues. Il fit son maximum pour essayer de respecter son intimité tout en lui retirant l’ensemble de ses affaires. A première vue, elle s’était apprêtée pour faire la fête et ça n’avait pas l’air de s’être bien terminé. Darren poursuivit son petit exercice à l’aveuglette. Le bas de la tenue détente passa sans problème. Mais la suite se révéla beaucoup plus compliquée. Il ne pouvait pas lui faire passer un t-shirt sans la remuer de tous côtés. Il dégota donc une chemise dans les armoires, visant la plus ample, et se démena pour l’habiller avec le moins de manoeuvre possible. S’il était tout transpirant à la fin de ce boulot, il apprécia tout de même la nouvelle atmosphère dans la pièce. Il faisait plus frais, ça sentait de moins en moins le renfermé.

Bon, c’était une bonne chose de faite.
Objectif deux : recouvrir Esfir de la nouvelle couverture puis chasse aux armes de fortune.

L’endroit mériterait un sacré coup de ménage et il se promit d’y prendre le temps. Esfir allait dormir encore un petit moment, le neutraliseur Wraith n’avait pas été conçu pour être doux avec les victimes. Darren sillonna longuement les quartiers de la jeune femme en repoussant les affaires dangereuses, ou qui pouvait l’être, plus loin.

Objectif trois : combattre l’état dépressif.

S’il tenait à la repêcher, il fallait un environnement sain.
Darren quitta ses quartiers tout en pensant à emportant un “bip”, la variante Atlante d’une permission d’accès aux quartiers, puis il se rendit au mess pour faire le plein. Ce petit écart qu’il mis entre eux deux lui permit de souffler. Darren songea de nouveau à tout ce qu’il s’était passé et essaya de se rassurer. Esfir n’était pas morte, il l’en avait empêcher. Maintenant, il ferait le nécessaire pour qu’elle aille mieux.

Pendant les emplettes, Darren appela sa compagne et essaya de lui expliquer son absence sans lui mentir. Dur quand on peut faire face à la jalousie. Le soldat se montra avare en détail mais promis de tout lui expliquer une fois de retour.

Darren revint dans les quartiers mais il n’entra pas tout de suite. Il resta planté là, se demandant encore s’il allait réussir, puis se décida finalement. Sale journée en perspective. Esfir n’allait pas se lever avec la banane, au contraire. Darren profita du sommeil forcé de cette dernière pour faire un coup de ménage dans ses quartiers. Il rendit l’endroit plus sain, oxygéné, lumineux. Il hésitait à retirer le fringue le miroir de la coiffeuse lorsqu’il entendit Esfir s’agiter un peu. Elle faisait surface.
Doucement, Darren tira le siège pour s’installer à ses côtés. Il l’observa pendant tandis qu’elle reprenait conscience, qu’elle captait progressivement les repères de sa chambre. Enfin, quand elle croisa son regard, il acquiesça de la tête d’une façon bienveillante sans dire un mot.

Il attendait de voir si elle allait garder son calme ou pas.

Les paupières de la russe papillonèrent, elle reprenait doucement conscience et il fallut un temps infini à son cerveau pour recoller les morceaux. Elle essaya de parler mais sa langue était pâteuse et elle avait une sensation désagréable dans tout le corps. Elle saliva pour réhydrater sa bouche et réussir à émettre quelques sons.
« Je suis où ? »
Les battements de son coeur accélérèrent en découvrant un plafond blanc au dessus de sa tête. L’infirmerie ? Non...non… tout mais pas ça ! Elle se redressa brusquement, la panique commençant à la gagner. Puis elle reconnut quelques éléments familier, son lit, ses affaires… sa chambre, bien qu’elle n’était pas dans l’état qui était devenu habituel ces derniers mois.
Elle remarqua enfin la présence de Darren, assis près d’elle, il hocha la tête avec bienveillance n'obtenant de la jeune femme aucune vraie réaction.

La dernière fois qu’elle avait été consciente, son but était de mourir, de mettre fin à ce calvaire, alors ce réveil était comme une illusion, comme un avenir qui n’aurait pas dû être et il fallut un long moment à son esprit pour accepter le fait d’être encore en vie.
Elle finit de se redresser et s’assis en travers de son lit, le dos contre le mur, les genoux repliés contre elle.
Quelque chose la chatouilla dans le cou, elle y porta machinalement la main et sentit quelque chose de poisseux, lorsqu’elle ramena ses doigts sous ses yeux, elle reconnut la couleur du sang, et tout lui revint pas bribes désordonnées. Elle passa de ses doigts rougis à son corps, ses vêtements partiellement cachés sous la couverture.
« Qu’est ce que tu m’as fait ? » demanda-t’elle en fronçant les sourcils. « Tu t’es bien rincé l’oeil j’espère » ajouta t’elle par pure provocation.

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Mar 23 Mar - 17:00

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Ce que tu crois être la mort, C'est une saison et rien de plus, Un jour lassé de cette errance, Tu t'en iras quelle importance, Car la Terre tournera encore, Même quand nous serons mort.
Requiem for a past
TEMOINS PRESENT
Esfir Lunienko
&
Darren Clive



« Tu allais mal. »
Darren n’avait pas envie de galérer à s’expliquer. Il aurait pu lui dire qu’il avait fait son maximum pour respecter son intimité. Qu’elle savait bien qu’il n’était pas le pervers que sa remarque semblait dépeindre. Que s’il ne voulait pas la déposer à l’infirmerie, alors il était contraint de ne pas lui laisser ces fringues trempés lui offrir un bon rhume ou une pneumonie. Mais merde à la fin, non seulement il ne se sentait pas obligé de se justifier, mais c’était surtout à Esfir de lui en donner pour avoir voulu mettre fin à ses jours.

Darren la sonda quelques secondes de plus. Il avait perdu confiance en elle, temporairement. Sa main droite restait enroulée autour de la crosse du neutraliseur Wraith tandis qu’il lui parlait. Il n’avait pas envie de se retrouver une nouvelle fois avec un tesson de bouteille sous le cou. Surtout qu’elle savait viser, la mécanicienne, on lui avait bien appris l’emplacement de la carotide.

Esfir leva les yeux au ciel, les sourcils froncés. "Elle allait mal".. évidemment qu'elle allait mal ! Il l'avait privée d'un final simple et sans accroc. Un départ en toute simplicité... personne ne se serait rendu compte de rien. Personne ne s'en serait inquiété, le monde tournerait mieux et elle n'aurait plus à fuir cette sensation de vide qui creusait son estomac et lui faisait fuir les ombres qui peuplaient ses cauchemars.

Clive se leva pour aller en direction de son bureau. Il avait dégagé un espace suffisant pour y laisser le plateau avec le petit déj. Le jus d’orange n’était plus aussi frais mais ça ferait l’affaire. Son amie devait reprendre des forces. Le simple fait de boire et manger quelque chose de nourrissant commencerait par lui donner meilleure mine. Et probablement un brin de moral positif.
« Tes extrémités sont ankylosées, c’est normal. » lui expliqua-t-il en revenant avec le verre de jus d’orange. « C’est l’effet du neutralisant Wraith. Ca devrait s’en aller dans la demi-heure. »
Elle allait forcément comprendre qu’il lui avait tiré dessus. Darren n’en faisait pas grand cas, il lui tendit le verre pour qu’elle le prenne. Restant quelque peu méfiant quant à ses réactions.
« Ca va te faire du bien... » fît-il avec un air qu’il espérait rassurant.

Esfir prit le verre même si elle n'avait aucun doute sur le fait que ce breuvage ne lui apporterait aucun réconfort.
Elle en pris une gorgée qui vint soulager biologiquement la déshydratation dont elle souffrait mais elle ne ressentit pas consciemment cette amélioration de son état. Son esprit était bien trop profondément enfoncé dans son mal être général.
Elle observa le soldat quelques secondes supplémentaires avant de lui adresser à nouveau la parole.
Il gardait son arme près de lui. Cet enfoiré avait osé tirer sur elle… c'est tout ce qu'il avait trouvé pour lui sauver la vie ? Pour l'obliger à devoir survivre à son enfer personnel.

« Pourquoi tu m'as pas laissé finir le travail ? »
Sa voix restait accusatrice même si elle n'avait plus autant de force que sur la digue.
« Tu n'avais pas le droit de choisir pour moi. »
Mais après tout, pourquoi s'en serait il privé ? Tout le monde avait décidé pour elle toute sa vie...alors pourquoi pas lui aussi.
« Ca va te surprendre... » se moqua-t-il en s’installant de nouveau sur son siège, indifférent à cette haine. « ...mais c’est ce que font les amis. Les vrais en tout cas. Ils empêchent leurs proches de faire des conneries. »

Il croisa les bras sur sa poitrine tout en la sondant.
Darren ne savait pas vraiment comment négocier ça. Il réclamait beaucoup de réponses. La raison d’une chute aussi brutale pour commencer. Pourquoi il avait retrouvé des photos déchirées sur le sol de sa personne en compagnie d’un vieil officier Russe. Et pourquoi elle n’arrivait plus à se regarder dans un miroir.

« Un vrai pote, ça ne t’en veux pas de lui racler la gorge avec un tesson de bouteille. Il se sera rappelé que tu as la trouille des hôpitaux. Il t’emmènerai discrétos dans tes quartiers, le temps que tu te remettes. Puis il te couvrirai pour que tu ne finisses pas dans un habit blanc à bouffer des cachetons, parler de ta vie à un vieux con qui a la calvitie et la transpiration forte. »

Il lui offrit un petit sourire, mi sérieux, mi moqueur.

« Je ne te laisse pas le choix que de vivre, Esfir Lunienko. C’est pas plus compliqué que ça. Tu vas surmonter ton drame, quitte à ce que je te botte le cul. Tu as encore des choses à faire dans ce monde, il y a encore des gens pour qui tu comptes. »

La jeune femme avait froncé le nez en entendant le militaire prononcer à nouveau son prénom et son nom. Son regard était baissé sur le verre de jus d’orange qu’elle faisait tourner entre ses mains, juste parce qu'elle ne savait pas quoi faire d’autre.
Dans son esprit, cette temporalité n’aurait pas dû exister, elle s’était décidée, elle n’avait pas agit sur un coup de tête. Elle y avait pensé, repensé et même si le choix de l’instant c’était fait d’un seul coup, l’acte lui était bel et bien prémédité.
« Des gens pour qui je compte ? Et où ils étaient ces gens quand on m’a arrêtée ? Quand on a démoli qui j’étais...qui je croyais être ? »
Son regard ne déviait pas du jus d’orange au milieu duquel se dessinait un petit tourbillon hypnotisant.
« Personne n’en a rien eu à foutre de soutenir la sale petite traître de ruskov… les seuls qui étaient là voulaient juste baiser. »
Son esprit était bien trop embrumé pour reconnaître la mauvaise foie de ses propos. Certains l’avaient approché à l’époque, mais trop choquée par ce qu’elle avait appris, trop plongé dans sa déprime, la drogue, l’alcool et la dépression l’ayant rendue trop égoïste et égocentrique pour voir les mains qu’on lui tendait. Elle ne s’était alors saisit que de celles qui lui promettait l’oubli, aussi éphémère fut il.

« Ouais. Ben moi, je suis rien de tout ça ! » déclara-t-il en quittant sa chaise.
« Je suis le vrai pote qui n’a pas envie de te baiser et qui te soutient à fond, traître ou pas. Donc ! »
Oui ça je sais que t’as jamais eu envie de moi. » chuchota t’elle à l’intention du fond de jus d’orange qui avait cessé de danser dans son verre.
Darren n’avait pas entendu. Il claqua dans ses mains.
« Ce que je te propose : tu vas te prendre une douche. Tu te laves les dents. Et je t’emmène manger au restau de la cité. On passe un moment entre potes où tu pourras me raconter tout ce que j’ai manqué. Ensuite, on lance l’opération de bataille ultime ! J’ai nommé “Bataille pour l’amie qui n’aime plus qu’on l’appelle Esfir !” »
Il lui tendit la main pour l’arracher vigoureusement du lit.
« Partante, “patronne” ? »

Elle releva la tête vers Darren, les sourcils à nouveau froncé.
Tu te fous de ma gueule Darren ? Un restau et ça repars ? »
sa main se serra sur le verre.
Un pote pour qui je comptes… qui me soutient quoiqu’il arrive ? Mais qui n’est au courant de rien de ce qui s’est passé ces derniers mois ? »
« C’est bien défini. » expliqua Darren en laissant retomber sa main tendue. « De toute façon, tu n’as pas beaucoup de choix. Soit tu me parles et on trouve une solution. Soit tu continues de me juger, là dans ton lit, et tu n’iras pas mieux. »
Esfir le dévisagea quelques instant hésitante sur la réponse à lui donner. Elle avait envi de lui balancer son fond de jus d’orange à la tête, de le rouer de coups comme elle l'avait fait sur Teshara, juste pour se venger de se sentir si seule. Et une autre petite part d’elle, une part de son esprit qui s’était faite de plus en plus discrète ces dernières semaine, au point que la technicienne l’avait cru totalement disparue. Cette petite voix qui voulait retrouver sa vie d’avant, aussi fausse fût elle.
Troisième choix, tu me laisses tranquillement retourner sur la digue. »

Darren eut un regard peiné.
Il considéra son amie en se demandant pourquoi elle insistait à ce point pour en finir, surtout en restant aussi calme. Il finit par secouer négativement la tête.
« Ce n’est pas une option. » avoua-t-il.
Le jeune homme se mit à réfléchir. Il lui partagea son idée. Ou plutôt un mensonge visant à en savoir plus.
« Le restau, la discussion Et si je n’arrive toujours pas à te convaincre...alors...je t’aiderai. »
Il grimaça.
« Autant s’en aller après avoir mangé ton plat préféré, non ? Comme un repas de condamné ? »

La jeune femme l’observa pendant plusieurs secondes encore incertaine.
Le resto sert des petits déjeuner ? Et tu sais ce que tout le monde va se dire en me voyant avec toi ? Tu sais quels bruits viendront aux oreilles de ta dulcinée ? » a bien retourner l’idée dans sa tête, voilà qui ferait une belle petite vengeance contre cet homme qui avait repoussé ses avances tout en la complimentant, qui n’était pas revenu vers elle quand il avait été libre, qui avait promis de la protéger… mais qui n’avait pas été là au moment où elle en aurait eut le plus besoin.
« Ma dulcinée s’appelle Lyanna. C’est quelqu’un de bien, elle comprendra pourquoi j’ai déjeuné avec toi. » répliqua Darren sans prendre de gants. « Quant aux autres, je m’en tamponne royalement. Si je m’intéressais aux jugements qui me concernaient, je finirai en taule pour en avoir flingué un. »
Il avait avancé la dernière phrase avec un manque de subtilité délibéré, histoire de l’inviter à faire pareil : ne pas prendre en compte le jugement des autres.

(c) princessecapricieuse

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Mar 23 Mar - 18:24

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Ce que tu crois être la mort, C'est une saison et rien de plus, Un jour lassé de cette errance, Tu t'en iras quelle importance, Car la Terre tournera encore, Même quand nous serons mort.
Requiem for a past
TEMOINS PRESENT
Esfir Lunienko
&
Darren Clive



La technicienne se leva enfin de son lit, y abandonnant son verre et en laissant la couverture glisser à ses pieds sans se soucier du désordre engendré.
Elle lui adressa un sourire énigmatique et lâcha sur un ton acide ces quelques mots tout en se dirigeant vers la salle de bain.
Une fille bien… c’est sans doute pour ça qu’ils l’appellent tous la sorcière.. »

Clive n’avait pas senti le coup venir.
Forcément, puisqu’il tenait à sa compagne, il ouvrit la bouche pour la défendre et expliquer d’où ce surnom futile lui venait. Mais c’était manifestement inutile, le pic était gratuit, mesquin, simplement parce que c’est elle qui avait remporté la mise. Clive ne pouvait pas lui reprocher sa jalousie, ça faisait un moment qu’elle lui courrait après. Comme elle l’avait dit, le fait de ne pas s’être promis puis attaché, c’était vécu comme une trahison. Elle avait beau être éméchée et suicidaire, ça n’enlevait rien de la véracité de ces propos.
Quand elle disparut dans l’autre pièce, Darren ramassa la couverture et refit tranquillement le lit. Déformation professionnelle oblige, il le pliait au carré tout en espérant que son amie n’aurait pas dans l’idée de briser un miroir pour s’ouvrir les veines. Il s’écarta ensuite pour gagner un peu d’intimité et appeler l’élue de son coeur. Darren ne lui parlait pas du resto, il lui apprit simplement que son absence serait un peu plus longue que prévu.
Il contacta ensuite sa hiérarchie.
\\Ici PN-14. Le passage à l’infirmerie n’a pas été nécessaire. Tout est en ordre. Permission de quitter le poste immédiatement ?\\
\\Accordé, quatorze. Vous rédigerez votre rapport à votre prochaine garde. Terminé.\\
\\Recu. Terminé.\\

Le soldat soupira.
Devant un tel chantier, au lieu d’attendre bêtement à ne rien faire, il préféra poursuivre le brin de ménage dans la chambre de son amie. Il récupéra les quelques photos qui avaient été déchirées puis les glissa dans la poche de sa veste. Maintenant que la chambre prenait un peu plus l’image de ce que l’on en attendait, il se posta à l’entrée puis attendit patiemment.

Comme à son habitude ces derniers temps, Esfir pris une douche des plus rapide et ne pris pas le temps de vérifier dans le miroir badigeonné de rouge à lèvres si son allure était correcte ou non.
Elle se passa de l’eau froide sur le visage, se brossa les dents puis revint dans la chambre dans son plus simple appareil pour récupérer ses vêtements et sous vêtements plus appropriés. Un jean, un t-shirt propre et hop. Elle se fichait éperdument de savoir que Darren était là, qu’il pouvait la voir… de toute façon près de la moitié de la Cité l’avait déjà vu comme ça alors qu’importait d’en ajouter un de plus. Et puis, si cela le mettait mal à l’aise, ça lui ferait payer d’avoir osé lui tirer dessus un peu plus tôt.

Dès que le soldat avait perçu cette silhouette trop claire pour porter des vêtements, il avait eu ce coup d’oeil dans sa direction avant de se retourner vivement, les bras croisés. Darren secoua la tête, demeurant silencieux, mais comprenant bien la petite vengeance. Dans cet état, si on mettait de côté son engagement envers Lyanna, ce n’était pas une Russe anémiée, blanche comme un linge, qui allait le séduire de son image. Mais cette attitude contribuait à l’inquiétude qu’il avait à son égard. Ca ne ressemblait pas à la Russe rigolote et pleine de vie qu’il avait côtoyé autrefois.

Une fois habillée, les cheveux encore mouillés dégoulinant dans son dos, Esfir s’avança jusqu’à la porte.
« On y va ..mon pote... » le dernier mot sonnait bien plus comme une attaque que comme une invitation, mais quitte à devoir subir ce petit jeu en attendant de pouvoir en finir pour de bon, autant se dépêcher.
« On fait un crochet à l’armurerie avant. Il faut que je rende mon matériel. »
Un quart d’heure plus tard, le serveur les installait dans un coin tranquille, comme l’avait demandé Darren. Le type avait tiré la chaise pour qu’Esfir s’y installe mais il ne la rapprocha pas. Le regard qui s’était posé sur elle trahissait les fameux jugements dont elle lui avait parlé. Et si un simple serveur savait...le reste de la Cité s’était effectivement fait plaisir sur les potins.
« La carte est en option ? » le rappela Darren, la voix un peu plus rude.

Le serveur s’éloigna d’eux.
Clive réagissait différemment généralement. Il tournait ça à la dérision, il blaguait. Mais dans l’état actuel des choses, il préférait montrer un peu de zèle protecteur envers son amie plutôt que faire le clown. Le soldat la regardait alors, le visage grave, comme s’il l’invitait à commencer son récit.

« Qu’est ce qui t’a fait perdre le sourire ? » lui demanda-t-il dans un double sens.

Le petit jeu du serveur, c’était devenu une habitude qui ne lui décrochait qu’un rictus amer. Quelques mois plus tôt, elle avait fichu son poing dans la figure du barman pour ce genre de comportement, mais aujourd’hui, cela ne la touchait plus … ou plutôt, il ne restait plus assez d’innocence et de positivité en elle pour être blessée.
« Tu veux que je commence par quoi ? Le récit d’une trahison ? La démolition en bonne et due forme de toute une vie ? Le piétinement d’une identité… ou tu préfères sauter directement à la déchéance de la petite russe ? »
Elle se pencha vers lui l’air de vouloir conspirer, tout en gardant ce petit sourire limite moqueur sur les lèvres.
« Je te conseille la dernière partie, qui est bien plus croustillante.. »
« Je veux tout savoir. Depuis le moment où on s’est perdu de vue jusqu’à maintenant. » réclama-t-il sur le même ton de conspiration. « Moi j’ai toute la journée. Et toi tu me consacres du temps pour la toute dernière fois. Pour me faire payer, c’est tout bénef ! »
Malheureusement, le serveur posa les cartes juste avant. Il essayait de se donner une contenance mais, visiblement, ça lui arrachait les dents de devoir les servir.
« Un café, s’il vous plaît. Et toi ? »
« Un brunch complet… c’est lui qui paye. » commanda-t’elle sans un regard pour le serveur. Sans se soucier de vérifier si le serveur était encore à portée d’oreille ou non, elle répondit à Darren.
« Ca va être long tu sais… ça risque de prendre la journée et la nuit. », elle lui parlait toujours avec ce sourire en coin, gardant toutes ses petites mimiques habituelles mais enlaidies par son ton narquois et l’aigreur qui pointait dans sa voix.
« Parfait ! On reste jusqu’à l’aube. Niquel pour emmerder le serveur qui devra rester jusqu’au départ de sa clientèle tant estimée ! » blagua Darren en faisant fi du ton de son amie.
« Oh lui, il n’a pas apprécié que je dises à tout le monde où il aime qu’on lui mette le doigt… t’embêtes pas pour lui.. » A vrai dire, elle ne savait plus trop si c’était lui ou un autre gars de la Cité, mais bien que l’anecdote soit vraie, elle ne cherchait qu’à choquer celui qu’elle avait en face d’elle. Elle se redressa avant de continuer sur un ton faussement détaché.
« Commençons par le début. Tu as face à toi, une sale petite traître russe. Une voleuse de babiole, une vendeuse d’informations, une traitre de la pire espèce. Caldwell s’en est donné à coeur joie. »
Darren ne réagit pas dans un premier temps. Il encaissait un peu la nouvelle en organisant ses idées. Ce n’était pas le moment de sortir l’élégant et subtil “Heinnn ?” avec un regard de boeuf. Il se fît violence pour étudier la situation, comme il l’avait toujours fait. C’était sa petite astuce, ce qui le démarquait des autres. Regarder le comportement, comprendre, réagir en conséquence. Ce qu’on lui avait appris pour sa spécialité, en fin de compte, il s’en servait tous les jours.
La façon dont son amie annonçait ça l’intriguait un peu. Elle n’était pas effondrée, elle était directe. Mais la façon très négative de le présenter, c’était le signe qu’elle n’acceptait pas ce rôle selon lui.
« Caldwell te voit et te présente comme une traître...voleuse et informatrice. Ok. » répéta Darren.
Et là où il espérait mettre le doigt sur quelque chose, c’était sur sa question suivante :
« Mais toi...tu le vois comment ? »

« Moi ? Oh, j’ai juste été la plus conne des petites russe. La petite poupée avec de longues ficelles avec lesquelles jouer. J’ai volé, c’est vrai… j’ai dit des trucs que j’aurais peut être pas dû dire..j’en sais rien moi avec vos conneries d’accréditation… On m’a envoyé ici dans un but que moi même je ne connaissais pas… Une pauvre petite conne.. n’est ce pas Garret ?» La dernière question s’adressait au serveur qui revenait déjà dans son dos avec la petite tasse de café commandée par le militaire.
Le soldat regarda le fameux Garret. Il ne savait pas qu’ils se connaissaient et, à vrai dire, il s’en fichait un peu. Esfir était en train de se confier et elle avait besoin de se vider les tripes. Ca se voyait, ça se sentait, c’était certain qu’elle n’avait même pas eu une épaule pour s’épancher.
« Merci Garret. » dit-il avec un sourire aimable tout en se laissant servir. Il exagéra légèrement son expression avant d’ajouter :
« Mais on va laisser ce cher monsieur dans son rôle sans le prendre à partie. »

Le type s’éloigna de nouveau. Darren reprit aussitôt :
« Si je te suis bien, tu es dépeintes comme une traître, tu es accusée pour ça. Mais on dirait bien que c’est toi qui a été trahie. »
Il chercha à soutenir son regard.
« Qui t’a fait ça ? »
Esfir laissa partir le serveur en lui décochant un petit baiser moqueur, puis revint vers Darren qui retournait à leur principal sujet de conversation.
« Mon parrain...enfin mon tuteur...cette enflure de Général Chekov… mais ça Caldwell le sait, Steele aussi… ils le savent tous maintenant. »
Machinalement, le soldat avait ramené sa main sur la poche de sa veste. Il baissa la fermeture, pris les deux morceaux de la photo pour les regarder. Il posa celui de l’officier russe grisonnant sur la table et le poussa dans sa direction.
« Ce type là ? C’était un père pour toi, c’est ça ? »

Esfir se saisit de la photo et en fit des confettis tout en répondant
«C’était mon tuteur. Il s’est occupé de moi après la mort de mes parents… enfin de mon père et celle que je prenais pour ma mère. Ils m’ont menti, tous autant qu’ils sont. »
Elle prit les confettis et les fit tomber en pluie sur le côté de la table où Darren était assis.
« Lui, il a prit soin de moi quand j’étais à l'hôpital et après, j’étais pourtant pas un cadeau… mais il a persévéré et j’avais fini par croire qu’il tenait à moi..vraiment. Mais maintenant, je dois bien admettre que le plan était admirable...un agent dormant, toute dévouée à son pays et son général...pauvre petit fille naïve...il était temps que je me réveille. »

(c) princessecapricieuse

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Mer 7 Avr - 21:25

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Esfir Lunienko
&
Darren Clive



Le soldat l’avait laissé faire sans chercher à retenir la photo. Il l’observait, l’écoutait tranquillement, tout en buvant parfois son café. Il jeta à peine un coup d’oeil en direction des confettis. Et une minute plus tard, il fût encore moins attentif à l’adresse de Garett qui revenait avec le brunch, contrarié à l’idée de les rembarquer.

Brunch:

Pendant qu’elle jouait avec sa nourriture plus qu’elle ne mangeait, Darren commençait doucement à saisir le tableau qui se dessinait même si beaucoup d’éléments manquaient. Par réflexe naturel, son air s’était légèrement assombri et un élan de compassion s’était peint sur son visage. Il lui aurait bien pressé l’épaule d’un geste amical pour lui dire à quel point il était désolé. Mais il savait que l’Esfir qui lui faisait face, mélange d’amertume et d’acidité, serait heureuse de l’envoyer paitre avec sa pitié.

« J’oserai dire que c’est un mal nécessaire. Si on t’avait laissé le choix, tu aurais vraiment préféré rester la marionnette d’un manipulateur ? »

Le visage de la russe se déforma alors qu’elle s'apprêtait à lui grogner dessus.

Il leva légèrement sa main pour réduire l’impact de ses propos.

« Je n’essaie pas de trouver “la” solution. C’est vrai que je serai bien incapable de savoir ce que tu ressens, se rendre compte que ses racines sont fausses et pourries mais...Esfir... »

Il grimaça, conscient qu’elle ne serait pas forcément ouverte à cette réalité.

« Tu es libre maintenant ! »
« Tu ne sais rien Darren Clive. Tu ne sais pas ce que c’est que d’aimer le souvenir d’une vie qui n’était pas réelle ? D’être nostalgique d’une époque où on se servait de toi… De haïr ceux qui t’ont ouvert les yeux… de rêver de revenir à cette époque bénie de la marionnette… et de te mépriser pour ça... » le rythme de ses paroles s’accélérait et sa voix devenait de plus en plus persiflante.

Darren l’observa longuement. Il ajouta à la suite, d’une voix plus compatissante.

« C’est horrible, je comprends. Et c’est va être encore plus dur de se reconstruire avec cette sale rumeur. Mais tu es toujours sur Atlantis, avec nous. On ne t’a pas viré. Tu es libre de prendre un nouveau départ, même s’il sera compliqué. »

Un rictus assassin lui répondit avant que ses mots ne le fassent.
« Oh oui ils m’ont gardé… ça leur a servit… et de toute façon je n’ai plus rien sur Terre… mais ne t’en félicite pas trop… ici non plus je n’ai plus rien.. ni personne. »
Elle se saisit d’une tranche de bacon, comme si elle allait croquer dedans pour mettre un point final à sa phrase, mais elle reprit d’un ton toujours aussi hargneux.
« Attends… je sais, tu vas me ressortir l’histoire du pote pour qui je compte, qui s’inquiète pour moi, en m’offrant un dernier repas en espérant me faire changer d’avis ?! FOUTAGE DE GUEULE DARREN CLIVE ! » lui lança-t’elle à la figure en même temps que son morceau de porc.

La tranche lui colla la face l’espace d’une seconde avant de glisser et de tomber dans son café. Un beau petit “plouf” qui envoya le reste du breuvage sur la table. A ce moment, son ressenti était exactement le même que celui du type qui a fait tomber sa tartine, laquelle s’est collée sur le carrelage dégueulasse côté confiture. Il en était d’autant plus blasé que son amie ne lui faisait pas de cadeau, elle s’amusait à déverser toute sa hargne et son venin. Elle lui reprochait de ne pas avoir été là ? Pourtant ça ne la gênait pas de le prendre pour un sac de frappe gratis.

Il ne fallait pas se leurrer. C’est la partie diabolique d’Esfir qui s’exprimait et elle savait frapper là où ça faisait mal. Darren crevait d’envie de tout envoyer balader.
Clairement, il avait envie de se lever, la féliciter pour rejeter aussi magnifiquement les mains tendues, puis la dénoncer son attitude suicidaire sans état d’âme. Elle finirait cloîtrée à l’infirmerie, avec le psy pour seule visite, et ce serait une vengeance sacrément bonne.

Clive savait pourtant que ce n’était pas l’attitude la plus logique.
La plus instinctive, menée par la colère et le sentiment d’injustice, qu’il regretterait fatalement après coup. Il essaya de chasser la pression que ce puit de haine lui faisait subir et écarta la tasse de sa table.

« C’est bon, du calme. » fit-il d’un air lassé. « Je ne me fous pas de toi. J’avais d’autres projets que de me prendre tes postillons dans la figure ce matin. »
Pour ne pas dire qu’à cette heure, il serait déjà sous les draps chaud d’une Amazone nue qui se serait naturellement pressée contre lui.

Elle le regarda l’air renfrogné, les bras croisé sur la poitrine.
« Je te retiens pas. »

Le problème, c’est qu’Esfir cherchait vraiment les embrouilles.
Peut-être qu’elle essayait de lui claquer la porte au nez pour se conforter dans cette idée à laquelle elle s’était investie. La mauvaise...celle qui lui faisait croire être seule, isolée et vulnérable. Il comprenait qu’elle soit en colère et complètement désorientée. Mais c’était très dur à tenir en terme de patience.

« Je te parlerai plutôt d’Eversman. »

Il retira la tranche de porc de son café puis en but le reste. Darren comptait sur le geste pour lui faire comprendre que ses assauts n’auraient pas raison de lui. Du moins, il voulait donner cette apparence, qu’elle comprenne qu’il ne lui ferait pas le plaisir de s’engueuler.

La russe haussa les sourcils incrédule.
« Qu’est ce que tu veux que j’en ai à foutre d’Eversman ! »
« Matt a rarement été un bon exemple. Mais question traîtrise et sentiment d’abandon, il n’a pas été épargné non plus ! »
A son tour de lui envoyer une petite boulette dans la face, histoire de répliquer.
« Hé oui. T’es pas la première à qui ça arrive ! »
Il se pencha dans sa direction, avalant quelques centimètres pour débuter son monologue.
« Durant la guerre du Boc, Matt a mal réagi. Il a agressé rien de moins qu’un agent de liaison qui permettait une alliance en pleine bataille. C’est sans oublier ses propos et le fait qu’il a mis du temps avant de se rendre. Donc...emprisonnement, jugement pour haute trahison, aller simple pour la gégéne de Caldwell ! »
Darren marqua une pause. Laissant le temps à ses mots de forcer l’indifférence d’Esfir et de s’insinuer dans son esprit. Il était certain qu’elle y verrait un parallèle avec sa situation, même si, contrairement à Matt, elle n’avait pas cherché les emmerdes.
« Un jour, ils ont réuni toute l’armée. Tout le contingent militaire, des bidasses jusqu’au gratin. Et ils ont fait d’Eversman un exemple. Pour trahison, ils l’ont dégradé en public ! Ils lui ont retiré ses insignes, même son blason de rangers qu’il aimait tant. Retour à simple soldat. Ca s’est répandu partout dans la cité. Il était vu comme LE traître, le mec qui avait failli saboter une alliance, et quasiment nous faire perdre la guerre. Paraît même que ça a été filmé. C’est pire que de se faire virer comme un malpropre, parce qu’il faut supporter le regard des autres. Et tu sais ce qu’il a fait, Matt ? »

Esfir se pencha de la même manière que Darren l’avait fait plus tôt, prenant de faux airs de conspirateur pour lui lâcher sèchement.
« J’ai un scoop pour toi… j’en ai rien à foutre. »
Clive renifla par élan de défi, la fixant dans les yeux. Il fit mine de ne pas l’avoir entendu et poursuivit sur sa lancée.
« Il est resté ! »
C’était manipulateur de sa part. Mais puisqu’elle-même ne le menageait pas, il en ferait de même.
« Son quotidien, c’était de se faire insulter, cracher dessus. Il trouvait des rats crevés dans son lit ou dans son casier. Ca se dépeuplait à chaque fois qu’il s’asseyait quelque part au mess. Mais c’est une putain de bique, il s’est accroché et il est resté. »
Clive haussa les épaules. Il fit signe au serveur pour commander autre chose. Il continua pendant son approche.
« Il bosse sur le Dédale maintenant, il est obligé de filer droit. Mais sa période la plus dure est passée. Le type a tenu bon et c’est de l’histoire ancienne. »
« Monsieur ? » demanda Garett.
« La tranche de lard n’a pas voulu se laisser manger. » ironisa Darren en pointant d’un doigt distrait le morceau imbibé de café. « Vous voulez bien en ramener pour la dame ? »

Elle allait la manger, sa tranche de lard !
Esfir se frotta les yeux comme un bébé dont elle imitait les pleurs geignards.
« Pauvre Eversman… pauvre petit Matt.... »
« Quelle actrice ! »
Elle se pencha de nouveau vers le soldat qui venait de commander une nouvelle tranche de lard. Sa main attrapa machinalement le couteau de table qu’elle serrait au point de blanchir les jointures de ses doigts.
Si elle voulait inquiéter Darren, elle mettait en plein dans le mille. Ils ne pouvaient donc pas faire deux pas sans qu’elle ne veuille le suriner ou s’ouvrir la gorge ?
Avec le souvenir des dernières heures encore trop imprégné dans son esprit, Clive sentit son corps se tendre et son instinct prendre le dessus. Il attendait un mauvais geste de sa part pour agir, qu’importe le jugement du public.
Mais au lieu de ça, elle se confia enfin un peu plus :
« Matt a déconné, il en a payé le prix. J’ai été manipulée, j’ai été trop gentille… on m’a foutu à la gueule que ce que je croyais être ma famille n’était qu’un ramassis de mensonge. »
Sa voix venimeuse, se cassait au fur et à mesure de ce speech qu’elle voulait narrer à la façon de Darren Clive.
« Et depuis mon quotidien… c’est être seule, laissée pour compte, me glisser dans le premier lit qui veut bien de moi histoire d’oublier, boire, fumer, baiser… juste pour oublier qu’on est rien… que là-dedans. » elle se tapota la poitrine de sa main libre « Il n’y a que du vide… un vide que j’ai essayé de combler de milles façons… et même des pires qui soient… Je n’avais plus de protecteur… plus personne et j’ai merdé… c’est enfoiré de Satan a pris mon âme et s’est torché le cul avec…. »
Au fur et à mesure, son visage se transformait sous une grimace de dégoût, ce dégoût qui devenait de plus en plus profond pour elle même.
« J’étais si seule que je me suis laissée entraînée par ce que cette Cité a apparemment connu de pire dans ses rangs… et j’ai aimé ça.... »

Darren ne bougeait. En statue d’effigie, il essayait de collecter les informations comme elles venaient. Avec toute cette colère et cette agressivité dirigée contre lui, ce n’était pas facile. Mais il notait mentalement ce qui avait été l’enfer de son amie ces derniers mois. Alcool, drogue, sexe, la totale...
Son visage était crispé et sur ses traits le dégoûts, le désespoir et la colère se disputaient. Elle finit par se lever tremblante.
« Y’a plus rien à sauver Darren. »
Sans chercher de réponse du soldat qui la toisait, elle lâcha le couteau par terre et quitta la salle de restaurant sous les regards inquisiteurs des autres clients.

Elle se tirait !!
Darren n’en revenait pas. Elle lui tournait le dos maintenant.
Et pour aller où ? Se jeter depuis une autre digue pendant que la mer était mauvaise ?

Forcé de réagir vite pour la garder en vue, le soldat ouvrit sa veste et déversa une poignée de billets sur la table sans vraiment compter. Il y en avait plus que nécessaire, c’était le plus important, et il se sauvait en direction de la russe tout en faisant un signe de main navré au serveur. Sur le moment, il se sentit avoir un petit sursaut d’égo en regrettant de devoir suivre Esfir comme un bon toutou. Il la trouvait odieuse et mesquine sur bien des réactions, celle-ci y compris. A l’entendre, par son absence, il était devenu responsable de tous les maux dont elle avait été accablée.
Problème, puisqu’elle n’était pas sous la garde des blouses blanches, il avait tout intérêt à la garder en vue maintenant.

« ESFIR ! »
Il la rattrapa rapidement et harponna son avant bras pour faire cesser sa fuite en avant.
« Tu veux savoir qui tu es ? Moi je vais te le dire ! »
Il la saisit par les épaules.
« Tu es une russe, que ça te plaise ou non. C’est ta culture et tu l’aimes. »
Il décomptait lentement.
« T’es aussi une mécano d’enfer. Ce savoir, ces capacités, tu ne les dois qu’à toi. Et toi seule ! »
Il l’empêchait de partir, pour l’écouter, pour intégrer ce qui n’était pas un mensonge.
« Tu es celle qui a désincarcéré un homme d’une jeep. Tu lui as permis de rentrer chez lui, de retrouver femme et enfants. Y’a celle que tu as sauvé de la noyade aussi, que tu as sortie du puit. Et je ne parle même pas de cette mission qu’on a faite tout les deux. Tu as été la liaison entre les Dorns et les Atlantes... »

Il agita un index inquisiteur sous son nez.

« Tout ça, c’est toi. Ce n’est ni un mensonge, ni grâce à ceux qui t’ont trahi. Tu ne dois tout ça qu’à toi et c’est ce qui te qualifie, c’est ce qui te fait exister. Tu t’es complètement laissé aller ? D’accord. C’est un passage à vide, tu voulais que ce soit une solution, c’est raté, c’est fait. Comme une ado qui a fait les quatre cents coups, mais c’est fini maintenant. »

Darren soupira, conscient qu’elle préférerait nier ces réalités et rester dans sa colère.
Après s’être reculé d’un pas, il la prévint d’un ton calme mais grave :

«Je te laisse pas le choix, Esfir Lunienko. Tu vas te battre pour tes acquis. Tu vas sortir la tête de l’eau, imposer le respect qu’on te doit. Tu vas te refaire une famille, des amis, une condition. Moi je dis qu’il reste encore beaucoup à sauver : c’est la meilleure partie de toi. Tu vas te battre. Ou bien je te fais enfermer chez les blouses blanches ! C’est clair ? »

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Mer 21 Avr - 10:23

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Ce que tu crois être la mort, C'est une saison et rien de plus, Un jour lassé de cette errance, Tu t'en iras quelle importance, Car la Terre tournera encore, Même quand nous serons mort.
Requiem for a past
TEMOINS PRESENT
Esfir Lunienko
&
Darren Clive



Darren put voir tout un panache d’émotions se dessiner sur le visage de la jeune femme, la colère d’abord, l’incompréhension lorsqu’il évoqua ces quelques actes héroïque qu’elle avait accompli en mission pour la cité, puis le désespoir revint peindre son visage de sillons creusés par les larmes qu’elle n’arrivaient plus à faire couler.
« Pas l'hôpital. » furent les seuls mots qu’elle parvint à prononcer.
Elle ne savait plus où elle en était. Elle lui avait vomit tout son mal être à la gueule, et il revenait la chercher, pointant du doigts les quelques détails de sa vie qui avaient peut être encore un peu de sens.
Mais ce n’était que des détails face à toute la merde qu’elle avait remué depuis. Les remarques de ses supérieurs, les missions qu’on ne lui confiait plus au départ au cas où elle serait encore une espionne… et ensuite parce qu'elle n’assurait tout simplement plus au boulot. Elle arrivait en retard ou trop défoncée pour faire son boulot correctement. On l’avait même retirée d’un projet scientifique pour la reléguer à de la maintenance basique.
Son corps s’amollit, tout comme sa hargne.
« Je t’ai dit Darren, y’a plus rien à sauver. Je ne sauve plus personne, je vole...j’ai même failli tuer… non j’ai même tuer encore une fois. »
« Et donc, tout doit s’arrêter comme ça, maintenant ? Ces “morts” n’auraient aucun sens ? »
« Elles n’en ont jamais eu. »
« C’est à toi de faire en sorte que ça le soit. Que ce soit pour te remonter, donner un sens à ta vie, ou même régler la note de ta culpabilité sans te mettre un couteau sous la gorge. C’est pas fini Esfir. T’es au fond du trou aujourd’hui. Il ne te reste plus qu’une chose à faire, c’est de remonter la pente. Ok ? »
Esfir le dévisagea, incrédule.
« Non mais non… tu te rends compte de ce que tu dis ? C’est injuste. Pourquoi la mort de quelqu’un devrait m’aider alors que j’en suis coupable ?. »
« Ok. Donc tu sautes à la mer et ton histoire s’arrête comme ça. Dans la déchéance. »
« Oui. »
Il secoua la tête. Il ne croyait pas vraiment à cet aveu. Soit c’était exagéré, soit le contexte lui échappait clairement. Mais le soldat ne voulait pas le prendre pour argent comptant.
« Tu es coupable, tu es une meurtrière ? Tu vas vivre avec ça toute ta vie. Un point, c’est tout. Et si tu veux commencer par te racheter, le premier pas, c’est de faire en sorte que leurs morts n’aient pas été vaine. »
« Mais… c’est quoi ton problème ? » le ton de la russe commençait à remonter. « Je te dis que j’ai tué quelqu’un et toi… tu me dis que c’est pas grave ? Mais merde Darren, tu devrais être en train de me passer les menottes et de me jeter en cellule ! »
« Sauf que c’est clairement ce que tu veux. Tu as été détruite, tu y réponds en continuant dans cette lancée. Et tu voudrais te faire trainer dans la boue jusqu’à ce qu’il reste plus rien de toi. »
Il claqua des bras.
« C’est balo, je t’ai vu en mission et je sais ce que tu vaut. Je sais qui tu es. Je ne te ferai pas ce plaisir, Esfir ! »
La gorge d’Esfir émit un bruit entre le grognement et la plainte, alors qu’elle regarda au plafond avant de redescendre son regard sur le soldat.
« Mais merde Clive ! Envoie moi en taule, fout moi une branlée j’en sais rien mais fais quelque chose ! je peux pas rester là comme ça » voilà qui ressemblait autant à un appel à l’aider qu'à un défi de la stopper.
« Tu veux agir, ça c’est parfait ! » répliqua-t-il. Il relança sur le même air de défi : « De toutes les choses les plus ignobles qui te viennent en tête. Laquelle tu veux régler. Ce crime ? »
La jeune femme balançait la tête, ne sachant quoi répondre. Il ne voulait pas lui donner la réponse qu’elle souhaitait et son corps comme son esprit manquait de repère. Cette discussion ne ressemblait à rien de toutes celles qu’elle avait eue depuis des semaines, elle avait oublié comment faire.
« Je peux plus les régler, ils sont morts. »
Darren lui pressa doucement une épaule.
« Tu te trompes. S’il y a une chose que je peux te garantir, c’est que la vérité libère d’un poids. On pourrait... »
Il soupira. Cette histoire de meurtre le mettait vraiment mal à l’aise.
« Écrire ça tous les deux. Préparer ta déposition. Quand, comment, avec quoi, pourquoi. Qui était là. Je t’accompagnerai voir la police militaire. Et on fera les choses bien. Si tu veux vraiment régler ce poids sur ta conscience, subir la prison et payer pour ça...c’est peut être une solution. Je t’aiderai et je serai avec toi tout du long. »
Il restait intimement persuadé, pour l’avoir connu en mission, que son amie s’attribuait l’horreur d’un crime qu’elle n’avait pas commis. Que si elle s’était trouvée en possession d’une arme et décisionnaire de la survie d’une victime, ce n’était pas elle qui aurait pressé la détente. Il tentait de la rapprocher doucement du chemin de la rédemption. Même si, clairement, il était loin d’être habile et fin diplomate sur ces sujets.

Esfir pinçait les lèvres, ce qu’il lui proposait elle y avait pensé, mais il lui faudrait mettre à nue tant de choses sur elle, sur tout ce qu’elle avait fait de honteux… il lui faudrait faire face à ce qu’elle était devenue et ça… elle n’y était pas prête. D’autant plus que son corps commençait à montrer les premiers signes de manque, ces signes qu’elle avait appris à reconnaître depuis le temps et même si la fatigue venait ajouter ses symptômes, elle savait très bien ce que son corps réclamait.
Et même si elle avait avoué à Darren son addiction sur le coup de la colère, elle n’était pas prête dans son état actuel à lui dire ouvertement qu’il lui faudrait une dose pour pouvoir affronter un tel projet. Il ne lui restait qu’une solution… la fuite… encore.
« Je… je ne sais pas… et même… même si je paye pour je sais plus son nom… je … ça ne me fera pas payer pour l’autre… pour mon bébé… alors ça sert à rien, y’a trop à faire pour que ça marche. »
« Heu...ton bébé ? » questionna-t-il, plutôt surpris.
Esfir détourna le regard en se demandant pourquoi elle avait parlé de ça… pointer un problème pour en faire oublier un autre… une bonne technique pour ne pas faire face et se laisser noyer et ainsi justifier de se perdre définitivement dans les profondeurs d’un océan déchaîné, sans doute.
« C’est dans mon sang de tuer tu vois… j’ai commencé à seize ans. »
Elle évita consciencieusement le regard du soldat.
« Ca ne sert à rien.. je vais y aller ce sera mieux pour tout le monde. »
« Ah ? Tu penses que je vais te laisser partir comme ça maintenant ?... »
Clive eut un air navré.
« Je suis franchement désolé, tu ne méritais pas de souffrir autant. Mais tu ne peux pas t’arrêter là. Il faut que tu te battes. »
Darren pinça des lèvres.
« On a plus de points en commun que tu le penses. Je suis passé par là aussi. Je m’en suis sorti. Je vais faire en sorte que tu y arrives. Ok ? »
Elle reposa enfin les yeux sur Darren, laissant pour la première fois son regard croiser le sien sans qu’il ne soit voilé par la colère. Ce qu’il pouvait y lire était à fendre le coeur, ce mélange de tristesse et de lassitude qu’on ne trouve que dans les yeux de ceux qui n’y croient plus.
« Je ne suis sans doute pas assez forte alors… Je croyais avoir surmonté ça, m’être reconstruite après la mort de mes parents et après avoir tué mon bébé… mais je n’ai rien construit du tout… c’est le général qui m’a modelé comme il voulait et puis même ma mère n’était pas ma mère… mon père...a… a très probablement tué ma vraie mère… je ne suis même pas sûre au final que c’était bien mon père… je ne sais pas Darren… mais je crois qu’il y a plus assez de chose dans cette coquille pour racheter quoique ce soit. »
« C’est ce que tu penses maintenant, au creux du désespoir. » lâcha-t-il de façon énigmatique.
Il se sépara de la jeune femme quelques secondes, marchant un peu dans le couloir comme s’il était pris d’une réflexion soudaine. Lorsqu’il se retourna, les poings sur les hanches, et le visage grave, il lui dit :
« Je te propose un pacte. »
Il la fixa longuement avant de lui expliquer.
« Accepte mon aide, Esfir. Laisse-moi t’aider à reconquérir ta place et ta vie ici. Fais moi confiance une dernière fois. Tu oublies les couteaux et les abords de digue pour te concentrer sur nos projets de rédemption. Tu fais ça... »
Il marqua une petite pause.
« Et on partira en Russie, tous les deux. Je suis garde du corps de profession. J’ai eu des clients aux quatre coins du monde. Je te protégerai du général, on enquêtera, et on trouvera la vérité. Qui tu es. Qui sont réellement tes parents. Ta véritable identité. Et pourquoi pas le vrai nom que tu portais avant d’être manipulée. »

Les tremblements gagnaient son corps de manière un peu plus marquées à mesure que son corps réclamait sa dose quotidienne et que son esprit luttait entre l’envie de s’endormir à jamais et cette petite étincelle de curiosité et d’espoir que le soldat agitait devant son nez.
« Ca changera quoi de savoir comment j’aurais dû m’appeler… et puis tout ça, c’est enfoncé bien profond dans les fichiers du KGB, je doute qu’on puisse y accéder facilement. »
« Tu souffres de l’identité qu’on t’a volé. Je te propose de le leur reprendre sous le nez. Le KGB ne peut pas tout cacher. »
Elle rassembla ses mains devant elle pour cacher les tressaillements dans ses doigts.
« Ecoute, je crois que je suis fatiguée et je dois aussi aller bosser. Je te promet d’y penser, ça ira ? »
« Non. Mon ultimatum est toujours valable, on commence demain. Je te veux fraîche, dispo, avec ta trousse à outil. Je passe te chercher à neuf heures, ça te va ?»
Un sourire désabusé précéda ces quelques mots qu’elle consentit plus pour se débarrasser du soldat que par profonde conviction « Demain à neuf heures. »
Elle ne savait pas encore si elle tiendrait parole ou non, mais la petite pointe de curiosité la titillerait assez pour l’éloigner de la digue au moins jusqu’au lendemain.


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Jeu 13 Mai - 15:20

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Ce que tu crois être la mort, C'est une saison et rien de plus, Un jour lassé de cette errance, Tu t'en iras quelle importance, Car la Terre tournera encore, Même quand nous serons mort.
Requiem for a past
TEMOINS PRESENT
Esfir Lunienko
&
Darren Clive



Plutôt satisfait, Darren acquiesça puis salua son amie d’un sourire.
Il se lançait dans un sacré chantier. La rédemption de Lunienko.
Le lendemain matin, comme convenu, il alla jusqu’aux quartiers de la technicienne où il passa la demi-heure à l’attendre. Le soldat passa par plusieurs états. La patience, en se disant qu’elle ne s’était pas encore réveillée. Le doute, lorsqu’il se demandait si elle ne gisait pas dans une marre de sang, les veines ouvertes. Puis la colère, en se disant qu’elle s’était parfaitement foutue de sa gueule pour avoir la paix.
Darren fulminait. Elle n’était pas là, elle se moquait de sa main tendue comme elle s’était moquée des autres. Dans un accès de rage, il eut envie de lui donner ce qu’elle demandait. Son fameux bain de boue. Dénoncer sa tentative de suicide aux toubibs. Dénoncer son aveu de meurtre à la police militaire. La laisse croupir en taule et ne plus en entendre parler, vexé qu’elle se soit moquée de lui.

Il lui fallut un sacré moment pour retrouver son calme et essayer de retrouver un esprit tactique. Elle s’était sauvée parce qu’elle avait peur que ça puisse marcher. Il ne voyait pas ce que ça pouvait être d’autre. Le soldat, avec son sac à dos et son aigreur, fit demi-tour pour aller contacter le pôle technique. Des collègues devaient bien savoir si elle bossait à cette heure et où elle était.

Lorsque Darren arriva auprès des collègues de la russe, il découvrit par leurs réactions toute l’estime qu’ils avaient encore pour elle… estime tout à fait ironique. De sourires en coin et de sous entendus douteux, il finit par trouver une jeune femme qui accepta de lui parler plutôt que de se détourner avec une grimace dédaigneuse.
« Elle bosse pas aujourd’hui »
« Ok. Et elle est où quand elle ne bosse pas ? » questionna-t-il en ignorant volontairement ces signes désagréables. « L’un de vous doit bien avoir une idée. »
La technicienne à l’accent français ne put retenir un petit rire grinçant.
« En gros tu as le choix entre, en train de cuver dans un couloir, en train d’emmerder le barman ou chez Lays. Mais tu devrais pas t'accrocher, elle en vaut plus la peine tu sais. C’est devenu un déchet cette fille… c’est con, elle était sympa avant.»
Il zieuta les collègues d’Esfir les uns après les autres.
« Je vous remercie de ne pas avoir signé chez les militaires. Je ne voudrai pas de vous pour surveiller mes arrières quand ça chauffe. » lâcha-t-il avec un lourd sous-entendu.
Il n’attendit pas la réponse pour aller investiguer.
Normalement, puisqu’ils avait déjeuner la veille à la même adresse que ce fameux serveur, il déduisait qu’Esfir n’y serait pas. Surtout pour l’esquiver.
Si elle cuvait dans un couloir, elle terminait soit en cellule, soit à l’infirmerie. Ce qui contrariait ses plans mais, encore une fois, Esfir se dirait qu’il aurait été mis trop rapidement au courant.
Donc pour le fuir, les quartiers de Lays, ça lui semblait le choix le plus judicieux.

Clive s’y rendit et tambourina à la porte. A l’ancienne, sans passer sa main sur les cristaux pour signaler son approche.
« Lunienko ! Sors de là ! » gueula-t-il, passablement énervé.

La porte s’ouvrit sur un Naalem qui portait encore des traces de sommeil.
« Qu’est ce que tu veux ? » lâcha t’il sans grande conviction
« Dis-lui de se rhabiller en vitesse et de sortir. Elle a oublié qu’elle avait rendez-vous. C’est important. »
Le grand blond le regarda de la tête aux pieds avant de se retourner et de s’éloigner plus loin dans la pièce encore plongée dans la pénombre malgré l’heure tardive.
« Lunienko… t’as un rendez vous important à ce qu’il paraît… alors dégage ou fait le dégager. »
Darren pouvait entrevoir une partie de la cabine du pégasien, l’ambiance n’avait rien de romantique et plusieurs signes indiquaient que le Genii était dans un état à peu près semblable à celui de la russe.
Après quelques longues secondes, il put voir du mouvement dans sa direction, la silhouette était cette fois plus petite et ses cheveux ébouriffés tout comme le reste de son allure n’était pas tout à fait en accord avec la demande de Darren d’être fraîche et dispo.
« Ah… euh...j’ai pas vu l’heure. »
« C’est ça...prend moi pour un con. »
Il secoua négativement la tête.
« Fraîche, dispo, avec ta trousse à outil. Je te laisse vingt minutes, passé ce délai, je viens avec les blouses blanches. »
Il tourna son regard vers l’intérieur de la chambre.
« Et la police militaire en prime, pourquoi pas... »
Darren employait la manière forte, l’éléctrochoc pour lui faire entendre raison.
« Ca va.. j’arrive. »
Esfir s’éloigna sans prendre soin de refermer la porte au grand damn de celui qui essayait encore de dormir et qui maugréa sans que Darren ne puisse le comprendre. La russe fila en direction de la salle de bain en ayant pris le temps de ramasser quelque chose sur la table basse.
Dix minutes plus tard, elle refaisait son apparition, propre bien que portant les mêmes vêtements que la veille et sa ceinture à outil à la main. Son regard était maintenant parfaitement éveillé et son attitude corporelle n’était pas du tout la même que la veille, tout comme son ton faussement enjoué.
« Alors qu’est ce que tu veux qu’on fasse, que j’aille réparer ta douche ? »

« Esfir. Je pense qu’on s’est mal compris là... »
Il marcha calmement en direction de la baie des jumpers, sa colère vibrant dans sa voix sans qu’il ne veuille la laisser éclater.
« Je ne suis pas ton jouet. Je me mobilise pour toi, pour t’aider à t’en sortir. Mais si pour toi, ça rime avec le fait de te foutre royalement de ma gueule et de continuer dans tes travers. Dis-le moi tout de suite. On oublie la journée d’hier et j’agis. »

Esfir soupira, la drogue qu’elle avait ingéré quelques minutes plus tôt lui donnait une énergie qu’elle avait du mal à contenir, mais Darren était plutôt doué pour filer une douche froide. Elle se souvenait de la journée d’hier, elle se souvenait de sa proposition… de la promesse qu’elle avait faite sans vraiment la faire. Mais sous dipe, son cerveau avait du mal à fonctionner normalement, c’était ça qui lui permettait de tenir ces derniers temps, ça qui l’avait tenu si longtemps loin de la digue..; comment pouvait il espérer qu’un sauvetage in extremis et une petite conversation pourrait la sevrer ?
Heureusement pour lui, ce qu’il lui reprochait était justement ce qui la retint de l’envoyer bouler en cherchant à nouveau l’affrontement.
« Je sais… je suis là non ? Je pouvais pas rentrer chez moi hier soir...sinon je serais au fond de l’océan à cette heure ci ok. Tu peux pas espérer que tout change en un claquement de doigt. »
« Donc tu continues tes petites habitudes ? Tu disais quoi déjà… “me glisser dans un lit...oublier, boire, fumer, baiser” ?...tu es vraiment sûre que c’est le remède au mal ? »
Esfir fit la grimace, que ces mots étaient moches dans sa bouche…
« Probablement pas mais faut bien réussir à tenir non ? Tu fais comment toi quand rien ne va ? » elle réagissait comme une ado prise en faute qui ferait tout pour assumer histoire de ne pas perdre la face… même si au fond, elle savait avoir tort.
« Je me repose sur mes amis, je me défoule, je fais tout sauf m’enfoncer. » répondit-il, la colère atténuée. « Je t’ai proposé de l’aide. Je m’attendais à un geste de ta part, un signe qui prouvait que tu en voulais. Genre une étincelle de motivation. Ce matin, tu m’as envoyé un beau doigt d’honneur à la gueule. T’en as conscience ? »
« Quoi ? T’es jaloux de Naalem ? J’ai fait exactement comme toi, je me suis reposée sur un ami… sans doute le seul qui me reste… a part toi mais je doute que tu étais dispo hier soir… et tu vois, je suis là...maintenant, avec ma caisse à outil non ? J’aurais pu refermer la porte et retourner sous les draps… et je l’ai pas fait. Tu veux quoi de plus ? Que je devienne clean en une nuit ? Que je m’isole comme une bonne soeur dans ma chambre en attendant les disponibilités de mon ami Darren ? »
« Naalem n’est pas un ami. C’est le type qui profite salement de ta vulnérabilité. Et je ne m’attends pas à ce que tu sois clean avec cette mauvaise influence. Je veux que tu aies l’envie, ne serait-ce que minime, de t’en remettre. Là, tu me prends simplement pour un débile. » expliqua-t-il sagement. « Mais j’aurai beau te mettre le nez dans la merde, tu continuerai de me dire que ça sent la rose ! »
Esfir s’arrêta de marcher pour regarder Darren en fronçant les sourcils.
« Naalem ne cherche pas à profiter de ma vulnérabilité… il me comprends… il est comme moi, ne le juge pas trop vite. »
« Ah oui ? Dans ce cas, c’est lui qui aurait dû t’empêcher de sauter de la digue. Déjeuner avec toi en ramassant ta colère et quelques tranches de bacons au passage. »
Darren s’était également arrêté.
« Je suppose que sa compréhension s’arrête dans les plaisirs qu’il prend sous les draps et le partage de la biture, des drogues que les flics avaient saisi l’an dernier dans ses quartiers et j’en passe. C’est pas ce que j’appelle du soutien, Esfir. »
« Uhm.. s’il avait été là, on aurait sans doute fini par sauter ensemble… alors oui tu me diras que ça ne m’aide pas...mais lui non plus il a personne pour l’aider. Alors ne juge pas sans le connaître. » déclara t’elle avec sérieux. Elle prenait sa défense, parce qu’une partie était vraie, mais aussi pour noyer la culpabilité qu’elle ressentait à ne pas lui avoir avouer ce qu’elle savait pour sa soeur, l’objet du désespoir de Naalem Lays. Esfir était sans doute aussi néfaste pour lui, que lui pour elle, mais ça, Darren ne pouvait pas le savoir et il ne le saurait peut être jamais.
« Je vois. C’est une pauvre victime broyée par le système. »
Il balaya le sujet des mains.
« On va faire plus simple. Une seule question se pose, elle a toute son importance : Tu veux t’en sortir ? Simple : un “oui” ou un “non”. »
Qu’il aurait été facile de dire oui, ce n’était qu’un petit mot… mais peut être que les mots de Darren portaient plus qu’il ne le pensait car elle décida de lui répondre avec honnêteté.
« J’en sais rien Darren… hier je ne voulais qu’une chose, c’est arrêter tout ça… tu m’en as empêché et je ne suis pas sûre que ce soit la meilleure décision que tu aies prise. Je t’ai dit, je ne pense pas qu’il y ait grand chose encore à sauver… mais hier, j’ai accepté d’essayer de suivre ta méthode. Je peux rien te promettre de plus… ou sinon, je peux te mentir si tu préfères. »

Il fallait reconnaitre qu’elle avait le don de l’irriter.
C’était une facilité de ne rien promettre. On se laissait aller à l’envie. Un jour on est sérieux, l’autre non. La parole n’avait plus de valeur. Et advienne que devra, celui qui s’engageait n’avait qu’à prendre son mal en patience. C’est bien pour ça que Darren n’aurait jamais pu faire ce boulot d’éducateur pour les ados alcoolisées ou dépendants aux drogues. Il ne supportait pas qu’on se joue de lui et qu’on brille de sa mauvaise volonté. Esfir disait qu’elle voulait bien essayer sa méthode. Pourtant elle l’avait planté en beauté. Pour avoir été dans ce cas, il savait qu’il aurait pu bénéficier de toute l’aide du monde, c’était avant tout venu de lui. Un déclic, un jour, dans un programme de réinsertion. Il avait fini par accepter les mains tendues.
Ca ne pouvait marcher que si Lunienko le voulait. Et force est de constater qu’elle n’avait même pas fait son choix.

Il fixa un instant son amie qui s’enfonçait dans ses explications, choisissant un “ni oui ni non” quand sa question était pourtant claire. Il regretta amèrement de l’avoir couverte et ne pas la dénoncer au service de santé d’Atlantis. Excédé, il se retourna d’un quart, s’apprêtant à la quitter.
Esfir le regarda dépitée… pourquoi ne voulait il pas comprendre, que ce n’était pas si simple. La brique retirée qui l’avait faite s’écrouler, ça, ça n’avait pris qu’une secondes… mais l’étincelle magique qui la referait briller… non, elle n’y croyait pas. Ca ne pouvait pas être aussi simple, pas après tout ça.
« Des kartings. » lâcha-t-il avec aigreur.
Il la regarda fixement, répondant ensuite à sa curiosité.
« Ce n’est pas une douche que tu avais à réparer. Mais les kartings de fortune du club de pistes, sur le continent. Un premier pas vers ta rédemption, reconquérir les coeurs, te refaire des bons amis ! »
Il soupira et s’éloigna rapidement, jetant par dessus son épaule :
« Tu me rejoins au Jumper ou tu retournes te coucher. Je ne te retiens plus, la balle est dans ton camp ! »

(c) princessecapricieuse

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