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Une Reine aux Neiges Eternelles

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Mer 7 Avr - 21:02

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Une reine aux neiges éternelles
feat Erin & Darren


Au cours de l'année 2018

Ça lui pendait au nez depuis un petit moment déjà.
Darren s’était estimé prêt mais il se mentait à lui-même. Personne n’est vraiment prêt à perdre sa place ! Quand il avait été convoqué dans le bureau de Steele, une petite voix dans sa tête lui avait dit : “Ca y est. Cette fois, tu es fini…”.
Darren avait beau tenter de faire bonne figure, conserver les apparences, son regard trahissait le cocktail d’émotions et d’injustice qui tempêtaient en lui. Tout ça pendant qu’elle lui exposait les faits. Il avait juste réussi à contrôler sa respiration qui se faisait longue et profonde.

Darren était utile pour son rôle en Gaëllie. Il avait gagné une place dans les équipes d’exploration le temps qu’il fasse son boulot. Quand le jeune homme ne courrait pas la princesse, ramenant quelques infos au voyage retour, on lui affectait des petites missions de transport de pli. C’était une façon de lui trouver une utilité hors de cet engagement diplomatique.

Mais tout s’était terminé.
Emilia faisait la morte, les échanges avec la Gaëllie passaient par d’autres personnes maintenant, et Darren n’avait plus aucune utilité.

Il ne pouvait pas en vouloir à Steele dans le fond.
L’expédition ne faisait pas dans l’émotion et le sentiment. C’était un rouage. Une machine qu’elle se devait de faire fonctionner, graisser, entretenir, avec tous les outils “humains” à sa disposition. Elle avait les couilles de le lui dire en face, avec son phrasé parfaitement adapté, positif, et professionnel. Il n’empêche que le soldat vivait ça comme une dégradation, une humiliation terrible.

D’un coté, il comprenait que l’Expédition n’allait pas le garder sur les explorations quand les places étaient chères juste parce qu’il avait filé un coup de main “à l’époque”. Mais d’un autre, il trouvait toute cette affaire profondément injuste et cruelle.
Retranché derrière son conditionnement militaire, Darren restait droit sur sa chaise en lâchant par moment des « Oui, Madame. » ; « Bien, Madame. » ; « Je comprends, Madame. ».
Ce qui était tout à l’inverse de ce que son regard exprimait. Et sa gorge serrée l’empêchait d’être bon acteur. Darren le vivait très mal. Il n’avait qu’une envie : partir dans ses quartiers, se planquer sous la couverture, et écraser sa tronche contre l’oreiller pour qu’on ne l’entende pas hurler à pleins poumons.

Steele mettait les formes pourtant. Elle faisait ce qu’elle avait à faire, avec diplomatie, en posant les choses avec une certaine forme d’élégance. Mais c’était de la politique tout ça. Du managing bien appliqué. Le soldat fermait sa gueule en attendant que ça passe, que l’entretien finisse enfin, pour qu’il commence à digérer l’horrible vexation qui l’habitait.

Dans quelques jours, ce serait sa dernière mission.
Darren l’accompagnerait sur une planète avec laquelle Atlantis faisait du commerce. Il veillerait sur elle avant de revenir sur la cité. A partir de ce point, le militaire retournerait à son ancienne affectation. Aux patrouilles de routine et à la servitude sur la cité. Contrôler tel truc, accompagner tant de personnes, passer à tel endroit. Transporter tel machin. Revue des troupes à telle heure.
L’éclate totale…
« Merci pour votre honnêteté, Madame. » lui avait-il dit avant de quitter son bureau.

Il ne le pensait pas vraiment. Darren n’était plus en état de faire la comédie.

Le jour J, son émotion n’était toujours pas passée. Il était parvenu à se résigner et se convaincre qu’il serait professionnel jusqu’au bout. Les gars de son dortoir, ses amis, avaient fait le maximum pour le remonter un peu. Lui dire que c’était surement temporaire, lui rendre l’espoir. Mais Darren n’était pas dupe. C’était bel et bien sa dernière manoeuvre à l’extérieur.
Le jeune homme fila dans l’armurerie pour se préparer puis rejoignit la baie des jumpers pour discuter sécurité avec le pilote. Comme à l’accoutumé, la mission débuta par le lancement du vaisseau à travers l’horizon des événements. Clive se montra plus réservé. Moins enclin à sourire, forcément, mais toujours aussi pro. Il en faisait une priorité. Quel que soit son avenir, il réussirait ses missions.
Il suivit ensuite le mouvement en faisant ce qu’il avait l’habitude. A savoir : surveiller, prévenir, contrôler, et écouter d’une oreille un peu distraite les négociations assommantes des termes de leurs contrats.

Il ne passa pas une seule minute sans se dire que cette partie de sa carrière était terminée. Il voyait déjà Sheppard intervenir plus tard, à échanger avec lui sur le sujet. Ce qui remuerait salement le couteau dans la plaie. Il avait passé une sale nuit en se prenant la tête sur ce sujet, repassant inlassablement tous les scénarios possibles, déduisant ce qu’il aurait dû dire ou non. Mais depuis cet entretien, il se sentait sale, traîné dans la boue, jeté à la poubelle comme un détritus qui avait bien servi. La peine et la tristesse l’empêchait d’aborder cette réalité avec objectivité pendant que Steele faisait son numéro de politicienne, comme si de rien n’était.

Au retour, Darren croisa son regard sans décrocher un mot. Il ne se sentait pas de s’installer sur la banquette, au risque de se trouver en face, et de jouer les indifférents pendant le DERNIER voyage en Jumper. Le militaire choisit de s’installer sur l’un des sièges arrières du cockpit pour observer le paysage défiler, profiter au maximum. L’une de ses pensées assassine le contraignit à croiser brièvement le regard de la jeune femme. Il s’acharna ensuite à l’éviter au possible. Cette porte qui s’activait en direction d’Atlantis, c’était son terminus. La fin du voyage, la fin de l’explo, la fin du point culminant de son job. Le jumper en phase d’approche finale, le soldat prit une longue inspiration tout en fixant l’horizon des événements. Il s’approchait inexorablement, comme lorsque l’on grimpait lentement au sommet d’une montagne russe et qu’on espérait encore pouvoir enclencher un frein par le pouvoir de l’esprit, histoire de retarder l’inévitable.
Lorsque la flaque immatérielle se mit à dissoudre le nez du vaisseau, Darren prit une grande inspiration et se laissa envahir par un frisson.
“Et voilà !” se dit-il pile avant de passer. “On a raccroché”

La matérialisation du tunnel ne se fit pas comme d’habitude. Cette allure de toboggan fût brisé dès qu’un flash brutal le traversa. A partir de ce point, c’est comme s’il avait été aspiré par un puit sans fond. Darren voulu hurler mais il ne ressentait strictement rien. Il n’était que de la matière déphasée qui s’évanouissait dans l’espace avant de rejoindre un nouveau tunnel qui n’avait rien à voir avec l’ancien. Ils le sillonnèrent à une vitesse de plus en plus rapide, dangereuse même. S’il avait pu, le soldat aurait appuyé de toutes ses forces sur une pédale de frein invisible. Mais rien à faire...le dernier flash éjecta le jumper en plein milieu d’une tempête de givre. Tout se passa tellement vite qu’il ne parvint pas à faire de déduction. Tout ce qu’il comprenait, c’est qu’ils n’étaient PAS sur Atlantis. Il y avait une sacrée tempête, un voile de brouillard grisâtre torturé par des remugles de vents se disputant toutes les directions. Le jumper venait d’être propulsé comme un bouchon de champagne et, malgré la technologie d’inertie, il sentait l’élan faire le yoyo. Un putain de bateau pirate qui leur faisait clairement sentir que le jumper était lancé dans des pirouettes incontrôlable. A cause de cette nappe de mauvais temps, il était impossible de discerner l’envers de l’endroit. Le pilote devenait fou à essayer de stabiliser son engin mais les chiffres qui s’affichaient sur l’écran passaient des zéros aux milliers n’importe comment. Pas d’instruments, l’ordinateur de bord était perdu. Le cri de Darren mêla la stupeur à l’effroi tandis qu’il pointait la verrière. La Porte des Étoiles encore active apparut pile devant eux. Elle traversa les nuages d’un coup en les déchirants. Comme une pièce de monnaie géante qu’on avait envoyé valser en l’air, elle chutait dans le vide droit sur leurs tronches. Ce fut aussi rapide que d’essayer d’esquiver une balle. Le pilote tenta désespérément une embardée qui échoua et un terrible bruit de taule raisonna dans l’habitacle. La brutale déchirure que l’on entendit arracha un cri à tout le monde sur le moment et le vaisseau partit dans toutes les directions.
« MAYDAY MAYDAY MAYDAY ! ICI JUMPER 4 ! MAYDAY ! » criait le pilote en se cramponnant sur ses commandes. La Porte n’était plus en vue. Il n’y avait que ces nuages et cette terrible impression de montagnes russes.
« Mais qu’est-ce qu’il se pass... » sa voix s’étrangla et bifurqua immédiatement en une autre phrase : « ROCHERS !!!! ATTENTION ROCHERS !!! »
Un flanc de montagne enneigé hérissé de pointes rocheuses semblait avoir été dressé là par un diable maléfique, comme si ça n’attendait qu’eux. Le pilote avait lui aussi perdu son sang froid. Il hurla un « NONNNNN !!! » de terreur qui prit Darren aux tripes.
Ils allaient trop vite, bien trop vite ! Le jumper percuta l’arrête avec une telle violence que des débris rocheux traversèrent littéralement le blindage, se fichant à plusieurs endroits à l’intérieur. Si Darren avait pu se concentrer, il aurait immédiatement senti la piqûre du froid. Mais de sa place, il était surtout le spectateur terrifié de leur terrible chute. La verrière était fendue. Son regard horrifié se tourna vers le pilote qui gesticulait dans tous les sens, les deux mains plaquées sur un visage dégoulinant d’une rivière de sang.

C’était seulement par instinct que Darren agrippa les commandes. Il ne comprenait même pas qu’en l’absence de gène, le vaisseau refuserait de lui répondre. Il tira simplement la poignée directionnelle dans l’espoir de redresser le nez de l’appareil comme s’il s’agissait d’un avion standard sur Terre. Comme s’il tenait un manche à direction hydraulique. Contorsionné de la sorte, il donnait toutes ses forces sur l’objet qui finit par lui rester dans la main. Darren se retrouva collé contre son siège en discernant, éberlué, l’objet brisé.
« MAY...DAY. MAYDAY...MAY... » essaya-t-il de crier dans sa radio.
Son coeur tambourinait à toute vitesse, il avait le souffle haletant et sa poitrine semblait sur le point d’exploser.
Le jumper continuait de partir dans tous les sens, les ballotants de plus en plus. Soit le système inertiel ne fonctionnait plus, soit ils allaient si vite que ça ne suffisait pas. Darren n’était pas un putain de technicien. Le pilote venait de s’affaisser, les bras lévitant à mesure des directions que prenait le centre de gravité. Le visage...il n’en avait plus. Des trous énormes remplaçaient son faciès, brisés par les pointes de rocher qui avaient fait voler sa mâchoire en éclats et réduit son visage en bouillie.

« ATTACHEZ-VOUS ! » cria-t-il à l’adresse de Steele sans savoir si elle l’avait déjà fait.

Au travers de la verrière fissurée, les nuages de tempête semblèrent s’éclaircir. Ou du moins, le diable avait fait de la place pour leur montrer sadiquement là où ils allaient s’écraser. Le jumper continuait de faire des tonneaux comme une foutue boule de bowling lancée à la vitesse de la lumière. Donc par rotation, il voyait de plus en plus le sol se rapprocher. Un sol hérissé des mêmes éperons rocheux. Surement aussi tranchant que des lames de rasoirs.

« Oh non...non... » fît sa voix déformée par la panique.
« Atlantis. Atlantis...on va s’écraser... »
Il essaya de calmer sa respiration devenue si forte qu’on entendait à peine ce qu’il disait. En vain.
« Jumper 4 va s’écraser...je...je répète...jumper 4 va...s’écraser... »

Le sol. Il s’approchait si vite. Si rapidement !
Darren était certain que c’était la fin. Il voyait ce terminus s’approcher sans la moindre pitié, une mort terrible dans d’horribles souffrances. Le jeune homme voulu avoir une dernière pensée pour quelqu’un, pour sa famille ou ses amis. Mais en réalité, il avait peur, il était envahi d’adrénaline, il craignait cette fin. Alors, juste avant l’impact final, le point culminant de sa terreur le poussa à hurler le nom de la seule personne qui partageait l’épreuve. Comme si elle aurait pu se lever soudainement, tout interrompre, et lui apprendre qu’ils se trouvaient en réalité dans un simulateur. Que c’était une bonne blague.
Mais non. A la toute dernière seconde, Darren hurla avec la force du désespoir :
« STEEEEEEEELE... »

ET VLAM !!!
L’impact fût d’une terrible brutalité, pliant l’engin comme une canette de soda vide. Elle percuta le sol avec une force impressionnante, qu’il n’aurait jamais pu suspecter, comme un choc frontal entre deux bolides lancés à vive allure. L’engin bascula et enchaîna des tonneaux, des vrilles, glissa sur la neige avant de retomber dans le vide. Darren cru que ça ne terminerait jamais. Il devinait qu’ils se retrouvaient à l’envers en voyant les valises de matériels s’arracher des filets pour voler dans tous les sens. C’est la jaune qu’il prit en pleine gueule et qui produisit l’extinction des feux.
Blackout. Plus de pensées, plus de sensations, plus rien.
Au moins, Darren pouvait se dire qu’on lui bandait les yeux avant le peloton d'exécution. C’était une petite douceur dans le drame, le “moins pire”.

Ce qu’il ne savait pas encore, c’est que le jumper venait de se stabiliser sur une corniche. Il s’était arrêté sur le toit, les occupants encore attachés se retrouvant la tête à l’envers, les bras pendouillant mollement vers le plafond. La verrière désormais explosée avait laissé filer le corps du pilote dans le vide, éjecté avec son siège dont il ne restait plus que la base déchirée.

La porte arrière de la nacelle était tombée dans la neige en formant un angle inquiétant, inhabituel. L’ouverture laissait le gel s’engouffrer à l’intérieur en chassant la moindre source de chaleur. Les lumières agonisaient régulièrement avant de retrouver une force toute relative. Quand à l’environnement sonore, il se partageait entre un moteur encore en marche et les hurlements sadique du vent. Ils avaient survécu en miraculé. Mais ils étaient échoué sur le flanc d’une montagne dans un endroit inconnu.


(c) AMIANTE


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Jeu 8 Avr - 15:58

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Une reine aux neiges éternelles
feat Erin & Darren


D’un point de vue extérieur, les négociations s’étaient bien passées. Les accords n’étaient pas trop mauvais, les termes acceptables pour l’un comme pour l’autre, mais Erin avait un petit sentiment de contrariété qu’elle n’expliquait pas vraiment. Est-ce que cela venait des yeux de chien battu du soldat, ou est-ce que cela venait des tractations ? Pour ce qui était du premier point, il fallait reconnaître que tout c’était bien passé dans l’ensemble. Pourquoi donc serait-elle inquiétée de ce qui s’était fait dans la journée ? Cela venait donc de sa seconde hypothèse. Elle pouvait comprendre le ressentiment du soldat à son égard, et plus largement, à la direction opérationnelle. Elle n’était que la messagère, mais elle avait été également sa consultante, il aurait peut-être pu penser qu’elle aurait dû faire pencher les choses de son côté lorsque cette décision avait été prise.

Une discussion semblait devoir s’imposer, même si elle connaissait le soldat. Il n’irait certainement pas plus loin que “oui” ou “non”, ponctué de “madame”. Il était plutôt bien formaté, mais il n’arrivait pas encore à cacher ses sentiments. La conseillère était plutôt d’avis d’attendre d’être revenue sur Atlantis pour se lancer dans ce genre de discussion, ne serait-ce que pour préserver le caractère privé de cette histoire : cela ne concernait en rien le pilote. Et puis… Au moins, sur la cité, si elle se le mettait à dos, ce serait nettement moins grave que si elle se le mettait à dos en expédition, puisqu’elle ne pouvait compter que sur lui. Autant garder toutes les chances de son côté. Avec l’expérience et toutes les tuiles qui lui étaient arrivées, Erin savait peser le pour et le contre désormais, et elle préférait choisir ses terrains pour se battre plutôt que de les subir.

Ceci posé, elle comptait bien se reposer un peu pendant le vol, surtout que la liqueur qu’ils avaient consommé sur la fin des échanges lui restait sur le bide. Elle pouvait encore clairement identifier le trajet du liquide dans son oesophage, et pour un peu, elle pouvait cartographier l'entièreté de son intestin. Ce n’était pas humain de boire ce genre de produit...
La Porte était là, et la jeune femme pouvait sentir l’odeur de l’avoine, l’étable n’étant plus loin. Atlantis serait derrière l’horizon des évènements. Comme des centaines de fois, elle n’attendait rien de spécial au moment de franchir le vortex.
Pourtant, quand ça commença à déconner, son cerveau alluma une petite alarme instantanément. Ce n’était pas commun. Mais comment réfléchir quand on n’était plus qu’un flot de matière ? Ce n’était que des perceptions lointaines, voir des intuitions.

Ce fut bien plus réel quand le Jumper émergea dans un blizzard monstre. On était loin du confort douillet d’Atlantis !!

« Qu’est-ce... », commença Erin, sans parvenir à formuler le reste de sa phrase. Elle prenait vraiment conscience qu’ils n’étaient pas sur Atlantis, et c’était surtout la surprise qui l’avait conduite à interroger le pilote. Questionnement qui resterait dans le fond de sa gorge tant les violentes secousses la poussèrent à se taire et à serrer les dents. Elle commençait à se dire que fermer les yeux serait une bonne idée, quand elle vit la Porte descendre tout droit sur eux. Tout ça allait tellement vite que l’esprit n’avait même pas le temps de raisonner correctement. C’était un temps rapide où seule la peur pouvait se faire sentir, en compagnie de l’adrénaline.
A l’instar des deux autres, le heurt de la Porte avec la carlingue arracha un cri d’épouvante à la jeune femme. Elle ne s’était pas détachée, et fort heureusement ! D’ailleurs, elle s’accrocha de plus belle aux sangles, quitte à s’en faire blanchir les phalanges.

Quand Darren hurla aux rochers, Erin venait de les voir dans le même temps. Et c’est d’une voix hystérique qu’elle accompagna le phrasé du soldat par : « LA MONTAGNE LES ROCHERS LES ROCHERS !! »
Aussi utile que de pisser dans un violon, le pauvre bougre aux commandes faisait tout ce qu’il pouvait pour leur sauver la mise, sans succès. Le Jumper était soumis aux caprices du vent et de la glace.
Le choc fut brutal. Erin vit des étoiles alors que sa tête fut secouée dans tous les sens. Mais cela ne les arrêta pas. A partir de là, son monde se résuma à des hurlements de terreurs et à un capharnaüm d’images, de sons, de chocs et de bruits. Le haut du bas n’existait plus. Seule la chute semblait inévitable. Elle entendit plus qu’elle ne vit Darren lutter pour récupérer le contrôle du Jumper. Elle sentait le vent fouetter son visage et l’air froid la mordre, pourtant, elle ne ressentait rien d’autre que de la peur. Son esprit entier était tourné vers cet abîme tandis qu’elle se cramponnait comme une dératée aux sangles de son fauteuil, comme si cela allait changer quelque chose. C’était juste un réflexe humain…

Son nom précéda l’impact. Il était d’une rare violence. La jeune femme sentit tout son corps s’affaisser dans le siège avant de perdre connaissance.

Combien de temps ? Elle n’aurait su le dire. Ce fut sa sueur qui se transformait en glace plus que le froid ambiant qui la tira de sa torpeur. Elle se sentait tirée vers le bas. Quoi de plus normal en fait, car elle était suspendue dans le vide par le harnais de son siège. Ses bras pendaient mollement… et que dire de ses jambes. Elles s’étaient empêtrées dans un filet et le poids d’une des caisses encore dedans forçait son membre à une souplesse assez inédite. Quand elle tenta de se redresser pour essayer de tirer sa jambe à elle, elle sentit la boisson alcoolisée remonter le long de son oesophage, et elle ne put rien faire pour le retenir. Secouée comme elle l’était, elle dégueula la tête en bas en émettant des borborygmes affreux. Elle transpirait à nouveau, et cela lui donnait encore plus froid. Fiévreuse, elle parvint quand même à se redresser et à décoincer son pied. N’ayant plus rien pour retenir ses membres inférieurs, elle se sentit basculer, et elle fit une pirouette dans l’unique sangle qui la tenait. La réception sur le “toit” du Jumper qui était maintenant le sol, fut rude.

Elle avait l’impression d’avoir été tabassé. Ramenant ses mains sous ses aisselles, et serrant ses bras au plus près de son corps, elle entreprit d’observer son environnement. Tout était silencieux, si l’on mettait de côté le râle du vent et les bruits propres au Jumper encore en fonction. C’est là qu’elle vit Darren. Il semblait inconscient, enchâssé dans les filets avec son siège, quelques caisses le recouvrant partiellement.
Erin s’approcha, tremblante et fébrile.

« Hey… Darren… vous m’entendez… ? ». Elle commença à pousser les caisses pour déblayer son corps, espérant vraiment qu’il n’était pas mort. Il faisait si froid…

(c) AMIANTE

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Dim 11 Avr - 23:32

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Une reine aux neiges éternelles
feat Erin & Darren


Le soldat ne répondit pas tout de suite. Il fallut attendre la deuxième fois pour qu’il ouvre les yeux et n’observe l’environ d’un air ahuri.
« Que... »
Sa voix était faible. Le jeune homme réprima l’expression d’une douleur soudaine et posa une main sur son crâne. Le gel avait fait cessé l’épanchement mais il avait prit un sale coup. On jouait l’hymne du Burundi dans son crâne et les musiciens étaient déchaînés. Darren cligna des yeux. Il ne reconnaissait pas encore la directrice. C’est à peine s’il arrivait à s’orienter.
« Qu’est-ce...qu’est-ce qu’il s’est passé ? » dit-il d’une voix blanche, le regard toujours écarquillé.
Il ramena ses bras sur sa ceinture, comprenant enfin qu’il était à l’envers.
« C’est un exercice ? »

Erin fut soulagée de voir qu’il émergea de sa torpeur. Au moins n’était-il pas mort… Elle aurait aimé lui dire que oui, mais force était de constater que ce n’était pas le cas.
« Il serait un peu trop réaliste à mon goût... », fit-elle en essayant de voir comment elle pouvait l’aider dans sa posture.
« C’est un crime de me faire rire... » répondit-il, le visage contrit. « Ca me sonne comme dans une église ! »
Lui aussi tentait de se défaire de ses sangles. Mais visiblement, ça ne bougeait pas d’un pouce.
« Mon poignard... » demanda-t-il finalement, loin de se douter qu’il s’était fait la malle avec le reste du matériel.
« Désolée... », s’excusa Erin avec un demi sourire qui se voulait plus rassurant que sincère. Elle opina du chef, et se mit en quête de trouver ce fameux poignard. Sauf qu’il n’était pas là où il devait être. Elle essayait de ne pas trembler, histoire d’avoir la sensation d’avoir plus chaud, mais en réalité, c’était plus fort qu’elle. Elle fouilla les débris accessibles sans réelle conviction. La seule chose qui semblait la préoccuper vraiment, c’était le froid. Quand elle s’écorcha avec un morceau de la verrière, elle en vint à se dire que ça ferait l’affaire.
« Pas de couteau... », fit-elle en claquant des dents. Elle lui montra le bout de verre. « Ca ira… attention je vais couper. ». Histoire qu’il ne tombe pas sur la tête lui aussi. Elle commença à cisailler les sangles, et ce n’était pas chose facile, mais au moins, ça lui permettait de se dépenser un peu et d’avoir un peu plus chaud.

Darren se pensait près. Mais le même froid l’avait transi jusqu’au plus profond de son être, le privait tant de sa dextérité que de sa force. Dans un craquement sinistre, la sangle finit par l’abandonner et il se réceptionna douloureusement.
« Merci. » baragouina-t-il tout en la chassant sur le côté d’un geste du bras.
Naturellement, Darren tenta de se redresser mais le sol dansait furieusement sous ses pieds. Il avait passé trop temps la tête en bas, le sang lui était monté dans le crâne et il voyait des étoiles. L’homme glissa sur plusieurs débris, s’étala de tout son long, et poursuivit le chemin à quatre pattes. Là, au niveau des banquettes, se trouvait dissimulé derrière les conforts une série de cristaux. C’était bien la seule chose qu’il savait d’un jumper, parce que la formation en était obligatoire : trouver et activer la balise de détresse.
« Balise ! » parvint-il à articuler pour poser des mots sur sa tentative.
Il tourna le connecteur en vain. Le formateur avait expliqué que cette partie des cristaux devraient s’éclairer. Or, en manipulant le contacteur, c’était exactement comme tenter d’allumer une ampoule grillée. Il retenta une fois, deux fois, puis écrasa rageusement son poing dessus avant de se rappeler du froid.
TROP TARD ! Une terrible brûlure remonta le long de ses phalanges et il serra sa main contre sa poitrine en râlant.
« Technologie de merde ! »

Clive se sentait essoufflé, il manquait surement d’oxygène à cette altitude. Et il faisait tellement froid !!! Une nouvelle fois au bord de la panique, il farfouilla la carcasse du regard en cherchant la solution miracle. Dommage, elle n’existait tout simplement pas. Le soldat se sentait incapable d’organiser ses idées jusqu’à ce qu’il prenne le temps d’observer la directrice. Elle grelottait comme lui mais, pire que tout, du givre s’était formé sur ses sourcils. Ses vêtements avaient blanchi.

Erin l’avait regardé faire. Ce n’était pas une mauvaise idée que d’actionner la balise de détresse. Elle aussi était formée pour le faire, et elle y aurait sans doute pensé une fois le soldat délivré et que leur situation avait été figée. Il fallait dire que le froid avait tendance à lui ralentir les neurones, lesquels s’en trouvaient focalisés sur la sensation. C’était terrible.
Elle n’était vraiment pas fringuée pour affronter ce genre de température et de climat. Ils venaient d’une mission diplomatique sur une planète tempérée, dont les températures étaient clémentes avec l’approche du solstice d’été qui allait marquer les beaux jours. Autant dire que ce n’était pas son pantalon en lin et son chemisier blanc sans manche qui allait lui tenir chaud dans ce merdier. Sans parler de ses chaussures ouvertes… Elle devait bien avoir une veste quelque part, mais comment la trouver dans tout ce foutoir ? Et pour un peu, elle s’était envolée pendant la chute.
« Ca…. ça marche pas ?? », s’enquit-elle en observant le système défectueux. Avec tout ce que le Jumper avait pris dans la gueule, le fait qu’ils soient en vie tenait du miracle… Alors pour ce qui était des pièces internes de l’appareil, autant dire qu’elles étaient éclatées. « Faut… relativiser… on aurait pu être mort… Et on va finir par l’être si on se réchauffe pas... ». Elle prenait sur elle pour faire preuve d’optimisme. L’envie de tout envoyer paître était forte, mais cela ne résoudrait aucunement le problème.
« Relativiser ?!? » répéta Darren avec une forme de colère. « J’l’ai vu composer l’adresse ! J’l’ai vu !! On devrait être sur Atlantis ! On était sur le bon couloir !!! J’vois pas comment on peut relativiser ! Personne ne nous retrouveras, putain ! »
Ce froid lui faisait perdre ses moyens.
Il tenta une nouvelle fois de se redresser et chancela sur ses jambes.
« Peut-être qu’on vous entendra pester jusque sur Atlantis !! », répondit Erin du tac au tac en pesant le pour et le contre de s’appuyer contre la carlingue pour soulager ses jambes grelottantes et endolories. C’était un coup à y laisser sa peau. S’il s’énervait, elle pouvait aussi le faire, surtout que la limite entre la panique et la raison était assez faible.
Sur le coup, Darren le prit mal. Il fit un pas hasardeux dans sa direction, chargé de colère et de haine, comme si elle était responsable de l’ensemble de leurs maux. Mais il parvint à retrouver un semblant de jugeote pour réfléchir. Du moins, trouver la priorité. Steele avait raison, ils allaient y rester s’ils ne s’activaient pas très vite.
Finalement, il découvrit ses dents pour éclater de rire et il lui tourna le dos.
« C’est vrai que j’aurai pu tomber plus mal ! J’pourrai me retrouver piégé, dans ce foutu blizzard, avec le MAJOR !!! »
Darren se mit à farfouiller dans les débris, retrouvant étonnamment facilement la malette de secours. Il l’ouvrit sans douceur, renversant la moitié sur le côté, pour s’emparer de la couverture de survie. Il avait perdu tellement de dextérité, à n’en plus sentir ses doigts, qu’ouvrir le sachet plastique revenait à un projet en plusieurs étapes.
Darren grommela et attaqua le couche protectrice avec ses dents. La toile en alluminium fit ce bruit caractéristique et il le déplia d’un coup avant de cerner la directrice avec.
« C’est pas la température qui va nous tuer en premier...c’est cette tempête ! »
Il acquiesça.
« Faut se retrancher...et survivre à cette tempête ! »
Il ne lui restait qu’un peu de volonté pour mimer de l’optimisme. Sur certaines planètes, les tempêtes pouvaient durer des mois. Il n’avait pas la moindre idée du temps que durerait celle-là. Il savait juste que la carcasse du jumper était la seule chance de résister pour le moment.

Erin n’avait pas relevé. Elle savait que c’était surement ironique comme remarque, ou peut-être qu’il n’appréciait pas un des Majors d’Atlantis. Qu’importe. De toute façon, se prendre le bec ne réchaufferait pas assez alors autant se préserver et tenter de coopérer.
« Merci... », fit-elle en prenant la couverture. Elle espérait qu’il y en avait deux, sinon ils étaient mal. Il avait sans doute raison. Déjà, s’ils arrivaient à ramener un peu d’étanchéité au Jumper, ils pourraient conserver un semblant de chaleur, à la manière d’un igloo. La couverture de survie était efficace, mais il faudrait un peu de temps avant qu’elle en sente les bénéfices, surtout si elle se lovait dedans. Mais il fallait s’activer. Faire quelque chose pour survivre à ce temps de merde.
« A deux, on arriverait peut-être à remonter la porte pour fermer le sas. », proposa-t-elle. Elle n’était pas très costaud, mais qui sait, avec l’énergie du désespoir, l’humain était capable de miracle. Se déplacer était une torture. Sa cuisse lui faisait un mal de chien, sans parler de son thorax, de ses épaules, de son cou… en fait, elle avait mal partout. Le point d’orgue se situait néanmoins dans sa jambe droite. Raa ça faisait quand même du bien d’avoir le vêtement de survie sur le dos. Elle grelottait déjà moins. En se bougeant un peu, ça irait déjà mieux ! Elle le laissa apprécier son idée, avant de prendre une autre initiative si jamais ça ne pouvait pas le faire.

Il n’était pas contre.
Dans une autre situation, il aurait sûrement tenté de faire le prince en lui disant de rester là. Mais il se sentait tellement gelé que rien que le fait de lorgner cette porte de sas lui semblait une affaire insurmontable. Le vent avait, en plus de ça, ramené pas mal de neige par-dessus.
« On doit le faire maintenant, avant d’être trop faible. » articula-t-il en grelottant. Ses mots étaient achurés par des tremblements involontaire. Il ne pouvait même pas s’empêcher de claquer des dents.
Avec son aide, il dégagea le plus rapidement possible l’excédent de neige et contourna la porte pour cherche une prise.
« A trois ! »

Erin essayait d’aider au mieux. De toute façon, ils étaient tous les deux dans cette galère, et sa survie ne devait pas se reposer que sur les épaules du soldat. Elle acquiesça puis l’aida à déblayer la neige. Seulement, avec le vent, la couverture de survie se gonfla, et avant qu’elle ne puisse planter ses ongles dedans pour la retenir, elle se fit la malle en claquant dans le vent. Pour un peu, et elle se serait insultée de tous les noms, au lieu de ça, elle coula un regard noir vers Darren en se baissant pour glisser ses doigts sous la porte.
« Et ça dirige Atlantis ! » avait-il lâché dans un murmure, ne cherchant pas vraiment à se cacher de cette réflexion.
Elle était à deux doigts de pleurer, mais la haine de ce qui venait d’arriver la tenait en place. Elle prit l’initiative de compter, histoire que ça ne parte pas en polémique en répondant à sa provocation :
« Un… deux… trois !! »
Et Darren poussa avec elle. La porte refusa dans un premier temps, se mit à grincer, puis le panneau se leva petit à petit. A cause de la torsion du métal, l’angle interdit la fermeture complète. Mais dans cette malchance, l’écart qui demeurait était tout juste suffisant pour permettre d’y entrer. Darren invita la directrice à rentrer dans le jumper et il s’appliqua ensuite à chercher une sangle de chantier. L’homme n’était plus habitué et il ouvrait des mallettes sans savoir où trouver le fameux outil. C’est lorsqu’il l’obtint enfin qu’il poussa une plainte de soulagement. Avec ça, il pourrait cerner le haut de la porte et tirer la sangle, garder le panneau levé. Le vent ne fouettait plus l’intérieur. Le froid était peut-être encore là mais il ne s’insinuait plus. La morsure était moins violente, un vrai soulagement.
« Madame... » dit-il avec l’espoir de se racheter, conscient de son comportement. Il terminait d’appliquer la tension avec levier de la sangle. « Il y a une autre couverture dans la malette. »
« Prenez-là… Je n’avais qu’à tenir la mienne. », fit-elle de façon abrupte. Elle s’en voulait en réalité, et elle était en colère contre elle-même. Malheureusement, dans ces conditions, elle n’avait pas sa patience habituelle. Faire un caprice n’y changerait rien, mais qu’importe.
En tout cas, condamner un des accès permettait de sauvegarder un peu de la chaleur à l’intérieur du Jumper. Il ne serait jamais pleinement hermétique, mais au moins pouvaient-ils améliorer un peu le confort. Avec un peu de chance, il y aurait peut-être moyen de remettre en route le chauffage ou une connerie dans ce genre… Voir de faire un feu.
L’adrénaline commençait à tomber, et la lassitude arrivait. Les questions aussi. Comment étaient-ils arrivés ici ? Erin ne voyait qu’une seule explication. Le pilote s’était trompé en saisissant les coordonnées. Cela n’expliquait pas pourquoi la Porte était en train de voler cela dit…
Toujours vexée, elle s’était mise en tête de reboucher l’autre trou, du moins autant que faire se peut, avec le matériel à disposition. C’est à dire les caisses, les filets, tout le bordel. Elle était un peu démunie, et elle brassait surtout du vent, mais au moins, elle n’avait pas affronté le regard de Darren, et ça lui permettait d’avoir un semblant de chaleur dans les bras.

De son côté, le soldat s’était acharné à essayer de fermer la cloison intermédiaire. Le système manuel était complètement flingué et il s’y attaqua avec le peu de force qu’il lui restait. En utilisant un pied de biche qui figurait parmi les outils utiles, Darren tira la porte de force centimètres par centimètres. L’effort lui fit pousser des plaintes qu’il ne cherchait pas à retenir. Ce qui le motivait, c’était de voir ces deux panneaux se rapprocher petit à petit. C’était comme vouloir sceller les portes automatique d’un ascenseur qui ne répondait plus. Clive s’emparait d’un panneau et donnait un accoup sec. Un centimètre de grignoté ! Il prenait l’autre côté, un coup, encore un centimètre.
Il continua ce petit jeu durant un bon quart d’heure, sa transpiration gelant sur sa peau et l’effort permettant à peine de le garder au chaud.
Se donner à fond, se mobiliser sur cette tâche unique, ça lui offrait une diversion salutaire. Il ne se disait pas qu’il était perdu en pleine montagne, sur ce qui aurait dû être Lantia, avec rien de moins que la Directrice de la cité. Pourtant, au fond de lui, Darren savait que sa mission devait prendre le pas. En bonne tête brûlée qu’il était, le jeune homme avait toujours placé son devoir avant sa propre personne, que celle-ci lui plaise ou pas.
Le contrat, c’était sacré. Et il ne devait perdre de vue son devoir.

Lorsqu’il parvint enfin à refermer entièrement le panneau, il tomba à genoux d’épuisement et se retourna dos contre celui-ci. Sa respiration haletante se devinait aux brumes qui s’échappaient régulièrement d’entre ses lèvres. Ne plus recevoir les violentes bourrasques dans la figure faisait un bien fou mais il était toujours transi de froid. La température les torturait lentement par l’hypothermie. Silencieusement, il fixa la directrice qui terminait de combler les brèches. Darren reconnaissait qu’elle ne collait pas au préjugé du petit seigneur hautain qu’il avait imaginé plus tôt. La colère et la peur faisait faire de bien vilaine chose. Maintenant, l’homme reprenait du poil de la bête et, même s’il ne se sentait pas d’attaque, il était prêt à se battre de toutes ses forces. Erin jouait le jeu, ça se voyait qu’elle essayait de faire avec les maigres moyens à sa disposition. Qu’elle ne se contentait pas que d’attendre de lui qu’il trouve la solution.

Ce calme relatif l’inspirait et il se posa deux minutes pour méditer sur son comportement, ce qu’il s’était passé. Il ressentait de la honte pour ne pas s’être montré à la hauteur. Il avait paniqué et il s’était conduit comme un rustre à la remarque facile. Voir la directrice, bras nus, en train de finir son boulot d’étanchéité était un symbole assez fort. Elle se montrait plus acharnée que lui au final. Mais qu’est-ce qu’il en était réellement à l’intérieur ? N’était-elle pas à bout de force ?
“Espèce d’abruti. C’est qui le putain spécialiste de l’escorte ?!? Tu vas le bouger ton cul, oui ?”
Darren s’approcha de la valise et déballa la dernière couverture de survie. Il fixa la jeune femme un instant, constatant le givre qui s’était formé tant sur ses vêtements que sur son épiderme, puis il l’appela d’une voix plus respectueuse.
« Erin. »
Cette approche moins conventionnelle, c’était l’une de ses bottes secrètes. Quand on savait le placer avec le timbre de voix bien dosé, ça transmettait la compassion et le partage, une proximité sans manque de respect. Darren ne voulait surtout pas la braquer, surtout avec ce qu’il lui avait balancé gratuitement.
Il déploya la couverture en geste d’invitation pour l’enrouler dedans.
« S’il vous plaît. Vous vous mettez en danger en restant comme ça. »
Le soldat ne comptait pas lui décrire ce qui lui arriverait si elle ne se méfiait pas du gel. Le danger n’était pas d’avoir mal. Le danger, c’était justement de ne PAS avoir mal. Généralement, c’était trop tard à ce moment là. La nécrose se déclenchait très vite, comme les escarres si on restait assis trop longtemps au même endroit. La partie en question gelait et on ne sentait plus rien. La peau, la chair, les nerfs, mourraient sans que la victime ne prenne conscience de la gravité de la blessure. Darren ne l’avait jamais vécu personnellement mais il avait eu une formation complète là-dessus lorsqu’il était mercenaire. On disait que la victime se sentait “mieux”. Un effet pervers du fait de l’absence de douleur.


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Lun 12 Avr - 9:29

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Une reine aux neiges éternelles
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C’était impossible d’avoir aussi froid. Ce n’était pas humain. Comment pouvait-on avoir plus froid que le froid ? Ses dents s’entrechoquaient douloureusement, sans parler des frissons à répétition qui la congelaient sur place. A force de trembler, ses muscles lui faisaient mal. Elle sentait tous ses poils se tendre pour former un coussin d’air protecteur, un coussin d’air qui n’avait aucune utilité malheureusement.
S’occuper l’esprit permettait de faire fit de ces conditions. Pour quelques secondes souvent. La plupart du temps, le cerveau revenait sans cesse à la charge : il fait froid ! Elle le savait bordel, et elle n’y pouvait rien pour le moment. Sa construction, son assemblage, cela devait apporter un semblant de confort ! Darren oeuvrait dans son coin lui aussi, refermant le sas progressivement. Quand il y parvint, le souffle glacial s’estompa. Déjà, le fait d’être à l’abri du vent permettrait d’avoir un froid ressenti bien plus faible. Cela ne voulait pas dire qu’ils étaient tirés d’affaire. Loin de là.
Le principe d’entropie était clair : deux états à des chaleurs différentes s’équilibrent à la moyenne des deux chaleurs. Puis, quand elle allait mourir, son corps ne chercherait plus à produire de la chaleur, et elle deviendrait aussi froide que les températures actuelles.
L’expédition Atlantis finirait par les retrouver, dans quelques jours, dans quelques semaines. Au moins, elle aurait la fierté d’être morte en étant plutôt bien conservée… A moins que le gel n'abime ses tissus et la ronge petit à petit. Qu’importe au final, elle serait morte. Elle allait laisser beaucoup derrière elle.
Mais pour l’heure, elle ne l’était pas encore, et il fallait se battre pour grappiller du temps. Ni Darren, ni elle, ne pouvaient prédire quand les secours arriveraient. Il fallait donc se montrer à la hauteur des moyens qui seraient déployés pour les retrouver. Hors de question de s’allonger dans la neige et d’attendre que le froid l’emporte. Pour mériter de vivre, il fallait souffrir. Elle s’était souvent battue pour avoir le droit de continuer d’exister, elle était passée par de nombreuses épreuves, et pour une fois, ce n’était pas l’Homme qui en était responsable, mais la nature. Le bras de fer devait s’engager.
Congelée, elle se frotta les bras avec la paume de sa main. Elle n’avait plus de sensation dans les doigts. Elle n’aurait pu dire si elle était froide ou chaude, mais elle constatait avec une certaine horreur que sa peau était terriblement blanche, au moins aussi blanche que le givre qui était parfaitement visible sur son pantalon noir. Ses seins lui faisaient un mal de chien, érigé de toute la hauteur possible, ses extrémités essayaient de chercher un peu de chaleur dans le soutien-gorge légèrement rembourré qu’elle portait.
Darren revint à la charge. Plus posément. Plus rondement. Il avait sans doute raison. Elle se mettait en danger. Jouer les nanas capricieuses n’allait pas la sauver. Cette couverture, oui.
« Et vous ? », s’enquit-elle simplement, en se glissant sous la couverture de survie. Elle respirait tellement vite, exhalant de la fumée par la bouche qu’elle ne parvenait pas à maintenir fermée tant elle claquait des dents.
« J’ai la chance d’être en uniforme. » dit-il pour botter en touche, un sourire cassé sur les lèvres.

Dès que la directrice s'emmitoufla sous la couche protectrice en aluminium, Darren lui demanda de s’assoir. ll avait retrouvé son poignard en cherchant le pied de biche. Et quelques autres trucs bien sympa comme ce rouleau de scotch épais.

« Vous aussi, il faut vous isoler. » fit-il avec une nuance comique.
Sans lui demander son avis, le soldat s’empara de l’une de ses chevilles et la débarrassa du talon d’un geste sec. Il prit ensuite l’un des coussins rembourrés de la banquette et le découpa soigneusement tout le long de la tranche, veillant à ne rien perdre de son intérieur. Il saucissona ensuite le pied d’Erin avec le matériau, ne lésinant pas sur le scotch pour que ce “surbotte” de fortune ne s’échappe pas.
Il réitéra l’opération sur l’autre pied. Parfois, il glissait son index en-dessous du ruban adhésif et la questionnait, savoir s’il ne lui coupait pas la circulation sanguine. C’est avec le même procédé qu’il lui confectionna des moufles. Une coupe dans le dossier de la banquette pour concevoir une poche de rembourrage. Il suffisait de plonger ses mains dedans.

S’exercer ainsi le renvoya automatiquement en Gaëllie. Pendant une bonne minute, Darren se perdit dans ses songes en se souvenant comment, encore au début de leurs relations, il avait installé son holster sur la cuisse d’Emilia Eidolas. Secrètement, il avait pris beaucoup de plaisir à laisser traîner le contact, avec ces petites caresses fugitives, en lui laissant une pièce d’équipement qui lui appartenait. C’était comme, étrangement, avoir une sorte de propriété passive sur le corps de la princesse. Elle lui laissait un accès, elle ne le rejetait pas. C’était un bon souvenir qui lui aurait réchauffé le coeur s’il ne caillait pas autant.

Erin était un pantin. Elle se laissait faire. Sa volonté de survivre s’étiolait petit à petit. Transie de froid, elle avait envie de se recroqueviller sous cette couverture, et d’attendre que le chaud revienne. Elle avait un mal de chien à le sentir, mais déjà, l’atmosphère sous la couche en aluminium se réchauffait un petit peu. La jeune femme craignait pour ses extrémités. Ses pieds et ses mains. Allait-elle survivre et voir ses membres disparaître suite à une amputation ? Le soldat semblait s’en préoccuper, et il confectionna des bottes et des moufles de fortune. Heureusement, il y avait assez de matériaux dans les banquettes pour qu’il puisse s’en faire également.
Il ne semblait pas y penser par contre, préférant agir pour la sauvegarder elle.
« Faites vous des bottes également, je vais vous aider à les nouer autour de vos chaussures. ». Le peu de chaleur qui revenait semblait lui redonner de la vie, ainsi que des couleurs. Au moins, on ne pourrait pas lui dire qu’elle ressemblait trait pour trait à la vampire dans la saga Twilligt, avec son teint de cire.



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Mar 13 Avr - 16:48

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Une reine aux neiges éternelles
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Steele venait de lui dire quelque chose mais il émergeait à peine de ses souvenirs. Il préféra sourire niaisement et il la libéra pour s’intéresser à l’inventaire des vivres. Darren avait les crocs, il mourrait de faim. Logique quelque part. Avec ce froid, le corps brûlait un nombre de calories bien plus élevés qu’à l’accoutumée. L’équilibre calorique allait très rapidement leur poser des problèmes.

En silence, le soldat lui proposa une barre chocolatée. Elle devait manger. Vu qu’elle s’était exposée plus longtemps que lui, il y aurait un déficit certain. Darren aligna les quelques rations et fît le compte mentalement. Il ne parvint pas à se contrôler concernant les pastilles à brûler, les chauffe-plat que l’on utilisait pour faire chauffer le quart en alu. Il versa de l’eau dans le sien et fît un café en espérant bénéficier de la chaleur de cette petite flamme.
En vain...il avait beau y approcher les mains, ses extrémités étaient toujours aussi gelée et douloureuses.

Clive soupira.
Dès que la pastille fut entièrement consumée, ce qui arriva que trop vite à son goût, il divisa le café qu’il transvasa dans une autre tasse militaire. Il la lui tendit avec un peu de sucre. Avaler une boisson chaude et sucrée était la plus belle chose qu’il pu avoir durant cette épreuve. Son corps lui hurlait merci et il nouait ses doigts tout autour de la tasse pour en capter la moindre émission de chaleur.
Il profita de ce moment pour lui partager son plan.
« Il faut qu’on se repose, le temps que la tempête passe. Si le temps est plus clément demain, on pourra essayer de voir où est-ce qu’on a échoué. Et essayer de comprendre un peu mieux notre situation... »
Il présenta son quart pour l’inviter à trinquer. Avec un sourire mêlant le désespoir et l’amusement, il déclara en bon clown :
« Hé...à nos vacances à la neige ? »

Darren semblait ailleurs. Il n’avait même pas répondu à sa proposition. Est-ce qu’il était en train de perdre la boule ? Peut-être qu’il ne jugeait pas utile de lui répondre, ou que sa proposition ne l’inspirait pas. Il n’avait peut-être pas aussi froid qu’elle.
D’un geste de la tête, elle le remercia pour la barre chocolatée. Cela lui ferait du bien, et reboosterait son moral, à coup sûr.
Si Erin détestait bien une boisson, c’était le café. Mais là… Rien que l’odeur qui se dégageait de la tasse chaude lui filait l’eau à la bouche, et si elle le buvait avec la barre de chocolat, ça passerait. De toute façon, ça aurait pu être de la pisse, tant qu’elle était chaude, elle l’aurait certainement bu. Elle avait si froid.
La jeune femme se forçait à ne pas trembler, ne serait-ce que pour ne pas renverser un millième de sa tasse chaude et fumante. Elle trinqua en acquiesçant, sans dire un mot. Parler lui demander de faire des efforts, des efforts qu’elle faisait déjà pour ne pas laisser son corps trembler. Elle se voyait revenue des années en arrière, quand elle allait au sport d’hiver avec ses parents. A chaque fois qu’ils revenaient d’une randonnée en ski de fond, transi de froid à cause de la transpiration, son père lui préparait un chocolat chaud avec du véritable chocolat fondu, et il faisait cuir quelques gaufres. Elle n’avait jamais le droit d’avoir du sucre dessus, ou même de la pâte à tartiner dessus, à cause de son diabète, mais elle les trouvait toujours sacrément bonne.

Elle buvait par petite gorgée, appréciant le liquide chaud qui la réchaufferait de l’intérieur. Elle préférait ne pas trop s’attarder à tenir la tasse, même si c’était un délice pour ses doigts, parce qu’elle avait peur qu’elle se refroidisse trop vite. Quand elle sentit que ça allait mieux, elle se décida à décrocher quelques mots :
« Merci, pour tout ça. », fit-elle en levant légèrement les bras, pour englober le café, la couverture, ainsi que les moufles et les chausses. Elle se sentait bien mieux déjà. La chaleur se faisait sentir, au détriment du froid, même si ce n’était que très partiel. Mais déjà, c’était une petite victoire.

Assis avec les genoux repliés, Darren avait coincé ses mains sous ses aisselles et ramené son menton contre son gilet tactique. Il tremblait comme une feuille et avait fini par lâcher l’affaire question discrétion. En son for intérieur, il se disait que plus ses muscles vibraient, plus il se réchaufferait. Alors pourquoi s’en empêcher ?
Le remerciement de la directrice lui chauffa le coeur. Il sentait qu’elle ne lui en voulait pas trop pour sa conduite, même si le stress et le choc psy issu du crash pouvait le légitimer. Il lâcha une plainte positive, approbatrice, puisque son hochement de tête s’était mêlé aux tremblements de son être.
« Si vous voulez que je vous aide à vous confectionner des chaussures en mousse… Je peux. Faudrait pas que vos extrémités gèlent aussi. »
« Avec les rangers...je m’y prendrai...autrement. »
Darren serra les dents. Il n’avait jamais grelotté comme ça. Le panache de brume qui s’échappait d’entre ses lèvres donnait des airs de locomotive. Il voulu se passer une main sur le visage et sentit immédiatement, malgré l’anesthésie généralisée de ses phalanges, qu’il avait la tronche couverte de givre.
« J’vais vous répéter ce que m’a dit l’instructeur y’a pas mal d’années : “avoir mal, c’est bien.” »
Il tourna légèrement sa tête vers elle, ne voulant pas se découvrir de sa fameuse posture du menton recroquevillée.
« J’vous jure. » fit-il en souriant.
Il avait envie de lui livrer l’anecdote même si parler le faisait encore plus trembler. Sa voix n’avait plus rien de régulier et d’harmonieux. Il devait se concentrer pour articuler, quitte à en être plus lent. Mais le soldat avait besoin de partager quelque chose avec la directrice. Il se disait que ça la détournerait du froid, même si c’était le sujet, et qu’il l’oublierait lui-même un moment. La diversion était salutaire parce que, coincé là en attendant que la tempête finisse, ils ne pouvaient que ressasser l’accident et prendre conscience de la merde dans laquelle ils étaient.
« C’était...sur Terre. Ma formation de spécialisation...avant de devenir...mercenaire. » Il souffla et serra davantage ses bras.
Le vent tempêtait dehors, mais il ne se faisait plus sentir dedans. Il y avait par moment quelques impacts sur la carlingue, mais le son en était diffus, et bien lointain comparé à celui des bourrasques.
« Venez Darren. », ajouta-t-elle en écartant un pan de la couverture de survie. Il y avait de la place pour deux, et deux corps qui la chaufferait procurerait certainement plus de chaleur qu’un seul. Comme il le disait, il fallait se reposer, et attendre que ça passe. Pour le moment, leur situation était passée de “mort certaine” à “critique”.

Le soldat ne tourna que son regard, pas le visage, en direction de cette source de chaleur.
A vrai dire, il y pensait déjà depuis un petit moment. C’était une tactique habituelle pour se réchauffer d’user de la chaleur d’un autre corps. Sympa sur le papier. En pratique, le grade de Steele et le fait que ce soit une femme avait constitué un sacré frein. L’attaque de Berkham sur la cité avait laissé une cicatrice qui ne disparaîtrait jamais. Si avant on ne se posait que peu de question, le sujet du harcèlement sexuel ou de tout un tas d’autres qualificatif revenait quotidiennement sur la table.
Se réfugier sous cette couverture, ce serait se coller contre elle, conserver un contact. Bien malaisant quand on y pensait.

Mais elle était la voix de la raison en lui offrant cette place. Déjà, sa petite voix lui hurlait de sauter là-dedans et de se couvrir de cette chaleur supplémentaire plus que bienvenue. Pour un peu, il en fantasmait sans la connotation sexuelle.
Après une dernière hésitation, le soldat se glissa jusqu’à elle et referma le pan de la couverture qui le concernait. Sur les premières minutes, il se sentait particulièrement gêné, essayant de marquer son respect par le manque de contact avec le vêtement ou l’épiderme de la directrice.
Mais en fin de compte, parce qu’on sentait carrément la différence par la chaleur qui émanait de l’un et l’autre, Darren se lança un énorme “ET PUIS MERDE !” dans la tête avant de se coller complètement contre la jeune femme. Il alla plus loin en faisant migrer un bras vers ses omoplates et en la frictionnant.
« Merci. » lâcha-t-il, gêné, avec un message subliminal du genre : “C’EST LA SURVIE, Y’A RIEN DE PERVERS LA-DEDANS !!!”
Il fallut attendre une bonne dizaine de minutes mais ça commençait à faire effet. Darren sentait qu’il tremblait un peu moins, Erin aussi d’ailleurs.
« Je continue l’histoire ? » lâcha-t-il finalement, se disant si elle ne préférait pas le silence.

« Si vous voulez... », souffla Erin qui sentait la chaleur s’installer. Elle n’avait pas osé se rapprocher un peu plus, maintenant, elle n’oserait plus s’éloigner. La différence était nette, et c’était appréciable. Le menton rentré en partie dans la couverture, elle s’était ajustée pour coller au mieux.
« L’instructeur...il nous avait foutu à poil dans un espèce de...enfin chais pas...un tonneau norvégien géant. »
Darren ne voulait plus bouger. Il faisait bon sous cette couverture et son corps commençait à brûler de partout, c’était bon signe.
« Le mec jetait des pelletées entières de glaçons. On est resté là-dedans des heures. Et ben...j’vous le dis Erin...c’était une bronzette a la plage comparé à cet endroit... »
Le soldat haussa les épaules.
« Un des gars tremblait tellement qu’il s’est cassé une dent à l’avant. Vous auriez dû voir ça...il avait une tronche de pirate. Du coup...le mec n’osait plus sourire, il pinçait des lèvres, il se forçait à pas ouvrir la bouche. Les gars de la promo, en bons salauds, l’ont envahi de connerie en tout genre. Le jeu...c’était de la faire marrer avec son chico perdu... »

Erin le laissait raconter son histoire en observant un silence religieux. En réalité, son corps se détendait avec le retour de la chaleur. Elle ne claquait plus des dents, et c’était déjà une sacrée victoire, d’autant plus si on y ajoutait le fait qu’elle ne tremblait plus. Elle se sentait faible, et le café lui restait sur le bide. Qu’est-ce qu’elle détestait cette boisson. Et pourtant, qu’est-ce que cela avait fait du bien.
Elle voyait bien que Darren essayait de mettre les formes pour lui raconter une histoire amusante afin de les détourner de leur situation actuelle. Elle ne savait pas si c’était de la gêne, ou si c’était par courtoisie, voir par sentiment du devoir accompli, toujours est-il que ça avait le mérite de faire passer le temps. Cependant, Erin était incapable de vraiment se détacher des événements présents. Elle n’arrivait pas à déterminer si le pépin s’était produit avant, ou pendant la traversée de la Porte. Est-ce que le pilote s’était gourré d’un symbole ? Est-ce que quelque chose avait interféré avec le tunnel ? Ce serait sans doute bien la première fois.
« J’espère que l’armée lui a payé des soins dentaires. », s’entendit-elle répondre. Bonjour Miss je Casse l’Ambiance. Mais bon, elle ne s’était jamais vraiment moquée des gens qui présentaient une certaine difformité par rapport à la moyenne, du coup, même si elle comprenait l’aspect comique, cela ne lui parlait pas vraiment.
Darren avait fait un bide. Il ferma un instant les yeux en entendant l’énorme “DENIEDDDD !!!” se formuler dans sa tête puis il boucla son affaire.
« En tout cas. L’instructeur nous avait dit pour les doigts, les pieds...tant que ça fait mal, c’est que c’est vivant. Je veux vous rassurer là-dessus... »
Erin fit un bruit de bouche, une façon pour elle d’acquiescer à ce qu’il venait de dire. Elle tourna son regard vers le soldat, et lui afficha un sourire contrit avant d’ajouter :
« A votre avis, qu’est-ce qui a merdé ? ». Toujours ce besoin de stimuler son cerveau, de savoir, d’apprendre, de connaître.
« ...ben... »
Darren soupira. Il essayait de la détourner du sujet mais, visiblement, elle préférait y aller en plein dedans. Il avait déjà été en désaccord avec elle. D’un côté, il avait envie de s’arranger pour abonder dans son sens, histoire de profiter toujours plus longtemps de la chaleur de son corps. Il ne se voyait pas jeté hors de la couverture parce qu’il dirait un truc qui ne lui plaisait pas.
Mais d’un autre, il fallait réagir intelligemment.
« Je suis persuadé qu’on est sur Lantia...le pilote avait fait l’adresse. On avait même reçu le signal retour du code GDO. Donc bouclier baissé. On traverse...et là... »
« Je ne sais pas si nous sommes vraiment sur Lantia. Je ne me souviens pas d’un climat aussi chaotique quelque part sur la planète... », fit Erin en réfléchissant. Quelque chose lui revint en mémoire : « Est-ce que vous avez vu, en quelque sorte, ce flash lumineux dans le tunnel ? »
Il était plutôt d’accord. C’était pas possible d’imaginer une tempête pareille sur Lantia sans que ça n’ait fait le tour de la cité. Du genre “Hé, les mecs, ce coin c’est une vraie merde. Oubliez-le pour la balade en ski.”
Et pour ce qu’il en avait vu de ces amas de rochers parfaitement formés pour défoncer du Jumper, ça lui filait un sacré doute. Il se perdit un peu dans ses souvenirs lorsqu’elle lui parla du flash et il se souvint rapidement de l’événement.
« Je l’ai vu, oui. Et après...on est allé de plus en plus vite. Je n’ai pas fait des centaines de voyages, Madame. Mais ça m’a vraiment pas eu l’air normal, ce qu’il s’est passé. Comme si...ça s'était brisé en chemin... »
« J’ai eu le même sentiment. », fit-elle après un instant de réflexion. Cela lui semblait impossible, et pourtant, il semblerait bien qu’ils aient été déviés de leur destination finale, pour un autre endroit.
« Et les Portes qui volent, ça existe comme technologie, ça ? » lui demanda-t-il avec un peu d’humour.
« Il y en a dans l’espace… Mais qui vole comme ça, je n’ai jamais vu non plus. ». Elle en avait fait des voyages, mais elle était loin de se considérer comme une experte.
« Donc...on a fait l’adresse de Lantia...et on est sorti ailleurs, c’est ça ? »
« Ca m’en a tout l’air. ». Quelle autre explication sinon ?
« Alors...peut-être qu’Atlantis...ou le Dédale... »

Darren cessa de parler, plongé dans ses pensées.
La chaleur partagée de leurs corps lui faisait un bien fou et, maintenant qu’il n’avait plus mourir de froid à petit feu, il sentait à quel point il était épuisé. A quel point son corps avait mobilisé d’énergie pour combattre l’hypothermie. Avec un peu de temps et ce confort de chaleur ridicule, il finirait par piquer du nez.
En cessant de parler, il n’y avait plus que vent qui sifflait contre la paroi. A croire qu’un être invisible et inconstant formé de ces bourrasques les insultaient de tous les noms. Mais il y avait quelque chose derrière. Comme des échos. Des petits “bangs”. Au début, Darren pensait que c’était le fait de la gèle, d’un agglomérat de givre qui frappait contre le blindage défoncé du Jumper. Mais l’écho très particulier montrait bien que ça venait de loin.
Bang...bang...bang-bang…
C’était vraiment étrange, quelque chose d’inconnu en toile de fond. Le regard de Darren se dirigea vers sa tasse dans laquelle il avait laissé un fond de café. Il avait quasi gelé entièrement mais la fine pellicule liquide qui en restait tremblait, comme en réponse de ces échos. Le jeune homme ne put empêcher cette longue inspiration d’angoisse le saisir. Son regard un peu plus écarquillé se posa sur la directrice, cherchant désespérément dans l’expression de ses prunelles le fait qu’il était tout simplement en train de délirer. Et il rencontra des paupières closes.
Mais il y avait bien quelque chose...là-dehors...


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Mar 13 Avr - 17:21

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Erin était restée plongée dans ses pensées elle aussi. Elle n’était pas scientifique et ses connaissances du fonctionnement de la Porte étaient très limitées. Elle tournait et retournait le problème dans tous les sens, aucune solution ne s’imposait à elle. Il n’y avait vraiment plus qu’à attendre que cette tempête se termine et voir où ils se trouvaient en mettant le nez dehors. Attendre de l’aide pouvait être une option, mais il fallait capitaliser sur le fait qu’ils étaient encore suffisamment en forme pour aller en chercher également. A force de réflexion, et maintenant qu’il faisait plus chaud, la fatigue relative à la lutte contre l'hypothermie se faisait sentir et ses paupières lourdes ne tardèrent pas à rendre les armes, loin des préoccupations auditives du soldat. Au contraire, ce bruit l’avait peut-être bercé de part sa régularité, sans qu’elle ne se pose vraiment de questions sur sa nature et sa provenance.

Darren ne voulait surtout pas la réveiller. Si elle dormait, elle récupérerait des forces, elle aurait meilleur moral. L’intégrité de la directrice était devenue une priorité pour lui maintenant qu’il avait récupéré ses moyens. Pourtant, malgré tous les éléments réunis pour l’interdire de bouger, son instinct l’alertait. Comme un animal qui se sent traqué, suivi par un danger mortel et terrifiant. Sa respiration s’était même légèrement accélérée tandis qu’il sentait un courant électrique déplaisant le parcourir.
Clive développa toute une stratégie précautionneuse pour quitter Erin et sa couverture de survie sans la réveiller. En-dehors, il prit conscience de la température si froide et de l’écart qui existait entre la mince frontière d'aluminium. Le soldat souffla dans ses mains puis s’approcha de la barrière de débris, de matériel, qui constituait le colmatage de la brèche. Il parvint à ouvrir une toute petite lucarne pour voir à l’extérieur.
Il faisait quasiment nuit...la tempête était toujours là, toujours aussi violente, avec des vents brusques qui se disputaient dans toutes les directions. Doucement, lentement, il inspectait tout ce que cette meurtrière de fortune lui permettait de voir. Pour le moment, rien d’intéressant. Ca lui filait le stress, un suspens qu’il détestait.

Et c’est là qu’il le vit.
Un flash de lumière, très bref et court, loin dans l’écran brumeux de la tempête. Puis il y en eut un autre, et encore, encore et encore...des boules de lumières qui éclairaient périodiquement le tableau de la tempête. C’était comme dans ces films de guerre, le panorama d’un endroit bombardé en pleine nuit. Les éclats lumineux dans le plus grand silence. Puis les échos des “bangs” qui venaient en décalage.
Un décalage de plus en plus court cela dit.

Darren comprenait qu’il s’agissait d’éclairs. Une sacrée tempête d’éclairs. Mais ça leur venait droit dessus et, ça, c’était très inquiétant. Il tourna son regard vers Erin qui était toujours endormie, se demandant ce qu’il pourrait faire. Mais à part encaisser, il n’avait aucune autre idée.
Il retourna son regard vers le phénomène. Peut-être que ça passerait juste à coté ? Ou que c’était plus impressionnant visuellement qu’en réalité ?
Mais lorsqu’un éclair éclata au loin en visant vibrer l’intérieur du jumper avec violence, là, il sut que c’était bien plus grave que ça.
L'arête rocheuse qui avait eu raison du jumper s’illumina comme en plein jour sous l’arc électrique bleuté, presque violet.

BAAAAAAAAAAAAAAAAAMMMM

L’instant d’après, des éclats de ces roches pourtant loin rebondirent sur la carlingue du jumper comme de la mitraille, prenant Darren par surprise. Il fît un bond en arrière et colmata sa lucarne, le souffle saccadé. Il sentait une expression horrifiée déformer ses traits et il n’osait pas fixer Erin maintenant, de crainte de lui transmettre la trouille qui grandissait en lui.
Une nouvelle détonation, un craquement si violent qu’on aurait cru que le ciel s’était déchiré, fît vibrer le jumper encore plus fort.
« Putain... »

Même épuisée, on ne pouvait ignorer un bruit aussi dantesque que celui qui se produisit dans son sommeil. Erin sursauta en catastrophe. Tout lui revint immédiatement en mémoire. Son sommeil avait été profond, et très certainement réparateur. Cependant, son coeur battait la chamade. La seconde détonation qui fit vibrer le Jumper affola la directrice. Qu’est-ce que c’était que ce bordel ? Un bombardement ? On les attaquait ? Était-ce un orage ? Elle s’était déjà retrouvée dans une tente de camping sous un orage, et elle devait dire qu’elle n’en avait pas mené large à ce moment là, malgré la pomme de terre que son père avait installé en haut du mât principal de ladite tente.
« Qu’est-ce que c’est Darren ? », s’enquit-elle en le rejoignant à petits pas. Si c’était un orage, elle espérait que le Jumper ferait cage de Faradet, mais comment en être sûr ? C’était un vaisseau pour voler… Il devait être hermétique à la foudre non ? Du moins en l’air… mais là comme ça au sol, tout avarié, ce n’était pas sûr.

Il la fixa avec une réelle appréhension, cherchant ses mots pour pouvoir définir tout ça.
« C’est la “vraie” tempête qui arrive... » lâcha-t-il finalement.
Darren pesta et s’approcha de la directrice pour l’écarter de l’ouverture. Il la guida jusqu’au fond de la nacelle et s’installa avec elle au plus loin, recherchant à retrouver la chaleur qu’il n’avait pas voulu quitter. Le vacarme était de plus en plus assourdissant.
« J’ai jamais vu des éclairs comme ça. » lui confia-t-il. « On se croirait dans un champs de bataille. »
Au début, les vibrations qui secouaient le jumper étaient tolérables. Mais cela s’aggrava très rapidement et des arcs éléctrique (en tout cas, c’est ce qu’il pensait), détonnaient non loin d’eux. Lors du coup de trop, Darren choppa la directrice par les épaules et la coucha au sol, ramenant la couverture de survie. On aurait cru le foutu grenadage d’un sous-marin dont les parois dansaient de chaque côté.

VLAAAAAAA !!

Celle fois, un éclair zébra jusqu’à la carlingue. L’éclairage disparu depuis plusieurs heures s’alluma avec brutalité, comme un flash d’appareil photo, tandis que des arc électrique passaient soudainement d’un logement de cristaux à l’autre. Darren était préoccupé par la sécurité de la directrice, il s’était quasiment recroquevillé par-dessus elle dans l’espoir inutile que l’éclair n’irait pas plus loin. Déformation professionnelle de garde du corps, se dirait-il plus tard.
Mais la directrice, elle, vit parfaitement bien le logement contenant la balise de détresse s’allumer comme un sapin de noël. Il était possible de déclencher le mécanisme cette fois...mais à quel danger ?

La vraie tempête” qui arrive. Erin avait trouvé la précédente assez vraie, et au fond, elle se demandait comment ça pouvait être pire que d’être pris dans pareil phénomène météorologique en plein vol. Maintenant qu’ils étaient au sol, il n’y avait plus vraiment de danger, surtout à l’abri dans cette carlingue déglinguée. Cependant, elle n’était pas sereine. Loin de là en fait. Le bruit était abominable, pour ne pas dire atroce, grillant le cerveau en même temps que les tympans, et il y avait peu à faire pour le combattre, si ce n’était de se boucher les oreilles en fermant les yeux du plus fort possible, pour effacer en même temps cette lumière vive et pénible pour les yeux.
La comparaison de Darren avec un champ de bataille était certainement vraie. Erin ne s’était jamais retrouvée au milieu d’un réel conflit, même si elle avait déjà eu la déplaisante expérience d’entendre le chant des armes automatiques. Le bruit était tout aussi désagréable, violent, et envahissant.

Quand Erin pensait que le plus gros était passé, un coup de tonnerre encore plus proche lui arracha un cri, cri qui se renouvella quand le soldat l’attrapa pour la plaquer rudement au sol.
Il fit jour soudainement dans la carlingue. Les lampes s’allumèrent, criant de toute leur incandescence qu’elles étaient malmenées. Les yeux grands ouverts malgré tout, surtout à cause de Darren et de son comportement sur protecteur, Erin vit parfaitement le logement de la balise de détresse s’allumer.

« Darren, la balise ! ». Pour un peu et elle se précipitait pour aller mettre les mains dedans. Heureusement, elle était coincée sous le soldat, ce qui lui permit de remettre de l’ordre dans ses idées : on ne trifouille pas une installation électrique, surtout en plein orage ! C’était un coup à se faire foudroyer manu militari.

Quasiment sur son dos, Erin sentit que son coéquipier avait pris une posture anormale. Il semblait avoir récupéré un casque militaire qu’il lui avait foutu sur la tête, à croire qu’il pensait l’isoler du courant. La simple logique voulait qu’elle se soit transformée en paratonnerre avec ce morceau de métal sur le crâne. Clive l’y avait pourtant déposé volontairement, la respiration saccadée, au bord de la panique.
« Reste à couvert, ça va passer. » gémit-il entre deux craquements qui firent bouger l’épave d’un bon mètre.

Le moteur en avarie s’était également rallumé sous le courant. Une partie du colmatage d’Erin s’effaça en laissant entrer une très brusque bourrasque de blizzard. A partir de là, elle pouvait découvrir l’horrible spectacle de ces centaines d’éclairs qui fonçaient droit sur eux.

La jeune femme n’était pas une simple perdrix qui se serait perdue dans ces steppes froides et austères. Certes, elle n’était pas une pro de la survie, ni même la fille possédant la meilleure constitution de la cité, pas plus qu’elle ne savait vraiment se battre, mais ce qu’elle pouvait prétendre haut et fort, c’était qu’elle n’était pas bête, pas plus qu’elle n’était faible. D’accord, elle avait besoin des autres pour survivre dans cette expédition, un fait qu’elle ne niait absolument pas, mais elle savait qu’elle pouvait elle aussi compter dans ce genre de situation, ne serait-ce que par sa capacité à ne pas se laisser envahir par des émotions primaires. Dans d’autres circonstances, la peur panique pouvait lui couper, et les jambes, et ses capacités de réflexions, mais pour le coup, elle se sentait en pleine possession de ses moyens.

Du coup, la contrainte que lui imposait Darren pour la tenir éloignée des arcs électriques, ainsi que cette stupidité crasse de lui coller un casque en métal sur la tête, l’énerva au plus haut point. Il semblait hermétique à ce qu’elle pouvait dire. Qu’il la tutoie passait encore, surtout qu’ils étaient dans une situation exceptionnelle, où la proximité était de mise.

Le blizzard entra à nouveau dans la carlingue, déchaînant l’apocalypse au sein du Jumper par des rafales de vent tumultueuses. Maintenant, Erin pouvait voir les myriades d’éclairs qui s’abattaient aux alentours, illuminant un paysage rocailleux, enneigé et tellement hostile. D’un geste rageur, elle évacua sa tête de ce casque pour le faire rouler sur le plafond du Jumper.

« Darren, lâchez moi !! » Elle poussa de toutes ses forces sur le sol pour se redresser et combattre la pression que le soldat exerçait sur elle. A dire vrai, de se faire contraindre de la sorte ne lui plaisait pas, et elle sentait poindre le vécu de souvenirs traumatisants qu’elle avait mis du temps à accepter.
« Allez lâche moi ! », fit-elle avec un peu plus d’autorité dans la voix, mue par la panique de se faire bloquer de la sorte. Il fallait aussi qu’elle parvienne à couvrir le boucan que produisait le vent et l’orage.
Et si ce n’était pas suffisant, elle allait commencer à essayer de le frapper pour qu’il cesse immédiatement, chose qui ne serait pas évidente dans la posture où elle se trouvait.



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Mar 13 Avr - 17:41

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Une reine aux neiges éternelles
feat Erin & Darren



Tous ces bruits, ces coups sourds qui résonnaient jusque dans sa poitrine. A chaque fois que ça arrivait, il trouvait que c’était un enfer que peu connaissaient. Dans ces moments là où la faucheuse cherchait à embarquer les gars malgré la couverture, qu’importe l’endroit où ils se cachaient, il n’y avait plus de convictions. Plus rien à foutre d’Atlantis, des objectifs, de la mission et de l’éthique. Seule comptait cet élément : le copain qui partageait la galère.

Ça tonnait de partout, comme une averse dont chaque gouttes étaient composées d’un explosif puissant. Darren s’était recroquevillé par-dessus elle pour la protéger. Déjà parce qu’il savait qu’elle avait déjà paniqué par le passé. Mais aussi parce qu’il pensait qu’elle était la dernière du D4. Son dortoir, c’était sa famille, c’était sa vie.
En se battant sur cette planète désertique de merde, ils n’auraient jamais pu se faire à ce qu’ils y trouveraient. De l’armement et des effectifs Terriens plutôt que Wraiths. On leur avait dit, bien sûr, mais il y avait un monde entre l’information et la réalité.

Cet endroit-là, ils l’avaient surnommé “la gare de triage”.
Le spécialiste de l’unité leur avait dit que ça servait à diriger les clones dans les immenses rangements de ruches une fois endormis. Et qu’à l’inverse, ça les déployaient.
La structure ne fonctionnait plus lorsqu’ils l’avaient investi. Mais c’était devenu un impressionnant champs de bataille comme il en avait rarement vu.

Darren ne se cachait pas à l’avouer : il pensait vraiment y rester.
Ils n’affrontaient pas des Wraiths mais une armée de clones bien entraînés. Ils avaient des caractéristiques de ces sales vampires qui les rendaient plus résistants en prime. Et quand le peloton a été assailli, les pertes se sont très vite accumulées des deux côtés.

Clive ressentait tout comme lors de cette guerre, c’était si familier…si ressemblant.
La dureté du sol, pourtant un composé organique, mais comme du métal tant il était dur. Il se souvenait de tous ces éclats qui volaient dans tous les sens. Ceux qui manquaient d’énergie cinétique rebondissant sur sa gueule, les autres l’écorchant à chaque détonation. Ses poils qui se hérissaient et se collaient contre son uniforme. Le sentiment que sa vessie finirait par lâcher sur chaque détonations. Et ce vacarme qui lui explosait les tympans ! Cette lumière qui donnait le ton d’une boite de nuit sordide dont on ne revenait jamais.

Sa collègue bloquée sous corps hurlait quelque chose mais il ne l’entendait pas. Ce n’est qu’en recevant des coups, dont il sentait bien la panique, que Darren se décala légèrement. Il pensait la priver d’oxygène et il n’arrivait pas à rester bien lucide dans un moment pareil. Il fallait qu’il la laisse respirer.
« APRIL ! ARRÊTE ! » s’écria-t-il en jetant un regard sur elle.
Ce n’était pas un uniforme de militaire coincé sous son torse.
C’était une tenue civile. Une veste et un pantalon beige. Une vaste chevelure dont il ne reconnaissait pas la couleur. Darren sursauta si vivement qu’il fit un bond de côté, libérant brutalement sa protégée. Est-ce que c’était un clone ? Est-ce que c’était un Morphéa ?
Le soldat cligna des yeux, les mains toujours sur la tête, en la fixant avec un air ahuri. Mais...mais...qu’est-ce que la directrice foutait ici ?!?
Dans un mouvement de panique, Darren se tira vers l’opposé et palpa frénétiquement son gilet de ses mains. Il cherchait son P90 mais ne le trouvait pas. Ce n’était pas April, ce n’était pas elle !
« APRIL ?!? » hurla-t-il en la cherchant du regard.
Elle n’était plus là. Et la directrice...qu’est-ce que le Morphéa pouvait bien trouver à prendre son apparence ?

« Je ne suis pas April ! C’est moi Erin ! Bordel Darren, ressaisissez vous ! », fit Erin qui était maintenant en colère. Elle commençait à comprendre qu’il débloquait, certainement à cause du bruit qui le renvoyait à un passé similaire, et il la prenait pour quelqu’un d’autre. Seulement, ce n’était pas le moment de péter un boulard de la sorte. Surtout de façon aussi… brutale.

Dans le chaos infernal de ce bombardement, Darren tenta d’observer son environnement. Sa respiration était saccadée. Il avait l’impression que son coeur allait exploser. Il finit par trouver son neuf millimètres et le pointa sur le monstre pour lui interdire toute approche.
« T’AVANCE PAS OU JE TE... »
Sa phrase se coupa lorsqu’il reçut un banc de neige en pleine gueule. La vague venait de s’infiltrer par le colmatage d’Erin et le rejeta violemment en arrière. Un horrible grincement métallique leur vrilla les tympans. L’instant d'après, la carcasse du jumper roulait sur elle-même, les envoyant balader aux quatre coins de la cabine.
Impossible de savoir ce qu’il venait de se passer. Clive se sentait pris dans le programme le plus violent d’une machine à laver. Il en perdit son arme et le peu de lucidité alors qu’il criait à plusieurs reprises, dans un appel à l’aide terrifié :
« APRIL !!! »
Mais elle n’était pas là. Elle n’était pas venue l’aider.

La jeune femme ne sentait plus le froid environnement désormais. Elle le sentait provenir du canon de l’arme que le soldat pointait sur elle. Heureusement, cela ne dura que quelques secondes avant que le destin ne vienne à son secours. Plus ou moins. Erin fut ballotée dans tous les sens quand le Jumper quitta son apparente stabilité pour faire des rouler- boulers dans la neige.

La carcasse cessa de danser dans tous les sens. La neige avait intégralement recouvert la nacelle arrière. Il faisait noir… si sombre. Darren ne savait plus où il était. Il savait simplement que la tempête d’explosions s’éloignait, qu’elle était en train de se tarir. Alors il resta bien sagement planqué, les mains toujours en protection sur son crâne, en attendant que ça finisse.
Erin comme Darren étaient à bout.

A l’instar de son homologue masculin, Erin ne savait plus où elle se trouvait. Quid du haut et du bas ? Elle était complètement retournée, débraillée, déphasée, déconfite. La peur de se faire tirer dessus était déjà lointaine. Celle de mourir ici à cause des éléments était revenue au premier plan. Elle avait mal partout encore une fois. Recroquevillée dans un coin, elle préférait ne pas tenter de bouger, de peur de faire basculer une nouvelle fois le Jumper dans un tumultueux maelstrom de tonneaux. Qui plus est, si elle se planquait, qu’elle faisait la petite souris, Darren finirait par l’oublier et ne chercherait pas à lui coller une balle en la prenant pour quelqu’un d’autre.

Cette tempête drainait leurs dernières forces. Lorsque ces détonations cessèrent enfin, le calme se troqua pour un sommeil sans délai. La pression était redescendue, les nerfs s’étaient relâchés, et ils tombèrent dans les vapes sans réfléchir à la suite.

Ce qui réveilla Erin en premier était une vive lumière éclairant une partie de son visage. Ce petit halo perçait depuis le seul trou dans la carcasse pour venir lui réchauffer l’épiderme. La neige les avait recouvert mais pas la partie de son colmatage. Pas entièrement en tout cas.
La directrice se découvrit sous une couche épaisse de givre. Ses vêtements craquaient littéralement sous ses faibles gestes alors que ses muscles refusaient de lui répondre. Elle avait mal partout. Les bras et les jambes ankylosées répondaient à peine à ses ordres. Malgré tout, ce qui pouvait lui remonter le moral, c’était de voir au travers de l’ouverture un magnifique soleil bleu.
Le vent s’était calmé, le temps semblait très clément. Voir même chaud, comme en montagne à la belle période.

A l’intérieur de l’habitacle, tout était en bazar. Ils n’étaient plus allongés sur le plafond mais sur un côté du Jumper cette fois. Avec un peu d’analyse concernant les événements de la veille, Erin pouvait se dire qu’ils avaient également été victime d’une avalanche ayant repoussé le jumper encore plus loin. Plus rien ne tenait debout, la majorité des cristaux avaient fondus sous les arcs électrique. Il n’y avait strictement plus rien à espérer de ce coté.

Quant à Darren, il dormait encore, le visage colonisé par le givre. Son souffle régulier, heureusement, laissait paraître des petits panaches de brumes.
Il était vivant. Prostré dans le coin le plus profond du Jumper avec les mains cramponnées autour de son neuf millimètres comme s’il s’agissait d’une bouée de sauvetage.

Erin flottait dans les limbes du temps, l’oeil rivé sur ce petit bout de ciel bleu, là haut. Elle s’imaginait dans une esquif, en fond de cale, à voir le ciel depuis sa tanière, cette même tanière qui l’avait protégée de la mer démontée qui avait fait fureur pendant la nuit. C’était reposant. N’entendre rien, ne pas sentir de secousse. Voir le ciel.
Et pourtant, la sensation de froid revenait progressivement. Elle était le froid. Elle était la mort. Péniblement, elle parvint à se faire violence, à quitter du regard de bout de ciel bleu… du soleil. Dehors, dehors il devait faire chaud ! C’était l’unique raison qui parvint à mobiliser son esprit et sa combativité. De guerre lasse, elle se serait sans doute laissée mourir ici, loin de tout. Alexander n’aurait retrouvée qu’une momie vitrifiée par le froid. Mais non, elle voulait vivre, elle voulait vivre, et surtout, elle voulait avoir chaud !
En couinant, elle se redressa, faisant craquer ses vêtements givrés. Ses extrémités, toujours emmaillotées, elle les sentait parfaitement. C’était déjà un bon début. Repassant par une position infantile, à savoir, à quatre pattes, elle s’aida de la structure du Jumper pour se remettre debout. Le monde tournait un peu, mais petit à petit, elle retrouvait l’usage de ses membres. C’est là qu’elle vit Darren. Il était dans un coin, tenant une arme. Il semblait encore inconscient. Que devait-elle faire ? S’approcher avec souplesse et discrétion pour lui prendre cette arme et la garder pour elle au cas ou ? Ou se tirer d’ici et tenter sa chance seule hors du Jumper, profitant du beau temps pour essayer de trouver de l’aide ? La confiance qu’elle avait en lui s’était clairement envolée avec la tempête. Cependant, elle ne pouvait pas survivre vraiment sans lui dans ce milieu extrême.
Aussi se décida-t-elle à tenter sa chance pour essayer de lui subtiliser l’arme. Déjà, il serait nettement moins dangereux sans ça, même s’il pouvait toujours lui briser la nuque, elle en était certaine. Elle avait l’impression de faire un sacré boucan en avançant petit à petit dans la carlingue. Ses chausses en intérieur de siège n’arrangeaient rien, sans parler qu’elle était un peu gourde du fait du froid qui l’avait congelée.
Avec prudence, elle s’agenouilla près de Darren, et elle tenta de tirer l’arme de ses mains. Il était encore vivant, elle le voyait parfaitement au panache de fumée qu’il recrachait à chaque expiration.

Le jeune homme était perdu dans des rêves tortueux et sans logique. Dans un bouillon de sensations contradictoires, parfois positives, parfois déplaisantes, il se voyait dans des souvenirs, ou des songes à peine contrôlés. Après que l’instructeur les ai fait passer sous les douches, tout habillé, ils avaient couru dix kilomètres avec tout le barda sur le dos. Il ne reconnaissait pas la trentaine d’hommes en exercice avec lui. Pas même un visage familier. Mais puisque la manoeuvre était militaire, il s’en fichait. Darren suivait.

Le chemin, intégralement en pente, s’était terminé sur l’instructeur qui les y attendait de pied ferme. Darren aurait dû être surpris de voir la directrice Steele en uniforme militaire, un grade de colonel sur les épaules, avec un air parfaitement dur et impassible. Il faisait une fixette sur son chignon, les cheveux bien tirés pour symboliser son aspect strict. Elle donnait l’air d’avoir du vécu. A croire qu’elle affichait plus d’expérience de combat que lui. Pour un peu, elle afficherait fièrement une cicatrice de louve sur la pommette, comme dans les films. Darren se sentait parfaitement calme, comme si cette information lui était normale, acquise depuis longtemps. Parce que ce type de rêve était ni contrôlable ni bien cohérent, Clive décréta que c’était une usurpatrice. Elle devait avoir buté Sheppard pour lui piquer son uniforme. Et personne ne mouftait ?!?
Elle ne pouvait pas avoir fait plus de guerres que lui. Sa présence n’avait qu’un but selon lui : assouvir sa soif de pouvoir et de contrôle sur des hommes.
Stupide, n’est-ce pas ?
Darren avait finalement décidé que ça ne lui plaisait pas. Comme ça, d’un coup, parce que le colonel Steele lui demandait cinquante pompes, il avait décidé de se barrer. Le commandement de cette femme lui était inconcevable. Ce n’était pas dans sa nature de renier l’autorité pourtant. Mais l’émotion était bien là, impossible à juguler.

Donc, il était tout simplement parti. A la marche, instantanément sec, il s’était rendu en Gaëllie pour s’installer peinard avec Eidolas. Il n’avait même pas traversé la Porte. Une bicoque au bord d’une rivière, il péchait ou il allait chasser. La princesse l’attendait en parfaite caricature de la femme au foyer. Le bon vieux cliché à l’ancienne, ce qui ne lui ressemblait absolument pas. Ensemble, ils allaient troquer au marché, c’était le moment sympa pour s’aérer. Sinon ils en profitaient pour vivre ensemble sans les regards de politiciens, sans les influences du CODIR ou de n’importe quelle autre hiérarchie. En pure liberté. Son moment préféré, c’est lorsqu’il la regardait dormir.
Il y avait cette impression permanente. Le fait d’avoir récupéré quelque chose qui lui était cher et qui ne bougerait plus jamais. Obtenir son intérêt, son regard, ce genre de chose...Darren ne pouvait pas y poser des mots parce que les rêves ne connaissaient pas la logique. D’ailleurs, ça pouvait rapidement virer au cauchemar.

Le soldat s’était vu reprendre les armes sans la moindre diplomatie. Il défendait son foyer et sa “femme-fantasme”, il se battait comme un diable contre l’armée Atlante, ses anciens collègues. Ce qui le choquait, c’était justement de ne pas être choqué d’abattre ses anciens compagnons d’arme. Par chance, Darren naviguait entre deux eaux, entre songes et inconscience. Il se força donc à retourner sur la partie la plus positive de ces méandres : Eidolas.
Hélas, le froid intérieur qu’il ressentait et le fait qu’une “araignée gelée” lui décollait les doigts l’ejecta de tout ça. Clive répondit donc par une plainte désapprobatrice puis il finit par ouvrir les yeux. Quelques secondes seulement, parce qu’il eut l’impression qu’on lui enfonçait un fer chauffé au rouge dans la cervelle.
« Ahhh... » lâcha-t-il d’une voix éteinte et enrouée.
Il se passa une main sur le visage puis cligna des yeux.
Où est-ce qu’il était ? C’était quoi tout ce bazar ?

Avec cet éveil forcé, tout son corps se rebella et lui hurla sa douleur. Darren sentait à peine ses muscles tant ils étaient congelés et il en était encore à essayer de s’orienter. En partageant quelques plaintes retenues avec une tentative ratée de se redresser, son regard tomba finalement sur une jeune femme dont il peina à reconnaître les traits.
Pour cause. La main qui lui servait à se masser le visage migra vers son crâne et il s’arrêta d’urgence en sentant une terrible brûlure. Là, pile sur le sommet, il avait une sacrée bosse. Rien que le fait de l’avoir rencontré avec le bout de ses doigts anesthésiés, il pouvait maintenant sentir son rythme cardiaque battre au travers de ce coco immense.
Clive fit un peu la grimace et resta assis, conscient que le sol tournait un peu. Il reporta son attention sur la jeune femme qui l’accompagnait. Est-ce que c’était une infirmière ? Ou est-ce qu’il était encore en train de rêver ?
Sa blessure l’avait rendu maboule ?

Effrayé à l’idée d’être frappé d’amnésie, il se concentra sur ses derniers souvenirs. Et tout lui revint en bloc, comme un raz de marée. Non, non, il n’était pas amnésique. Il avait salement déconné la veille en ayant cru protéger April sur la guerre du Boc. Le jeune homme ne se rappelait pas de tous les détails, comme le fait d’avoir menacé rien de moins qu’une directrice du CODIR avec son flingue. Mais il se rappelait bien de leurs situations. Ils étaient tous les deux piégés dans une planète gelée, hostile, avec une tempête d’éclair qui n’existait que dans l’esprit des phobiques de l'électricité.
« Madame la directrice ? Vous allez bien ? » s’enquit-il naturellement.
Son regard s’abaissa sur le neuf millimètres qu’elle tenait dans les mains. Son coeur manqua un battement alors qu’il contrôlait instinctivement son holster de cuisse...vide.
Elle avait peur de lui.

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Mar 13 Avr - 18:30

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Une reine aux neiges éternelles
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Un petit brin d’angoisse lui vint en se faisant cette hypothèse. Peut-être qu’il parlait en dormant et qu’elle avait su que le “colonel Steele” n’était pas du tout à son goût !
Ou, plus rationnellement, est-ce qu’elle avait besoin de cette arme pour se sentir mieux ? Y trouver une source d’assurance ?
Darren ne se souvenait pas l’avoir menacé. C’était très flou. Du moins, il n’avait pas encore creusé assez profond dans ses souvenirs. Il préféra temporiser en n’insistant pas là-dessus. Dans l’immédiat, le soldat n’avait pas besoin de son arme. Il avait besoin de se réchauffer. Si c’était utile à Erin, alors il la lui laissait. Il n’allait pas faire son égoïste.
« C’est...un ciel bleu que je vois là ?!? » dit-il, autant pour la diversion que par un espoir salvateur.
Il crevait d’envie de se réchauffer au soleil et tenta de se redresser une nouvelle fois.
Ses muscles lui faisaient vraiment mal...

Erin n’avait pas été aussi discrète qu’elle l’avait souhaité, mais ce n’était pas bien grave puisqu’elle comptait le réveiller une fois qu’elle lui aurait soutiré l’arme. Le fait qu’il la perçoive avec le 9mm l’embêta, mais elle n’y pouvait rien. L’important, dans l’histoire, c’était qu’il était vivant, et qu’il ne possédait plus un moyen de la tuer. A distance du moins. Quoiqu’il en soit, il ne semblait pas se souvenir de son comportement. Passablement désorienté, il faisait bonne figure. Ou était-ce sa façon d’aborder le sujet ? Erin ne le pensait pas, surtout quand il en vint à parler du ciel bleu. Ou alors, il n’était vraiment pas serein, et il essayait de se soustraire à ses actes. La jeune femme, pour l’avoir côtoyé un moment, alors qu’il oeuvrait plus ou moins pour elle, n’avait pas remarqué ce genre de comportement glissant de celui qui n’assumerait rien. Au contraire. Il ne devait donc pas avoir les idées claires.
« Tout va bien Darren, autant que faire se peut. », fit-elle en haussant des épaules. Si on considérait l’environnement, la situation dans laquelle ils étaient, et la pseudo nuit qu’ils venaient de vivre, tout allait pour le mieux, pour la bonne et simple raison qu’ils étaient encore vivant pour avoir froid. Elle lui montra l’arme, la tenant du bout des doigts, canon dirigé vers le bas.
« Je préfère récupérer votre arme, pour votre sécurité comme pour la mienne. Vous m’avez fichu la trouille cette nuit. Alors… pas d’armes entre nous. ». Elle préférait être honnête derechef, surtout dans leur condition, afin qu’il n’y ait pas de malentendus et qu’il ne se fasse pas de film sur ses intentions. Pour avoir vécu l’enfer sur la mission de prospection, Erin était bien placée pour savoir que la nature humaine pouvait déraper assez vite dans des conditions extrêmes.
« Ah... » répondit Darren avec une mine ennuyée.
Il n’ajouta rien de plus, espérant pouvoir recomposer toutes les infos qui manquaient dans son esprit embrumé. Sa phrase “vous m’avez fichu la trouille” avait une sacré puissance de frappe, il était inquiet à l’idée qu’elle ne lui fasse plus jamais confiance.

Erin afficha un pâle sourire. Elle était encore congelée, et d’une voie certainement plus enjouée, elle ajouta :
« C’est bel et bien un ciel bleu, et je sais pas vous, mais je sens que le soleil fera le plus grand bien. ». Une invitation à aller voir ce qu’il se passait dehors. Elle n’occultait pas ce qu’elle venait de lui dire, et elle était toute à fait prête à en discuter. Il allait forcément se poser des questions, surtout qu’il ne sembait pas vraiment percuter pour le moment.

« Après vous ! » fît poliment Darren en lui ouvrant l’accès, retirant les derniers bagages de colmatage d’un coup de pied.
Il tendit son bras naturellement, sans méfiance, dans un simple élan de galanterie. Il n’y avait pas de sous-entendu vis à vis de l’arme ou de la confiance relative. Darren laissa filer Erin puis farfouilla brièvement dans le jumper. Le coup de la machine à laver d’hier avait flingué une bonne part du matériel. Ce n’était guère plus que des détritus dans une foutue décharge. Mais heureusement, après quelques minutes de recherche, le soldat dégota une boite de ration abîmée. Il coinça le quart militaire sous son aisselle puis sortit à son tour.

L’éclat soudain de la lumière du jour le stupéfia. Il sentit la chaleur se déposer sur sa peau comme une douce caresse, une onde presque divine qui cherchait à le soulager des mauvais traitements de la tempête. Comme une mère qui cajole le gros chagrin d’un enfant, Clive resta là à profiter des rayons du soleil. Il faisait vraiment bon, comme lorsque l’on quitte un hiver ennuyeux et rude, que les premiers jours de beau temps se font une belle promesse d’avenir.
« Ca fait un drôle d’effet... » reconnu le soldat avant de mirer la régularité parfaite de la neige.
Il avança de quelques pas puis tourna le dos à Erin. Il se laissa alors tomber, droit comme une planche, comme si un être invisible l’avait assommé d’un coup. PLOUF ! Dans la neige ! Après avoir ramené la boite et le quart sur son ventre, Darren écarta les bras en croix puis se mit à les bouger de haut en bas. Il formait un “ange” comme le faisait les gosses les lendemains de fortes chutes de neige.
« J’adresse un énorme doigt d’honneur à cette montagne... » lui dit-il pour se justifier. « Et en plus, ça réchauffe ces blocs de glace bizarre qu’on appelle “jambe”. »

La jeune femme avait adopté un comportement plus mesuré. Avec circonspection, elle s’était avancée dans la neige, sondant le terrain pour ne pas chuter dans une crevasse qui se serait dissimulée sous une couche de neige à la régularité admirable. L’effet trompeur lui aurait certainement était fatal, aussi se montrait-elle prudente. L’environnement lui était inconnu, le climat hostile, le terrain pouvait l’être tout autant. Ce fut sans doute pourquoi elle ne fit pas plus que quelques pas au delà de l’abri temporaire qu’offrait le Jumper. Elle ferma les yeux quelques secondes, laissant les rayons du soleil pénétrer sa peau, autant que son âme. Elle était congelée, et cette douce chaleur lui était bénéfique, autant qu’à Darren, qui venait de se laisser tomber dans la neige pour y laisser son empreinte angélique.
Erin lui adressa un sourire alors qu’il se justifiait.
« Prions pour que cette montagne ne prenne pas ombrage de la fougue de Darren Clive. », s’amusa-t-elle en reportant son attention sur les cimes alentours. Ils étaient vivants. Après l’enfer qu’ils venaient de traverser, ils étaient encore vivant. Elle comprenait parfaitement que Darren se laisse aller à quelques fantaisies. Elle-même était tentée de se réjouir, mais elle préférait le faire debout, bien au chaud sur ses deux pieds. Inutile d’aller chercher la neige et sa température assez froide. « Je préfère laisser mes jambes à la verticales pour le moment. », finit-elle par dire.


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